Arrêt du 26 novembre 2020, responsabilité civile, responsabilité du fait des choses, gardien d'une chose, transfert de la garde, responsabilité de l'enfant, arrêt Franck, article 1240-1 du Code civil, arrêt Gabillet, discernement, arrêt du 9 juin 1993, théorie de la garde matérielle, arrêt du 1er mars 1967, arrêt Derguini
En l'espèce, un couple et son enfant âgé de onze ans se rendent chez un couple d'amis. L'enfant se rend au sous-sol du domicile, s'empare d'un pistolet, le charge, le manipule et se blesse. La mère, en tant que représentante légale de l'enfant, assigne en justice le couple d'amis, propriétaire de l'arme, sur le fondement de la responsabilité du fait des choses. Les premiers juges rejettent d'abord les demandes de la mère, puis l'enfant, une fois majeur, interjette appel de ce premier jugement. La Cour d'appel rejette le transfert de la garde de l'arme détenue par le couple d'amis, propriétaire de l'arme. Ce dernier se pourvoit en cassation, considérant que l'enfant s'est rendu seul au sous-sol sans son autorisation pour s'emparer de l'arme et la charger, et s'est donc blessé en la manipulant lui-même.
[...] En effet, la Cour de cassation laisse peser la faute de négligence ou d'imprudence sur le couple d'amis, propriétaire de l'arme, voire sur la mère, responsable de l'enfant, l'enfant ayant pu s'emparer de l'arme à leur insu. Elle retient que l'enfant a échappé à leur vigilance et que la faute de l'enfant ne peut être retenue pour un partage de responsabilité. Implicitement, il est donc bien reproché aux demandeurs au pourvoi d'avoir commis une faute de négligence et d'imprudence. Par ailleurs, il apparaît difficile de concilier l'âge mineur d'un enfant et la matérialité de la garde de la chose. [...]
[...] Le refus par la Cour de cassation de caractériser le transfert de la garde La Cour de cassation a retenu que les propriétaires demeuraient les gardiens présumés de la chose Cette conviction est accentuée par l'âge de la victime alors que ce critère n'était pas toujours retenu auparavant A. Les propriétaires, présumés gardiens de la chose La Cour de cassation était amenée à déterminer si l'enfant avait la direction et le contrôle de la chose litigieuse. En effet, dans un arrêt 2 décembre 1941 (arrêt Franck), la Cour de cassation donnait trois critères permettant de caractériser le transfert du statut de gardien de la chose à une autre personne : l'usage, le contrôle et la direction. [...]
[...] Or, la Cour de cassation avait déjà jugé que la capacité de discernement de l'enfant est, en principe, indifférente dans l'appréciation de sa qualité de gardien (Cassation, ass. plén mai 1984, Gabillet). Et la jurisprudence a souvent privilégié la garde matérielle de la chose et non la garde juridique de la chose. Pourtant, en l'espèce, la Haute juridiction considère que les critères des pouvoirs de garde (usage, direction et contrôle de la chose) n'ont pas été transférés à l'enfant (compte tenu de son âge) et que ce dernier ne pouvait donc devenir le gardien de la chose. [...]
[...] La Cour de cassation a considéré dans cet arrêt que le propriétaire ne détient plus la garde d'une chose dès lors qu'il n'en n'exerce plus les pouvoirs (l'usage, le contrôle et la direction). La conception de la garde matérielle prévaut donc sur celle de la garde juridique. Par ailleurs, la Cour de cassation a eu l'occasion de juger que la qualité de gardien est indépendante de la faculté de discernement, comme dans son arrêt rendu le 1er mars 1967 (Cour de cassation, Civ. [...]
[...] Un arrêt reposant sur les faits Les juges de la Cour de cassation ont rendu leur décision à partir d'une analyse concrète des faits, quitte à s'écarter de sa jurisprudence antérieure Il conviendra donc d'étudier la portée et les limites de cet arrêt A. Un arrêt en marge de la jurisprudence précédente La Cour de cassation, par sa jurisprudence, a longtemps admis que le propriétaire d'une chose en est le gardien présumé, sauf s'il peut prouver qu'au moment du dommage causé par la chose, il n'en était plus le gardien. C'est le sens de l'arrêt rendu le 2 décembre 1941 (Cour de cassation, Chambres Réunies décembre 1941, arrêt Franck) qui a fait apparaître la notion de garde matérielle. [...]
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