Cour de cassation 3e chambre civile 20 mai 2015, termes de contrat, conditions de contrat, terme et condition, droit des contrats, droit des obligations, condition suspensive, jurisprudence, article 1134 du Code civil, article 1176 du Code civil, article 4 de la DDHC, article 1168 ancien du Code civil, obligation conditionnelle suspensive, article 1175 ancien du Code civil, articles 1304 et suivants du Code civil, commentaire d'arrêt
Afin de protéger leurs intérêts, les parties contractantes peuvent poser une condition à la réalisation de l'obligation pour laquelle elles s'engagent. Cependant, dans le cas d'une condition suspensive, subordonnant l'accomplissement de l'obligation à la réalisation d'un événement, la question du délai pour la réalisation de cet événement, surtout celle de son absence, peut poser problème, comme en témoigne cet arrêt rendu le 20 mai 2015 par la troisième chambre civile de la Cour de cassation.
En l'espèce, un particulier a, en 2004, vendu une parcelle de terre, sous condition suspensive que l'acheteur obtienne un certificat d'urbanisme. En 2010, l'acheteur a assigné les héritiers du promettant en réitération de la vente.
Par un arrêt du 27 novembre 2013, la Cour d'appel de Bastia a rejeté les prétentions du demandeur, considérant d'une part qu'au regard de l'intention commune des cocontractants, il était manifeste qu'ils avaient implicitement fixé un terme à la réalisation de la condition, celui-ci étant nécessairement raisonnable, et qu'il ne pouvait dépasser plusieurs années, en l'occurrence six ans, impliquant ainsi que la présente condition était défaillie.
[...] Ce point de vue apparaissait regrettable, car liant indéfiniment la partie au contrat qui ne bénéficiait pas de la condition, celle-ci n'ayant pas la possibilité d'y renoncer, et dépendant donc de la volonté de la partie bénéficiaire d'y renoncer ou non, ou, à défaut, se soumettant à un aléa qui peut apparaître disproportionné de par sa durée, et peu équitable, en ce que seule la partie en bénéficiant aura le contrôle sur propre soumission, ayant la possibilité de mettre fin à l'aléa tant qu'il n'a pas été résolu. La troisième chambre civile, dans son arrêt du 20 mai 2015, est donc revenue sur ces positions, décision qui semble être une bonne chose, car plus raisonnable et sécuritaire pour les parties stipulant la condition suspensive sans délai quant à sa réalisation, même si cette décision semble aussi pousser les parties à ne pas utiliser cette technique. B. [...]
[...] La troisième chambre civile a ainsi considéré que la Cour d'appel de Bastia avait justement retenu « qu'en l'absence d'indexation du prix et de coefficient de revalorisation, les parties avaient eu la commune intention de fixer un délai raisonnable pour la réalisation de la condition suspensive ». On assiste donc à une interprétation souveraine des juges du fond, peut être fondée, sans qu'il soit expressément cité, sur l'article 1175 ancien du Code civil, disposant que « Toute condition doit être accomplie de la manière dont les parties ont vraisemblablement voulu et entendu qu'elle le fût. ». [...]
[...] On pourra enfin noter que le législateur n'a malheureusement pas jugé nécessaire de se pencher sur le cas de la condition suspensive stipulée sans terme, voire l'a même rendu encore plus incertain, en supprimant toute référence au délai relatif à la réalisation de l'événement érigé en condition dans les nouveaux articles 1304 et suivants du Code civil issus de l'ordonnance du 10 février 2016. On pourra seulement constater le rappel législatif de la prohibition des engagements perpétuels via l'article 1210 nouveau du Code civil relatif à la durée du contrat. La fixation d'un délai implicite par le juge, et la contrevenance ou non de l'absence de terme fixé à une condition suspensive à la prohibition des engagements perpétuels resteront donc des considérations purement prétoriennes, donc soumises à la volonté des hauts-juges, qui pourront revirer, et se refonder sur leur ancienne position. [...]
[...] De telles garanties n'ayant pas été prévues, les juges en ont déduit que les parties contractantes avaient la commune intention de procéder à la vente dans un délai court, pendant lequel la valeur de la parcelle promise n'aurait pas changé. Or, si la vente devait se produire à court terme, alors l'obtention d'un permis de construire devait aussi se produire rapidement, étant condition à la survenance de la vente. Ainsi, les juges du fond ont pu déduire que cette survenance de la vente ne pouvait se produire au-delà de plusieurs années, en l'occurrence six ans, et qu'ainsi le terme fixé implicitement à la réalisation de la condition était vraisemblablement dépassé, entraînant alors la caducité de la promesse de vente. [...]
[...] Cour de cassation, 3e chambre civile mai 20015 - Terme et condition Afin de protéger leurs intérêts, les parties contractantes peuvent poser une condition à la réalisation de l'obligation pour laquelle elles s'engagent. Cependant, dans le cas d'une condition suspensive, subordonnant l'accomplissement de l'obligation à la réalisation d'un événement, la question du délai pour la réalisation de cet événement, surtout celle de son absence, peut poser problème, comme en témoigne cet arrêt rendu le 20 mai 2015 par la troisième chambre civile de la Cour de cassation. [...]
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