Les clauses limitatives de responsabilité sont celles qui, supposant la faute contractuelle établie, fixent le maximum possible des dommages et intérêts (ou encore le plafond de responsabilité). En principe, elles sont valables, mais il existe quelques exceptions comme l'illustre la tétralogie des arrêts Chronopost, dont le troisième volet résulte de l'arrêt à commenter de la chambre mixte de la Cour de cassation dans son arrêt du 22 avril 2005. En l'espèce, le 31 décembre 1998, la société Dubosc a confié à la société Chronopost un pli destiné à la ville de Vendôme contenant son dossier de candidature à un concours d'architectes. Le dossier aurait dû parvenir au jury avant le 4 janvier 1999 mais n'a été livré que le lendemain. La candidature de la société Dubosc n'a donc pas pu être examinée. Elle a assigné la société Chronopost en réparation de son préjudice. Cette dernière a invoqué la clause limitative d'indemnité pour retard figurant au contrat-type annexé au décret du 4 mai 1988. La Cour d'appel de Versailles, dans son arrêt du 7 février 2003, condamne la société Chronopost à payer une indemnité de 22,11 euros au motif que la clause limitative de responsabilité étant réputée non écrite et aucune faute lourde n'étant caractérisée, une telle faute ne pouvant résulter du seul retard dans la livraison, il convient de limiter l'indemnisation de la société Dubosc au coût du transport. La société Dubosc se pourvoi en cassation. Elle estime que l'obligation de célérité ainsi que l'obligation de fiabilité sont des obligations essentielles du contrat et que leur inexécution suffit à constituer une faute lourde et à priver d'effet la clause limitative de responsabilité.
Mais l'inexécution d'une obligation essentielle suffit-elle à caractériser une faute lourde permettant de mettre en échec la limitation d'indemnisation prévue au contrat-type ?
Si oui la société Dubosc pourra demander la réparation intégrale du préjudice qu'elle a subit. Sinon, elle ne pourra être remboursée que du coût du transport, comme le stipule le contrat-type annexé au décret du 4 mai 1988.
La Cour de cassation, siégeant en chambre mixte, décide de rejeter le pourvoi le 22 avril 2005, en se fondant sur l'article 1150 du Code civil et sur le décret du 4 mai 1988. En effet, si une clause limitant le montant de la réparation est réputée non écrite en cas de manquement du transporteur à une obligation essentielle du contrat, seule une faute lourde, caractérisée par une négligence d'une extrême gravité confinant au dol et dénotant l'inaptitude du débiteur de l'obligation à l'accomplissement de sa mission contractuelle, peut mettre en échec la limitation d'indemnisation prévue au contrat-type établi annexé au décret.
Ainsi, il convient de voir tout d'abord les clauses limitatives de responsabilité (I), puis la faute lourde et ses conséquences en matière d'indemnisation (II).
[...] Cette solution est confirmée dans l'arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 21 février 2006. Cet arrêt opte lui aussi pour une définition subjective de la faute lourde et se refuse à l'assimiler à l'inexécution d'une obligation essentielle. Le principe de la distinction entre le manquement à une obligation essentielle du contrat et la faute lourde est admise en jurisprudence. [...]
[...] En effet, en l'espèce, le contrat conclu entre la société Dubosc et la société Chronopost stipulait une clause limitative de responsabilité au profit de Chronopost en cas de retard. Mais cette clause contredit l'engagement de Chronopost, à savoir ses obligations de célérité et de fiabilité. Elles constituent des obligations essentielles qui sont des obligations de résultat. Il suffit donc de rapporter la preuve que le résultat n'est pas atteint pour engager la responsabilité du débiteur. Le pli de la société Dubosc est arrivé avec un jour de retard. Le résultat prévu n'est donc pas atteint et la responsabilité de la société Chronopost doit être engagée. [...]
[...] La société Dubosc se pourvoit en cassation. Elle estime que l'obligation de célérité ainsi que l'obligation de fiabilité sont des obligations essentielles du contrat et que leur inexécution suffit à constituer une faute lourde et à priver d'effet la clause limitative de responsabilité. Mais l'inexécution d'une obligation essentielle suffit-elle à caractériser une faute lourde permettant de mettre en échec la limitation d'indemnisation prévue au contrat-type ? Si oui la société Dubosc pourra demander la réparation intégrale du préjudice qu'elle a subit. [...]
[...] Commentaire d'arrêt : Chambre mixte avril 2005 Les clauses limitatives de responsabilité sont celles qui, supposant la faute contractuelle établie, fixent le maximum possible des dommages et intérêts (ou encore le plafond de responsabilité). En principe, elles sont valables, mais il existe quelques exceptions comme l'illustre la tétralogie des arrêts Chronopost, dont le troisième volet résulte de l'arrêt à commenter de la chambre mixte de la Cour de cassation dans son arrêt du 22 avril 2005. En l'espèce, le 31 décembre 1998, la société Dubosc a confié à la société Chronopost un pli destiné à la ville de Vendôme contenant son dossier de candidature à un concours d'architectes. [...]
[...] Le troisième épisode de la saga des arrêts Chronopost que constitue l'arrêt de la chambre mixte de la Cour de cassation du 22 avril 2005 défini les contours de cette notion de faute lourde. Selon elle, la faute lourde est caractérisée par une négligence d'une extrême gravité confinant au dol et dénotant l'inaptitude du débiteur de l'obligation à l'accomplissement de sa mission contractuelle Le dol est une manœuvre frauduleuse ayant pour objet de tromper l'une des parties à un acte juridique en vue d'obtenir son consentement. [...]
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