faute objective, responsabilité objective, infans, discernement
La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans l'arrêt rendu le 28 février 1996, consacrant pleinement la responsabilité personnelle de l'infans ainsi que l'avènement de la faute civile objective en matière de responsabilité du fait personnel, admet que la responsabilité d'un mineur peut être retenu à son encontre même s'il n'est pas capable de discerner les conséquences de son acte.
En l'espèce, Sonia Pierre, âgée de huit ans, a été confiée par sa mère pour une soirée à M. Bernard Aybram. Lors de cette soirée, Sonia qui jouait sous une table a brusquement surgi de dessous celle-ci et a heurté le fils de M. Aybram, mineur lui aussi, qui passait par là avec une casserole d'eau bouillante dans les mains. Sonia a subi d'importantes brûlures.
Saisie d'une action en réparation engagée par la mère de la victime à l'encontre du père de l'autre enfant, auquel elle avait été confiée, et de son assureur, le Groupe des populaires d'assurances, la Cour d'appel de Besançon, dans un arrêt rendu le 27 janvier 1994, y a fait entièrement droit en retenant que le comportement de la jeune victime « était parfaitement prévisible et naturel dans le contexte au cours duquel il s'était produit », « compte tenu de son jeune âge ». M. Bernard Aybram se pourvoit alors en cassation.
[...] L'arrêt commenté ne concerne que la faute simple de la victime. Aussi, ne concernant qu'un type de faute, on ne peut pas prétendre que la solution exclut le discernement de la définition de toutes les fautes civiles. Il apparait alors que la conscience a toujours un rôle dans la définition de l'illicéité pour la faute simple. Et cela ne contrarie pas son appréciation in abstracto. Mais en outre, elle est toujours requise pour les fautes caractérisées, qui ne paraissent pas tendre à être appréciées objectivement. [...]
[...] La prise en considération de l'âge de l'auteur-victime par la Cour d'appel est explicitée par la formule compte tenu de son jeune âge que l'on retrouve dans ses motifs. Elle intègre donc dans l'appréciation de l'illicéité du comportement de l'enfant des éléments de fait, alors que l'appréciation de la faute objective est une appréciation in abstracto. Mais, comme une partie de la doctrine l'a montré, qui souligne la relativité de l'appréciation in abstracto de l'illicéité, à l'instar de M. Jourdain, une appréciation in abstracto est abstraite uniquement en ce sens que la psychologie de l'agent est indifférente. Elle ne signifie pas que les références concrètes doivent être méconnues. [...]
[...] Le comportement de l'infans est fondé sur une appréciation objective de la faute. Cette conception objective de la faute a pour objet d'assimiler, en droit de la responsabilité délictuelle, la personne atteinte d'un trouble mental et l'infans à une personne sensée. Il s'agit là d'une appréciation in abstracto, qui opère une comparaison entre le comportement de l'agent et celui d'un standard de référence: le bon père de famille c'est-à-dire l'homme prudent, droit et avisé placé dans les mêmes circonstances que l'auteur du dommage. [...]
[...] Après une consécration timide entreprise par les arrêts Derguini et Lemaire rendus par l' Assemblée plénière de la Cour de cassation en 1984, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans son arrêt du 28 février 1996, consacre pleinement la notion de faute objective commise par un enfant en bas âge une telle définition de la faute de l'infans étant critiquable (II). I. La définition nouvelle de la faute de l'infans. La deuxième chambre civile vient ici confirmer de manière explicite la conception objective de la faute de l'infans en écartant la condition de discernement La cassation de l'arrêt est consécutive à une application rigoureuse de la faute objective. [...]
[...] Ce courant admet en effet que le modèle soit affiné en considération de l'âge de l'agent. D'ailleurs, la Cour de cassation a parfois pris ce parti, notamment en 1989, où elle a jugé que l'âge d'un adolescent, à savoir 16 ans au moment des faits, lui permettaient de comprendre la danger prévisible auquel il exposait ses camarades Cette décision n'était pas isolée. En effet, les décisions rendues après les arrêts de 1984 qui consacrent la faute objective, continuent à relever l'âge de l'enfant et certaines persistent à faire du discernement une condition de la faute. [...]
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