" Une partie au contrat ne peut se prévaloir de l'inexécution d'une condition suspensive, dès lors que celle-ci bénéficie à titre exclusif à son cocontractant."
Dans un arrêt en date du 12 janvier 2010, la Troisième Chambre civile de la Cour de cassation a eu l'occasion de préciser sa position en matière d'exécution des conditions suspensives. Bien qu'elle censure l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Saint-Denis le 25 avril 2008, elle valide toutefois l'application qui a été faite de l'article 1171 du Code civil.
A la signature d'une promesse de vente le 3 septembre 2004, il était prévu la vente d'une parcelle constructible sous plusieurs conditions suspensives. Ainsi, l'acquéreur devait obtenir un permis de construire, en déposant une demande auprès de la Mairie dans les deux mois suivant la promesse. La condition suspensive prévoyait alors qu'en l'absence de justification de la demande de permis de construire, les acquéreurs ne pourraient se prévaloir d'un refus de permis de construire pour annuler la cession de la parcelle. Néanmoins, le promettant invoque l'absence de justification des démarches entreprises par l'acquéreur, et refuse de réitérer ladite promesse chez le notaire.
[...] Toutefois, si une partie de la condition consiste à l'exécution par l'acquéreur de toutes les démarches nécessaires, on ne peut dès lors qu'observer que ce dernier dispose d'un pouvoir spécial, lui permettant de refuser l'accomplissement de la condition suspensive. La locution pouvoir vient du latin potestas, qui renvoie à la notion de potestatif. On serait ainsi tenté de qualifier le droit de renonciation à l'exécution de droit potestatif, et par analogie, de parler de condition potestative. La condition est dite potestative lorsque sa réalisation dépend uniquement d'une seule partie. Elle confère ainsi un pouvoir absolu à son bénéficiaire, qui choisira ou non de l'accomplir. [...]
[...] C'est donc la qualification juridique de la condition retenue en début d'étude qui est à l'essence même de la protection juridique au sein de l'engagement. Qu'elle soit mixte ou simplement potestative, la présence d'un tiers permet de réguler l'équilibre des pouvoirs et de garantir les intérêts de l'ensemble des cocontractants. Cette décision met en évidence une volonté toujours grandissante de la Cour de cassation d'optimiser la sécurité et l'équilibre juridique des cocontractants. Dans cette optique le rôle de la qualification est un enjeu majeur qu'on ne saurait ignorer. [...]
[...] La promesse est un acte par lequel le promettant s'engage à faire, ne pas faire ou donner quelque chose au bénéficiaire. Il ne s'agit pas d'un contrat, elle a vocation à créer une obligation qui ne sera réalisée qu'après l'accomplissement de conditions préalables appelées conditions suspensives. La condition suspensive est un événement futur et incertain auquel est subordonnée la naissance de l'obligation. Ainsi, une fois réalisée, la promesse donne lieu à la création d'un contrat reprenant les différents droits et obligations convenus entre les parties. Dans le cas d'espèce, il s'agit d'une promesse synallagmatique de vente d'une parcelle de terre. [...]
[...] La qualification de condition simplement potestative semble dans ce cas être plus judicieuse. Ce caractère intrinsèque de la condition pose certaines difficultés, car il peut faire envisager un déséquilibre entre les parties. La décision de la Cour de cassation va donc être justifiée dans la mesure où elle vise le cas d'espèce comme une exception aux principes généraux régissant les conditions suspensives. Cette dérogation permet ainsi à la Haute juridiction de limiter la portée de la condition et de réguler l'équilibre entre les parties. II. [...]
[...] Ainsi le promettant au moyen de son pourvoi souhaitait activer la clause pénale, estimant que l'inexécution de la condition suspensive par l'acquéreur constituait une faute donnant lieu à réparation. Cet arrêt permet d'une part de contourner l'action en annulation d'un promettant qui serait de mauvaise foi en se prévalant d'une condition sans rapport direct avec ses droits et l'objet du contrat ; d'autre part d'éviter que l'acquéreur abuse de son droit et affecte l'acte de façon arbitraire. Car il ne s'agit surement pas ici d'un droit potestatif, auquel cas l'équilibre des parties serait manifestement affecté. [...]
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