Commentaire d'arrêt, Première Chambre Civile, Cour de cassation, 11 avril 2012, obligation d'information de la banque, emprunteur
Le consentement est au centre du droit des contrats et justifie ainsi une protection renforcée. L'arrêt rendu par la première chambre de la Cour de cassation le 11 avril 2012 rappelle que l'intégrité du consentement doit être protégée, mais qu'il doit également être éclairé.
En l'espèce, un acquéreur avait recouru à un crédit-bail pour financer l'acquisition de matériel médical. S'apercevant de l'inadéquation de la chose acquise à ses besoins professionnels, l'acquéreur a demandé l'annulation du contrat de crédit-bail et a recherché la responsabilité du crédit-bailleur. La Cour d'appel a rejeté ces demandes en retenant que l'erreur ne portait pas sur les qualités substantielles de la chose et que, l'emprunteur étant averti, aucun devoir de mise en garde ne pesait sur la banque. Le demandeur forme alors un pourvoi en cassation aux moyens que le contrat résultait d'une erreur déterminante du crédit-preneur sur les qualités substantielles de la chose, et que la banque supportait une obligation de mise en garde en raison de la qualité d'emprunteur profane du crédit preneur qui, bien qu'agissant dans le cadre de son activité professionnelle, n'était pas averti.
[...] L'arrêt commenté est une confirmation de la jurisprudence issue de l'arrêt du 29 juin 2007 rendu par la chambre mixte de la Cour de cassation qui avait mis fin à une différence d'interprétation entre les chambres civiles et commerciales. La qualité d'emprunteur averti ou profane est un élément de fait, et la Cour de cassation se contente dans l'arrêt commenté de confirmer la décision de la Cour d'appel. En l'espèce, la preuve de l'existence d'un devoir de mise en garde, qui pèse sur l'emprunteur (voir arrêt du 18 février 2009 1 chambre civile de la Cour de cassation), n'avait pas été rapportée. [...]
[...] L'erreur inexcusable est l'erreur dont le cocontractant ne saurait supporter les conséquences, car elle relève d'une légèreté blâmable de l'errans. Le concept d'erreur inexcusable ne figure pas dans le Code civil. Il est issu d'une jurisprudence encore confirmée par la Cour de cassation dans l'arrêt étudié. La Cour suprême confirme la Cour d'appel d'avoir considéré que l'erreur relative à l'usage de la chose est une erreur sur les motifs. En effet, il s'agit de la raison personnelle qui a mené l'acquéreur à contracter. [...]
[...] Le demandeur soutenait dans l'arrêt commenté que son erreur portait sur une qualité substantielle de la chose, à savoir son aptitude à servir utilement l'acheteur. Il s'agit là d'une question de fait à laquelle seuls peuvent répondre les juges du fond, sauf erreur manifeste. La Cour de cassation confirme ici la décision de la Cour d'appel, qui considère que l'erreur de l'acquéreur n'est pas une erreur sur la substance de la chose. Le demandeur invoquait dans son moyen le fait que l'erreur était déterminante puisque, à défaut, l'acquéreur n'aurait pas contracté. [...]
[...] On notera que cette preuve paraît difficile à rapporter puisque cela suppose que l'emprunteur ait découvert, entre la date de la conclusion du contrat et la prescription de l'action, qu'une information lui a été dissimulée. Quand bien même cela serait le cas, il devrait encore prouver qu'il n'en avait pas eu connaissance. On ne doit donc pas être surpris, à la lecture de l'arrêt commenté, de voir que, là encore, le demandeur n'a pas été en mesure d'apporter cette preuve. [...]
[...] Quelle est l'obligation d'information de la banque à l'égard de l'emprunteur ? La Cour de cassation rejette le pourvoi au motif que l'erreur relative à l'inadéquation de la chose aux besoins professionnels de l'acquéreur est une erreur portant sur les motifs, et non sur les qualités substantielles de la chose. Il s'agit ainsi d'une erreur qui ne peut pas être sanctionnée. Elle rejette également le deuxième moyen en retenant la qualification d'emprunteur averti de la cour d'appel, et justifie sa décision en rappelant que la banque n'a d'obligation de mise en garde qu'à l'égard de l'emprunteur profane ou de l'emprunteur averti à l'égard duquel la banque dispose d'informations sur sa situation financière que le premier ignore. [...]
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