La conviction erronée des cocontractants constitue un vice du consentement seulement si l'erreur porte sur les qualités substantielles de la chose objet du contrat. Ce vice de consentement pourra entraîner l'annulation de l'acte, seulement en est il de même lorsque l'apparition d'un doute intervient après la conclusion du contrat ?
Il s'agira ici d'étudier les arrêts de la première chambre civile de la Cour de cassation en date du 24 mars 1987 et du 13 janvier 1998 portant tous les deux sur les vices de consentement dans des contrats relatifs à la vente d'une œuvre d'art.
Dans l'arrêt du 24 mars 1987, le défunt M. Vincent a vendu aux enchères publiques, un tableau comme étant « attribué à » Fragonard. L'authenticité du tableau n'a été reconnue que par la suite. Les héritiers du vendeur assignent en justice l'acheteur dans le but d'annuler cette vente pour erreur.
Dans l'arrêt du 13 janvier 1998, la société Drima Investment a acheté un pastel sur contre-épreuve au cours d'une vente aux enchères tenue par le commissaire-priseur Mr.Z, assisté d'un expert Mr.X. l'œuvre était authentifiée et attribuée aux peintres Mary Cassat. Par la suite le comité Mary Cassat a fait savoir à l'acquéreur qu'il existait un doute sur l'authenticité de l'œuvre. L'acquéreur assigne en justice le commissaire-priseur et l'expert pour une action en responsabilité. Il demande également à ce que la nullité de la vente pour erreur sur la qualité substantielle de la chose vendue soit prononcée.
[...] Dans la seconde espèce, il n'y avait aucun doute au moment de la vente sur l'authenticité de l'œuvre d'art, elle avait été inscrite au catalogue comme étant une œuvre authentifiée de la peintre Mary Cassat, le doute est survenu après la conclusion du contrat et de nouvelles expertises. Seulement, il n'existe qu'un doute sur l'authenticité de l'œuvre d'art, mais ce doute n'est pas comme dans la première espèce, une donnée objective du contrat qui confère à ce dernier un caractère aléatoire interdisant au requérant d'en poursuivre l'annulation. En effet, il est fondé à poursuivre l'annulation, seulement il sera difficile de rapporter la preuve d'un doute, et bien que la sécurité du contrat soit garantie dans ce cas, l'acheteur se trouve lésé. [...]
[...] Cela a effectivement été le cas, et les héritiers du vendeur ont alors souhaité faire appel du fait d'une erreur sur les qualités substantielles de la chose vendue. Cependant la Cour d'appel et par la suite la Cour de cassation refusent d'accepter l'erreur sur la qualité substantielle de la chose du fait que celle-ci était insérée dans le champ contractuel, les requérants ne sont par conséquent pas en mesure de demander l'annulation de la vente, car ils ont accepté cet aléa. [...]
[...] On retrouve ici une discordance entre la croyance du vendeur au moment de la vente et la réalité. La cour considère tout de même que l'aléa confronté à la certitude ne permet pas d'obtenir la nullité. La doctrine a notamment regretté dans cet arrêt que la porte ouverte sur l'incertitude avec l'affaire Poussin se soit si vite refermée. Une telle décision est avantageuse pour les professionnels des transactions d'œuvre d'art qui, sous couvert d'une définition dubitative de l'objet vendu ou acheté, se trouvent désormais à l'abri d'une action en nullité. [...]
[...] La Cour de cassation faite bien le distinguo entre ce qui est déterminant pour l'acheteur, en l'espèce la certitude que l'œuvre est bien authentique, et son erreur stricto sensu, c'est-à-dire la différence entre sa conviction, à savoir l'authenticité du tableau, et la réalité qui est que l'œuvre ne l'est peut être pas. L'arrêt dissocie le caractère déterminant de l'erreur et le caractère substantiel de la qualité. La première qualité est appréciée in abstracto alors que la seconde le sera au regard du requérant. [...]
[...] Il s'agit alors de savoir si la substance en matière d'œuvre d'art peut se composer de l'authenticité de l'œuvre et demander l'annulation lorsque celle-ci est erronée. La substance n'est pas nécessairement la matière de l'objet, mais elle peut être également entendue comme la ou les qualités de la chose que les parties avaient principalement en vue en contractant. Il semble en effet que la jurisprudence a accepté de prendre en compte l'authenticité d'une œuvre comme qualité substantielle lors de la conclusion d'un contrat. [...]
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