La révocabilité ''ad nutum '' est celle qui peut être prononcée à tout moment par la décision souveraine d'une seule personne ou de l'organisme habilité à cet effet. Cette révocabilité peut se retrouver dans le contrat de mandat ; dans ce cas, elle autorise le mandant à révoquer son mandataire « à tout moment », sans avoir à se justifier d'un quelconque motif. On retrouve ce principe à l'article 2004 du Code civil qui dispose « le mandant peut révoquer sa procuration quand bon lui semble et contraindre, s'il y a lieu, le mandataire à lui remettre, soit l'écrit sous seing privé qui la contient, soit l'original de la procuration… » Cependant, il existe deux atténuations à ce principe de révocabilité du mandat : l'abus de droit, qui ne sera pas traité dans notre analyse et le mandat d'intérêt commun.
En l'espèce, à la suite d'un décès, une succession a été attribuée à trois enfants et un époux. Ce dernier fut nommé mandataire par les trois enfants mandants pour accomplir en leur nom toutes les démarches nécessaires en vue d'obtenir l'autorisation de lotir un terrain faisant partie de la succession et de réaliser l'opération de lotissement. Par un arrêt en date du 7 mars 2006, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence infirme le jugement de première instance en énonçant que « la révocation du mandat est intervenue légitimement en l'état de la carence fautive du mandataire ». Dès lors, en raison de la faute du mandataire, aucun dédommagement ne devait être octroyé du fait de la révocation du mandat par les mandants.
[...] Une révocation du mandat conditionnée Cette révocation du mandat d'intérêt commun est soumise à la réalisation d'une faute imputable au mandataire condition permettant au mandant de révoquer sans indemnité le mandataire fautif. Il sera intéressant de se demander si cette révocation du mandat par le mandant peut lui permettre de demander des dommages-intérêts au mandataire fautif pour ne pas avoir exécuté sa mission selon les stipulations du contrat A. La faute du mandataire : cause de non-allocation de dommages-intérêts au profit du mandataire fautif Il nous faut revenir sur un arrêt de la Chambre civile de la Cour de cassation en date du 13 mai 1885 qui déclara que lorsque le mandat a été donné dans l'intérêt commun du mandant et du mandataire, il ne peut être révoqué par la volonté de l'une ou même de la majorité des parties intéressées, mais seulement de leur consentement mutuel ou pour une cause légitime reconnue en justice ou enfin suivant les clauses ou conditions spécifiées par le contrat Ce qui nous intéresse ici, ce sont les termes cause légitime reconnue en justice ; ces termes traduisent l'intention des juges de donner autorité à l'une des parties de pouvoir rompre le contrat de mandat d'intérêt commun si une cause légitime est perceptible, entendons par là que le mandataire a commis une faute n'allant pas dans le sens de l'exécution correcte de sa mission. [...]
[...] En l'espèce, il apparait que [les deux mandants ayant révoqué le mandat] sans information sur les diligences qui auraient été accomplies par le [mandataire] et ayant constaté l'absence de tout commencement de travaux, ont pu légitimement déduire que ce dernier n'avait pas mené à bien la mission confiée Cette faute permet donc d'écarter le principe d'irrévocabilité du mandat d'intérêt commun pour tenter de faire exécuter la mission par un autre mandataire qui sera nommé après révocation du mandataire fautif. Enfin, cette révocation sans allocation de dommages-intérêts nous amène à nous demander si justement il ne pourrait pas y avoir l'octroi de dommages-intérêts, mais cette fois au profit du mandant. B. La demande d‘indemnisation du mandant pour la non-exécution des obligations du mandataire La réponse pourrait sembler assez évidente de prime abord puisque la non-exécution d'un contrat doit aboutir à l'octroi d'un dédommagement au profit de la partie lésée. [...]
[...] La Cour de cassation avait en effet pu juger que lorsque le mandat a été donné dans l'intérêt commun du mandant et du mandataire, il ne peut pas être révoqué par la volonté de l'une ou de l'autre partie mais seulement de leur consentement mutuel, ou pour une cause légitime reconnue en justice ou enfin suivant les clauses ou conditions spécifiées par le contrat C'est sur cette assise que le juge de première instance avait fondé sa décision en retenant que la révocation du mandat litigieux donné par [les mandants] à leur [mandataire] était injustifiée, et susceptible de donner lieu à réparation Le mandataire estimait n'avoir commis aucune faute, d'où la demande de dommages-intérêts pour la rupture unilatérale de la convention. Ces dommages-intérêts sont tout à fait justifiés lorsque la révocation du mandat d'intérêt commun intervient sans motif légitime. [...]
[...] Ce dernier n'est pas défini par le Code civil, il s'agit d'une invention prétorienne qui est le fruit de l'évolution du contrat de mandat. Le mandat d'intérêt commun peut se définir comme un mandat de collaboration poussant le mandataire à agir aussi bien dans l'intérêt du mandant que dans le sien C'est d'ailleurs ce type de mandat qui fait l'objet d'un litige dans notre arrêt de la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence rendu le 7 mars 2006. En l'espèce, à la suite d'un décès, une succession a été attribuée à trois enfants et un époux. [...]
[...] Les juges d'appel devaient se demander sous quelles conditions la révocation du mandat d'intérêt commun pouvait donner lieu à l'octroi d'un dédommagement au profit du mandataire révoqué. Par un arrêt en date du 7 mars 2006, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence infirme le jugement de première instance en énonçant que la révocation du mandat est intervenue légitimement en l'état de la carence fautive du mandataire Dès lors, en raison de la faute du mandataire, aucun dédommagement ne devait être octroyé du fait de la révocation du mandat par les mandants. [...]
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