On sait que les baux perpétuels sont prohibés, et qu'est considéré comme tel, le bail dont la durée dépend de la seule volonté arbitraire du preneur. Cependant, faute d'indication légale, la sanction a été fixée par la jurisprudence. Plusieurs possibilités s'offraient alors au juge : la réduction de la durée du bail à 99 ans (loi des 18-29 décembre 1970) ou la nullité. Après quelques hésitations, la Cour de cassation prononça la deuxième solution dans un arrêt du 20 mars 1929. L'arrêt du 15 décembre 1999 rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation s'inscrit alors dans cette lignée jurisprudentielle (...). La question de principe posée par ce moyen met en cause des notions essentielles du droit des obligations et partage la doctrine et la jurisprudence : quel est le délai de prescription applicable à un bail perpétuel ? La Cour de cassation se fondera alors sur l'article 2262 du code civil pour énoncer que « la cour d'appel en a exactement déduit que le bail ne pouvant être considéré comme inexistant et l'action en nullité, même absolue, se prescrivant par 30 ans, la demande de la commune de Cadeilhan-Trachère était irrecevable. Il s'impose alors d'étudier le caractère nécessairement temporaire que doit revêtir un tel contrat (I), puis la prescription trentenaire de l'action en nullité de ce dernier (II).
[...] Cette solution semble alors encore plus paradoxale puisqu'elle rend perpétuel un bail pourtant entaché de nullité. Monsieur Weber, avocat général n'ignorait pas cette conséquence puisqu'il l'a écrit dans ses conclusions publiées à la semaine juridique (JCPG du 26 janvier 2000, page 151) : "Le bail malgré cette disposition nulle, continuera à devoir être exécuté jusqu'à ce qu'éventuellement, un litige quelconque oppose le preneur au bailleur et donne à ce dernier l'occasion d'opposer, sous forme d'exception, la nullité du bail perpétuel à une revendication du preneur". [...]
[...] La commune de Cadeilhan-Trachère se pourvoit en cassation. Elle demande l'annulation du bail litigieux parce qu'elle considère ce dernier comme étant perpétuel. En effet, celui-ci étant renouvelable au gré du preneur, il est donc annulable, d'où l'action en nullité de la commune de Cadeilhan-Trachère qu'elle dit être imprescriptible sur le fondement des articles et 2262 du Code civil. La commune de Saint-Lary refuse l'annulation du bail, car elle considère que même si ce dernier a un caractère perpétuel, il ne peut être annulé, l'action se prescrivant par 30 ans. [...]
[...] Une solution rendant perpétuel un bail entaché de nullité La solution de l'arrêt du 15 décembre 1999 rendu par la 3e chambre civile de la Cour de cassation bien que légalement justifiée n'est pas pour autant entièrement satisfaisante Une solution légalement justifiée Le bail perpétuel, parce que tendant à décomposer le droit de propriété du bailleur, se heurte à l'ordre public et doit être sanctionné par la nullité absolue (I. B). L'article 2262 du Code civil fixe la prescription de doit commun : elle est de trente ans. La nullité absolue est soumise à cette prescription trentenaire, le point de départ étant la conclusion du contrat objet du litige. [...]
[...] publié à la semaine juridique notariale et immobilière mars 2000, page 559). On peut imaginer une solution déjà abordée dans ce commentaire : la requalification du bail en contrat à durée indéterminée ce qui permettrait à chaque partie d'avoir un droit de résiliation unilatéral. Cependant, cela porte atteinte à l'autonomie de la volonté des parties. Une deuxième solution serait de recourir à un mécanisme connu du droit des sociétés (clauses léonines) : réputer non écrite la clause de renouvellement rendant le bail perpétuel. [...]
[...] Souvent, c'est par l'analyse des clauses du contrat que l'on peut conclure à la perpétuité de l'engagement. En général le bail est conclu pour une durée déterminée et comporte une clause de renouvellement au gré de l'une des parties, souvent le preneur, ce qui était d'ailleurs précisément le cas de l'espèce. Lorsque la nullité du bail ne peut plus être poursuivie, en raison de la prescription de l'action, ne peut-on alors pas retenir que seule la clause de renouvellement doit être "réputée non écrite" ? [...]
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