La police administrative est définie par sa mission de faire respecter l'ordre public et l'intérêt général. Au-delà du cadre de la police administrative générale, il existe une police administrative spéciale, dont les pouvoirs sont détenus par des autorités différentes, telles que le ministre de l'Intérieur, ministre de la Culture, les préfets…
C'est du pouvoir de police administrative en son rapport à la notion d'ordre public, dont fait partie la moralité, que traite l'arrêt du 30 juin 2000 rendu par le Conseil d'Etat.
En l'espèce, par sa décision du 22 juin 2000, le ministre de la Culture et de la Communication a accordé au film « Baise-moi » le visa d'exploitation lui permettant ainsi de sortir en salle. Ce visa était toutefois assorti d'une interdiction au moins de 16 ans et de l'obligation d'apposer devant les salles et sur les publicités, un message d'avertissement au public.
L'association Promouvoir, ainsi que les parents de plusieurs enfants mineurs de plus de 16 ans, contestent cette décision de visa rendue par le ministre. Ils ont ainsi formé un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d'Etat afin d'obtenir le reclassement de ce film dans la catégorie des films pornographiques interdits aux moins de 18 ans. Ils estiment que ce film est composé de nombreuses scènes de violence et de sexe non simulées et que cela constitue de cette façon, un message pornographique et une incitation à la violence.
Ainsi se pose le problème juridique de savoir : la non-inscription par le ministre exerçant la police administrative du cinéma, d'un film comportant des scènes de violence et de sexe non simulées à la liste des films pornographiques, peut-elle entraîner l'annulation de son visa d'exploitation?
[...] C'est pourquoi en l'espèce, estimant que le film ne pouvant pas être diffusé à des mineurs, le Conseil d'Etat a décidé d'annuler la décision du ministre de la Culture accordant le visa d'exploitation au film Baise-moi et de cette façon, réaffirmé par cette décision que tout administré peut, au nom du respect de l'ordre public, saisir cette Haute Juridiction et exercer un recours pour annuler une décision d'une autorité publique agissant en sa qualité de police administrative. [...]
[...] Mais il n'était pas non plus possible au ministre de fixer une interdiction aux moins de 18 ans sans inscrire ce film à la liste des films pornographiques. Ainsi, on voit par là à quel point le contrôle du Conseil d'Etat est important, car en cas d'absence, ou d'incohérence des textes, face à laquelle le ministre ne peut pas toujours faire face seul, il permet de former un équilibre et de réétudier le cas précis et sa situation. C'est donc par cela que ce contrôle est fondamental et qu'il doit permettre au juge administratif de pouvoir bénéficier d'un pouvoir d'appréciation libre pour chaque cas. [...]
[...] Mais le ministre reste toutefois fortement encadré. Il l'est déjà en amont de sa décision, par la commission, mais surtout en aval, par la soumission au contrôle du juge administratif s'il est saisi. Ce contrôle a vraiment une importance considérable depuis la jurisprudence du Conseil d'Etat du 24 janvier 1975, arrêt Société Rome-Paris Films, dans lequel le juge administratif s'est déclaré compétent pour non seulement contrôler les décisions du ministre, mais a aussi précisé quels étaient les seuls motifs pour lesquels le ministre pouvait refuser un visa. [...]
[...] Le Conseil d'Etat accueille la requête de l'association et des parents et décide d'annuler le visa d'exploitation du film. En effet, il estime que dès lors qu'aucun texte ne prévoit qu'une œuvre cinématographique puisse être interdite de représentation aux mineurs de moins de 18 ans autrement que par son inscription sur la liste des films pornographiques, le film relevait donc de l'inscription sur cette liste, et de fait, le visa du ministre n'aurait pas dû être délivré. Ainsi, il convient d'étudier dans une première partie en quoi l'annulation de ce visa est une sanction seulement possible par le Conseil d'Etat, seul à exercer ce contrôle mais enfin dans une seconde partie, comment ce contrôle exercé s'est considérablement développé (II). [...]
[...] Les requérants sont en effet fondés à agir, car ils sont les parents de mineurs âgés d'entre 16 et 18 ans, c'est-à-dire la tranche d'âge susceptible d'être autorisée à voir ce film, seulement interdit aux moins de 16 ans. Tout le problème résidant ici dans le fait où la partie demanderesse souhaiterait obtenir l'interdiction généralisée aux moins de 18 ans. Or, aucune interdiction aux moins de 18 ans n'est possible, sauf si le film apparaît sur la liste des films pornographiques. C'est donc au Conseil d'Etat ici saisi, de décider de la solution à apporter à ce problème. Ainsi, il doit examiner chaque cas, avec toujours en vue de protéger et de faire respecter l'ordre public. [...]
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