Commentaire d'arrêt, Troisième Chambre civile, Cour de cassation, 5 février 2013, victime d'un dommage, limiter son dommage dans l'intérêt du responsable
« Doit-on imposer à la victime d'un fait illicite l'obligation de minimiser son dommage, à peine de ne pas être indemnisée des conséquences dommageables qu'elle aurait pu éviter ? ». Si cette question, posée par Romain Loir, suscite la controverse doctrinale depuis quelques années, elle est également au coeur des débats jurisprudentiels comme en atteste l'arrêt rendu par la Troisième Chambre civile de la Cour de cassation en date du 5 février 2013.
Le 14 février 2002, un immeuble en copropriété dans lequel Madame X était propriétaire d'un appartement avait subit un incendie. Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Beau Site avait confié la maîtrise d'oeuvre des travaux de reprise des désordres à la société Cabinet Serge Degani, syndic. Les travaux n'avaient pas exécutés dans leur intégralité.
[...] En effet, le retard d'exécution des travaux sur les parties communes, eu égard à leur faible coût, n'empêchait pas Madame X de les faire réaliser à ses frais avancés, ce qui lui aurait permis d'entreprendre les travaux d'embellissement de son appartement dès l'automne 2004 et de remettre celui-ci en location à partir du 1er mars 2005. Madame mécontente, forme un pourvoi en cassation. Le 5 février 2013, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, casse et annule l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Chambéry et renvoie les parties devant la même Cour autrement composée. [...]
[...] La Cour de cassation ne semble donc pas accueillir une telle distinction entre les différents types de dommage : elle exclut l'obligation de minimisation du dommage, fut-ce t-il matériel. Cette politique jurisprudentielle réfutant catégoriquement l'obligation de minimiser le dommage s'inscrit cependant à contre-courant des solutions retenues par les droits étrangers ainsi que par les projets de réforme B. Un refus majoritairement contesté Le rejet du principe de minimiser son dommage est en contradiction avec la jurisprudence anglosaxonne ainsi qu'avec l'ensemble des projets de réforme français du droit des obligations Une obligation admise en droit anglo-saxon Le droit de Common Law consacre l'obligation de minimiser le dommage sous le nom de la mitigation of damages Cette règle signifie que la victime doit accomplir tous les efforts raisonnables qu'elle est en mesure de faire pour réduire la perte que l'inexécution contractuelle lui cause». [...]
[...] Rigide, cette dernière refuse la découverte d'une obligation positive à la charge de la victime de minimiser son dommage. Elle entraîne l'impossibilité pour le juge de tenir compte du comportement de la victime, qui semble pouvoir, soit empêcher la réduction de son dommage, soit, plus problématique encore, l'aggraver. Certains auteurs ont alors déduit de cette solution la consécration d'une prime à l'inaction de la victime La consécration potentielle de la prime à l'inaction de la victime En interdisant le principe de minimisation du dommage, certains auteurs se sont demandés si n'était pas consacrée une prime à l'inaction de la victime. [...]
[...] La question était alors de savoir si la victime d'un dommage est tenue de limiter son dommage dans l'intérêt du responsable. Les hauts magistrats de la troisième chambre civile de la Cour de cassation, au visa de l'article 1382 du Code civil, répondent par la négative et déclarent que la victime n'est pas obligée de limiter son préjudice dans l'intérêt du responsable Ainsi, si l'arrêt semble opérer un rejet clair de l'obligation de minimisation du dommage il apparaît que ce rejet est pour le moins discutable (II). [...]
[...] Ainsi, en dépit des résistances jurisprudentielles illustrées par cette décision, la consécration de l'obligation de minimiser le dommage pourrait émaner d'une intervention législative. [...]
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