Arrêt du 23 juin 2021, promesse unilatérale de vente, exécution forcée d'un contrat, rétractation anticipée, avant-contrat, force obligatoire du contrat, article 1103 du Code civil, droit des contrats, réforme du droit des contrats de 2016, arrêt Cruz, article 1101 du Code civil, article 1134 du Code civil, rescision pour lésion
Le 1er avril 1999, deux bailleurs ont consenti à des époux une promesse de vente d'un appartement dans un immeuble en copropriété, en fixant un droit d'option conditionné au décès de la précédente propriétaire. Le 17 février 2010, la cobailleresse, devenue attributaire du bien suite à son divorce, se rétracte de la promesse de vente. Cependant, après le décès de la précédente propriétaire, les acquéreurs lèvent l'option de 8 janvier 2011.
Ils assignent la cobailleresse en réalisation de la vente, mais cette dernière demande le rejet de la demande et la rescision de la vente pour lésion. Après une décision de première instance dont l'issue n'est pas renseignée, la cobailleresse interjette appel. Dans un arrêt du 19 mai 2020, la Cour d'appel de Lyon rejette sa demande et déclare parfaite la vente consentie, aux motifs que la rétractation du promettant n'empêchait pas la formation de la vente, car les consentements des parties s'étaient rencontrés lors de la levée de l'option. La requérante forme alors un pourvoi en cassation.
[...] C'est parce qu'elle statue sur la valeur juridique de la promesse unilatérale en confirmant l'existence de rencontre des volontés même en cas de rétractation prématurée que la Cour de cassation retient une solution de principe dans cet arrêt qui s'accorde aux critiques doctrinales (II). I. La confirmation de la rencontre des consentements malgré la rétractation anticipée du promettant Dans cette décision la Cour reconnaît la force obligatoire de la promesse unilatérale en la caractérisant comme un avant-contrat Elle admet par conséquent la possibilité d'obtenir l'exécution forcée du contrat après la rétraction de la promesse de vente A. [...]
[...] Cour de cassation, 3e chambre civile, 23 juin 2021, n° 20-17554 - La rétractation d'une promesse unilatérale de vente par le promettant avant la levée d'option du bénéficiaire peut-elle donner lieu à l'exécution forcée du contrat de vente ? Dans cet arrêt n°20-17554, rendu par la 3e chambre civile le 23 juin 2021, la Cour de cassation se prononce sur la question de la valeur de la promesse unilatérale de vente, notamment sur la sanction envisageable en cas d'inexécution de cette promesse, et opère un revirement de jurisprudence. [...]
[...] Cette décision unifie temporellement le régime juridique de la promesse de vente et admet un principe essentiel selon lequel "la rétractation du promettant ne constituait pas une circonstance propre à empêcher la formation de la vente", et affirme que la Cour d'appel de Lyon "en a exactement déduit que, les consentements des parties [s'était] rencontrés lors de la levée de l'option par les bénéficiaires". Elle abandonne sa position antérieure qu'elle avait adoptée dans l'arrêt Cruz. [...]
[...] Une rupture avec la solution de la jurisprudence antérieure La solution posée par la troisième chambre civile dans cet arrêt rompt avec une position adoptée antérieurement par la jurisprudence depuis une décision de principe du 15 décembre 1993, qui estimait que dans la promesse unilatérale de vente, l'obligation du promettant est qu'une obligation de maintenir la promesse pendant le délai d'option, ne pouvant pas donner lieu à l'exécution forcée du contrat en cas de sa violation. En effet, en vertu de l'ancien article 1142 du Code civil, les obligations de faire ou de ne pas faire se résolvent en dommages et intérêts, article sur lequel se fonde la Cour pour justifier sa décision dans l'arrêt Cruz. [...]
[...] Un alignement avec l'ordonnance de 2016 Dans sa décision du 23 juin 2021, la Cour de cassation se calque sur la réforme du droit des obligations, dans laquelle le législateur autorise l'exécution forcée du contrat et casse l'arrêt Cruz de 1993, à travers le nouvel article 1124 du Code civil qui prévoit que "la révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n'empêche pas la formation du contrat conclus." Cependant, le contrat dont il est question en l'espèce ne relève pas du champ d'application de l'ordonnance de 2016, car la promesse de vente a été émise en 1999, et que la réforme ne s'applique qu'aux contrats conclus à compter du 1er octobre 2016. Ainsi, la Cour de cassation fait rétroagir les dispositions nouvelles à des faits antérieurs à leur entrée en vigueur, ce qui est rare et légalement contestable. Par conséquent, nous pouvons en déduire que les juges de cassation souhaitent s'aligner avec l'ordonnance de 2016 en faisant une application anticipée, afin de supprimer une dualité de régime juridique des contrats causée par l'application de la loi dans le temps. [...]
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