Selon Jean Dutourd : « Tout usage finit par se changer en abus ». Tel est le problème rencontré avec le prêt à usage d'une chose permanente consenti pour une durée indéterminée. L'arrêt du 10 mai 2005 de la première chambre civile de la Cour de cassation nous en donne une parfaite illustration. En l'espèce, M.X a consenti le prêt d'un appartement dont il est propriétaire à sa fille Mme Y, sans fixer de terme. Souhaitant récupérer le bien, il demande la résiliation judiciaire du contrat. Une juridiction de premier degré inconnue rend une décision inconnue à une date inconnue. M.X interjette appel à une date inconnue. La cour d'appel d'Aix-en-Provence, le 5 mars 2002, rejette la demande de M.X aux motifs de l'absence de preuve d'un besoin pressant et imprévu de ce dernier de récupérer l'appartement en question servant à Mme Y du fait d'une situation financière difficile. M.X se pourvoit en cassation à une date inconnue. La première chambre civile de la Cour de cassation, le 10 mai 2005, casse et annule l'arrêt rendu par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence le 5 mars 2002 et renvoie les parties devant la même Cour d'appel, autrement composée.
[...] Commentaire d'arrêt de la Première Chambre civile de la Cour de cassation du 10 mai 2005 L'obligation de restitution de l'emprunteur Selon Jean Dutourd : Tout usage finit par se changer en abus Tel est le problème rencontré avec le prêt à usage d'une chose permanente consenti pour une durée indéterminée. L'arrêt du 10 mai 2005 de la première chambre civile de la Cour de cassation nous en donne une parfaite illustration. En l'espèce, M.X a consenti le prêt d'un appartement dont il est propriétaire à sa fille Mme sans fixer de terme. [...]
[...] En effet, la reconnaissance d'une faculté de résiliation unilatérale constitue le droit commun des contrats à durée indéterminée. Cette faculté jouant dans les contrats de bail, contrat d'entreprise, a fortiori, doit-elle s'appliquer dans le commodat à durée indéterminée. De plus, la personne procurant un avantage purement gratuit mérite bien davantage d'indulgence et de sollicitude et ainsi donc ce droit de résiliation unilatérale. Il serait en effet difficile d'imaginer le prêteur enserré dans des contraintes beaucoup plus fortes que celles concernant un bailleur. [...]
[...] La confirmation logique de l'obligation essentielle de l'emprunteur : la restitution de la chose. L'article 1875 du Code civil énonce la définition du contrat de prêt à usage ou commodat. C'est le contrat par lequel l'une des parties livre une chose à l'autre pour s'en servir, à la charge par le preneur de la rendre après s'en être servi. Ainsi, au visa de cet article la cour de cassation rappelle que : l'obligation pour le preneur de rendre la chose prêtée après s'en être servie est de l'essence du commodat. [...]
[...] Ce dernier sera alors obligé de restituer la chose. Mais pour protéger ce dernier, les juges ont enfermé ce droit de résiliation par le prêteur dans le respect d'un délai de préavis raisonnable. On peut définir ceci comme le délai d'attente à observer entre le moment où le commodataire est informé de la rupture du contrat par acte d'huissier ou lettre avec accusé de réception et la date à laquelle le prêt à usage prendra effectivement fin. On estime ce délai entre 3 et 6 mois environ, ceci étant laissé à l'appréciation souveraine des juges du fond. [...]
[...] Ensuite, cet arrêt de la première chambre civile ne fait plus référence au recours au juge pour déterminer la durée du prêt. Cet argument fait l'objet de considérations ambivalentes. Pour certains auteurs, ceci est critiquable, car l'intervention du juge permettait une harmonie dans les solutions, mais pour d'autres, l'amitié (contrat de prêt à usage souvent considéré comme un service entre amis) impliquant une volonté de se tenir en dehors du droit, cette mise à l'écart du juge est alors bénéfique. [...]
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