Le pacte de préférence est une convention par laquelle une personne s'engage, pour le cas où elle se déciderait à vendre un bien, à l'offrir d'abord au bénéficiaire du pacte. Ce type de convention est généralement source d'un abondant contentieux, ainsi que nous le montre l'arrêt rendu par la cour d'appel de Grenoble le 3 mars 2008. En l'espèce, un compromis de vente est établi chez un notaire. Signé le 5 juin 2001, cet acte prévoyait la vente d'un ensemble d'immeubles contigus. Parmi les conditions suspensives était prévue la purge de tous les droits de préemption ainsi que d'un pacte de préférence. Le 1er juin, un incendie endommage gravement les constructions, obligeant le maire à prendre deux arrêtés, l'un ordonnant la destruction des immeubles, l'autre prononçant le péril. Ces deux actes administratifs seront par la suite annulés par le tribunal administratif. Le 18 juillet, la bénéficiaire du pacte de préférence, Madame Raymond, indique vouloir exercer son droit. Le 10 août, le vendeur, Madame Mingaud-Picon déclare renoncer à la vente. Deux ans plus tard, le 31 juillet et le 7 août 2003, un nouveau compromis de vente, concernant les mêmes immeubles, est signé entre Madame Mingaud-Picon et Monsieur Savary. Le bénéficiaire du pacte de préférence assigne alors le vendeur et l'acquéreur devant le tribunal de grande instance de Grenoble afin de faire reconnaître que le compromis du 5 juin 2001 était valable, ainsi que pour obtenir des dommages et intérêts.
Ainsi, plusieurs questions ont été posées à la cour d'appel qui, malgré la destruction partielle des biens, va prononcer la validité du compromis de vente du 5 juin 2001. Par là même, la cour va imposer l'exécution du pacte de préférence. Quelles sont les modalités et conséquences de la mise en œuvre d'un pacte de préférence ?
[...] II/ Une substitution d'acquéreur mais une absence de collusion frauduleuse Une fois la validité du pacte de préférence reconnue, le juge s'intéresse aux conséquences de son application. Ainsi, il prononce tout d'abord la substitution de l'acquéreur Ensuite, il refuse de déduire des faits qui lui sont soumis une collusion frauduleuse entre Madame Mingaud-Picon et Monsieur Savary A Le bénéficiaire du pacte de préférence substitué à l'acquéreur La conséquence la plus évidente de la mise en œuvre du pacte de préférence est la substitution d'acquéreur. [...]
[...] Par jugement du 16 mars 2006, le tribunal prononce la nullité du compromis des 31 juillet et 7 août 2003 et déclare la demanderesse propriétaire des immeubles à défaut d'exercice par la commune de son droit de préemption. L'acquéreur et le vendeur décident, le 24 avril 2006, d'interjeter appel de cette décision, considérant d'une part que l'action était irrecevable et, d'autre part, que le compromis du 5 juin 2001 était sans objet, les biens étant devenus inaliénables. La cour se prononcera en faveur du bénéficiaire du pacte de préférence. [...]
[...] Le juge va alors examiner les circonstances et en déduire l'absence de collusion frauduleuse. En effet, le juge retient que seule la réitération de la vente définitive sans que la bénéficiaire ait été mise en mesure de prendre parti pourrait constituer la violation des droits qu'elle tient de ce pacte, ce qui n'est pas le cas en l'espèce En effet, Madame Raymond avait été correctement notifiée du compromis de vente signé entre les parties le 5 juin 2001, et avait ainsi pu notifier sa volonté d'exercer le pacte de préférence. [...]
[...] Enfin, le juge se penche sur le problème du droit de préemption urbain, qui doit encore être purgé. Alors qu'en première instance, le juge ordonnait sous astreinte à Madame Mingaud-Picon de procéder à cette formalité, la cour d'appel infirme le jugement sur ce point. En effet, le juge prévoit que Madame Raymond peut, si le vendeur ne s'exécute pas, s'acquitter elle-même de cette formalité. Il s'agit d'une disposition visant à accélérer la vente, le vendeur s'étant jusqu'alors montré fort peu coopératif. [...]
[...] En effet, il est de jurisprudence constante que le pacte de préférence constitue une créance de nature personnelle. Dans un arrêt de la chambre commerciale du 13 février 2007, cette interprétation était déjà retenue. Le juge va alors relever que Madame Raymond, qui se prévaut du pacte de préférence, détient de l'acte constatant les obligations respectives des copropriétaires la qualité pour exercer le droit de préférence De plus, la cour d'appel note que l'autre époux, auquel a été notifié le compromis de vente, n'a quant à lui pas souhaité exercer son droit. [...]
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