Droit et sectes, en France, ont depuis longtemps entretenu, et entretiennent toujours, des rapports problématiques. Ainsi, encore récemment, l'Eglise de Scientologie n'a pas pu être condamnée à la dissolution pour escroquerie en raison d'un bug législatif ayant supprimé cette peine des peines applicables en l'espèce. Plus généralement, la définition même de la secte semble encore aujourd'hui faire débat, et une définition substantialiste de celle-ci est utopique. Ainsi, le comportement de ces sectes sur leurs adeptes peut être parfois très difficile à définir, au point que malgré le caractère objectivement scandaleux de la soumission des adeptes à celles-ci, le droit a du mal à appréhender, à définir juridiquement, de quel type de violence il s'agit.
En droit des obligations, où la liberté contractuelle et l'autonomie de la volonté fondent la théorie des vices du consentement et exigent un consentement libre et éclairé, la Cour de Cassation se voit donc confrontée à un problème de droit. La Troisième chambre civile, dans un arrêt en date du 13 janvier 1999, tente de résoudre cette problématique liant emprise sectaire et vice de violence.
[...] La Cour de Cassation doit alors en l'espèce se demander si Mme X peut se prévaloir d'éléments d'appréciation postérieurs à la conclusion de la vente pour invoquer le caractère déterminant de la violence dont elle a été victime, c'est-à-dire en l'espèce d'une emprise sectaire, et ainsi, annuler la vente. La Cour répond à cette interrogation que la vente a pu dans ce cas être annulée, le consentement de Mme X ayant été vicié. En effet, pour la Cour de Cassation, il est de l'appréciation souveraine des juges du fond de déterminer si les faits sont ou non constitutifs de violence : en l'espèce, ces derniers ont considéré que l'emprise exercée sur Mme X caractérise un vice de violence ayant déterminé son consentement. [...]
[...] Enfin, la violence dans le cadre d'une emprise sectaire ne se déduit pas d'un fait unique de violence, mais d'un ensemble de faits constitutifs de violence étalés sur une longue période. Ainsi, en l'espèce, la vendeuse aura subi ces violences pendant une période de quinze ans, de 1972 à novembre 1987. Il convient de déduire de ces éléments que la Cour de Cassation est ici confrontée à un type de violence particulier qu'elle se doit de définir, dans le but de tirer de l'espèce des conséquences de droit plus générales. [...]
[...] La demande d'annulation de la vente étant fondée, la requête de la société demanderesse est donc rejetée. Plus généralement, il est intéressant de se demander comment la Cour de Cassation apprécie le caractère déterminant du vice de violence. L'arrêt vient illustrer et préciser, dans le cas d'une relation d'emprise sectaire, des solutions jurisprudentielles existantes. Ainsi, pour obtenir la nullité du contrat, il ne suffit par de prouver l'existence de faits de violence encore faut il que ces faits aient déterminé le consentement du contractant (II). I. [...]
[...] Cependant, l'élargissement de cette hypothèse à la violence ordinaire constituée d'un fait unique semble difficile : ce fait unique ne présente pas de caractère de continuité dans le temps comme dans le cadre d'une emprise sectaire, et des violences postérieures n'auront souvent aucun rapport avec le vice du consentement qui leur est antérieur. Il semble alors que cette utilisation d'éléments d'appréciation postérieurs à la conclusion du contrat soit réservée à des cas très spécifiques, et si ce n'est à l'emprise sectaire, du moins aux violences étalées dans le temps. [...]
[...] Il est alors ici question non plus de l'aspect matériel du vice de violence, mais de son aspect psychologique. L'article 1112 du Code civil concentre en lui seul ce débat : en effet, y sont affirmées les deux théories en ses deux alinéas. Le premier alinéa dispose qu' il y a violence lorsqu'elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable, et qu'elle peut lui inspirer la crainte d'exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent Ici, l'appréciation faite du caractère déterminant de la violence est donc purement abstraite. [...]
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