Commentaire de l'arrêt, Première Chambre civile, Cour de cassation, 12 juillet 2012, manquement à l'obligation d'information du chirurgien, droit à l'information, responsabilité du chirurgien, produits défectueux
Quelle responsabilité pour la personne qui, utilisant un produit défectueux, cause un dommage à une autre ? C'est une question à laquelle la directive européenne du 25 juillet 1985 est venue apporter une réponse, laquelle doit être déclinée selon les matières. Ainsi, quelle responsabilité pour le chirurgien qui, utilisant une prothèse défectueuse, cause un dommage à son patient ?
La responsabilité médicale est en effet une thématique récurrente devant les tribunaux tant ses enjeux sont importants, que ce soit pour les patients ou pour les médecins. L'arrêt du 12 juillet 2012 en est la parfaite illustration. Suite à une opération ayant nécessité la pose d'une prothèse, une seconde lui fut substituée en raison du déplacement de la première. Quelque temps plus tard, cette seconde prothèse éclata au cours d'une partie de tennis, ce qui contraint le patient à subir une nouvelle intervention chirurgicale pour la retirer. Il rechercha alors tant la responsabilité des deux chirurgiens que celle du fabricant de la prothèse défectueuse.
[...] Bacache, D p.2277). C'est tout le raisonnement de la haute Juridiction qui se retrouve brouillée, ne tirant pas nécessairement les bonnes conclusions de ses constatations. C'est en réalité parce que le chirurgien qui pose une prothèse est un fournisseur, et non un prestataire-utilisateur de produit de santé, qu'il ne peut être responsable que pour faute. La responsabilité du praticien ne pouvant être que pour faute, cette solution fait apparaître certaines difficultés. [...]
[...] Alors que cet arrêt s'inscrit dans une évolution favorable de la jurisprudence relative à la sanction du défaut d'information, il induit paradoxalement des lacunes et retours en arrière en ce qui concerne la responsabilité du fait des produits défectueux du chirurgien. II. La responsabilité du chirurgien du fait d'une prothèse défectueuse Ce régime particulier institué par la directive européenne du 25 juillet 1985 pousse encore une fois à s'interroger quant aux régimes de responsabilité pour ou sans fautes existantes internes et son application ne permet pas d'éviter certains travers La seule faute contractuelle comme fondement de la responsabilité du praticien La haute juridiction a pu constater la violation du régime de la responsabilité pour faute tout en usant d'une motivation surprenante quant au rôle, au statut du chirurgien La violation constatée de la responsabilité pour faute La Cour de cassation condamne par cet arrêt la violation de l'article 1147 du Code civil, commise par les juges du fond. [...]
[...] Le préjudice moral étant systématiquement établi dès lors qu'un manquement à l'obligation d'information est avéré, il doit nécessairement être indemnisé. La nécessaire réparation du préjudice moral L'indispensable réparation du préjudice moral constitue véritablement la sanction du défaut d'information et en cela même une garantie d'indemnisation pour le patient mal informé La sanction du défaut d'information médicale Cet arrêt vient confirmer le revirement de jurisprudence entrepris par la première chambre civile dans sa décision du 3 juin 2010 09- 13.591 en reprenant son attendu à l'identique : le non-respect du devoir d'information cause à celui auquel l'information était légalement due, un préjudice que le juge ne peut laisser sans réparation Ainsi, en écho à ce qui a été précisé sur l'indifférence de la caractérisation d'une perte de chance pour établir le préjudice moral, celle-ci ne détermine pas plus le droit à indemnisation du patient mal informé. [...]
[...] Le patient ne peut donc rechercher la responsabilité sans fautes du fournisseur de prothèses en raison du recul opéré par cet arrêt, ni même à titre subsidiaire sur le fondement de la directive en cas de non-identification du producteur, cette hypothèse ayant été exclue pour ce protagoniste par la haute Juridiction. Ainsi, le dommage causé par un défaut d'information est désormais mieux réparé par le prestataire de soins que celui causé par le défaut d'un produit qu'il utilise (pré-cité). [...]
[...] S'agissant du second chirurgien et du fabricant, ils furent condamnés in solidum pour manquement à leur obligation de sécurité de résultat par les Conseillers de la Cour d'appel de Pau, ce qui entraîna la formation d'un pourvoi, puis d'un pourvoi incident. Diverses questions se posaient devant la haute Juridiction, notamment celle de savoir quelles étaient les conséquences du manquement à son obligation d'information du chirurgien, mais aussi quelle était sa responsabilité quant à l'utilisation d'une prothèse défectueuse. Les magistrats ont retenu dans leur arrêt du 12 juillet 2012 que la lésion du droit à l'information, qui est un droit personnel et subjectif, entraînait un préjudice qu'il fallait nécessairement réparer et, au visa des articles 1147, 1386-1 à 1386- 18 du Code civil, qu'en l'absence de faute du chirurgien dans l'utilisation d'une prothèse défectueuse, sa responsabilité ne pouvait être engagée. [...]
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