Aux termes de l'article 1131 du Code civil, « l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet ». L'inefficacité ainsi visée par le Code civil n'est autre que la nullité sanctionnant l'absence de cause au moment de la formation du contrat. A cette absence totale de cause, la jurisprudence a assimilé le caractère de la contrepartie. L'importance que le législateur attache à la notion de cause explique qu'il en est fait, au-delà de sa fonction de condition de validité de l'acte, une condition permanente d'efficacité. Dès lors, la disparition de la cause au sein d'un contrat jouerait un rôle comparable à son existence initiale. En dépit de l'absence de cause, doit être envisagée l'hypothèse de la fausse cause mentionnée en second lieu par l'article 1131 du Code civil, qui est alors traitée soit comme un cas spécifique d'absence de cause soit comme une erreur, un vice du consentement.
En l'espèce, la société Meria, conclut le 17 avril 2002 un contrat de nature synallagmatique, de location portant sur un lot de cassettes vidéo et de DVD pendant une durée de 12 mois avec l'association Tourisme et culture Bordeaux. Après s'être acquittée du paiement d'une partie du prix de location, l'association assigne son cocontractant en annulation ou résolution de contrat, en remboursement de la somme versée et en indemnisation de son préjudice, aux motifs que le montant des transactions mensuelles de paiement versées l'empêchait de financer les autres objectifs poursuivis par l'association et que son budget ne lui permettait pas d'assurer une telle dépense. La Cour d'appel répond par l'affirmative à la demande de l'association et frappe le contrat de nullité pour absence de cause et absence de contrepartie réelle pour l‘association. La société Meria forme alors un pourvoi en cassation.
[...] La chambre commerciale de la Cour de cassation, dans son arrêt du 9 juin 2009 casse et annule l'arrêt de la Cour d'appel le 29 novembre 2009, aux motifs qu'il existe une réelle cause objective de contracter chez les deux parties au contrat. Cet arrêt opère donc un revirement jurisprudentiel important, puisque depuis un arrêt du 3 juillet 1996 de la Cour de cassation, cette dernière exigeait une cause subjective pour déclarer nul un contrat. Afin de comprendre cet arrêt du 9 juin 2009, nous étudierons comment la Cour de cassation ne retient pas la cause subjective du contrat puis en quoi cet arrêt opère un revirement important de la jurisprudence antérieure I. [...]
[...] Elle s'oppose donc de la notion de cause objective, qui est un motif commun à chacun en ce qui concerne les contrats synallagmatiques. L'intérêt de cette cause subjective est qu'elle permet un contrôle de conformité du contrat à l'ordre public et aux bonnes mœurs. En l'espèce, dans cet arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 9 juin 2009, la Cour d'appel a jugé en suivant l'appréciation des juges de première instance que l'absence d'une cause subjective au sein d'un contrat synallagmatique pouvait frapper un contrat de nullité. [...]
[...] La notion de cause ne peut donc être invocable par l'un des contractants lorsque ce dernier réalise de mauvaises affaires économiques, ce qui est le cas de l'association en question, qui en s'acquittant aux paiements mensuels prévus par le contrat de location s'empêche de poursuivre d'autres objectifs financiers et ne dispose pas en définitive des fonds nécessaires pour honorer sa part du contrat. La Cour de cassation prend donc en considération l'insuffisance de cause en appliquant l'article 1131 du Code civil. [...]
[...] Dans son arrêt du 9 juin 2009, la Cour de cassation ne réaffirme pas une telle position en estimant au contraire qu'au sein d'un contrat synallagmatique, l'obligation d'une partie réside dans l'obligation contractée par l'autre. La cause réelle du contrat synallagmatique n'est alors pas la cause subjective, même si cette dernière engendre un déséquilibre financier pour l'une des parties et rend donc le contrat inégalitaire sur le plan économique. En effet, la Cour de cassation dans cet arrêt estime souverainement que la cause essentielle au sein d'un contrat synallagmatique est la cause de l'obligation, car c'est elle même qui va lier les deux contractants à l'obligation d'exécutions de prestations réciproques. [...]
[...] Une fois cette contrepartie constatée, et que la réciprocité des parties au contrat est acquise, il n'est pas nécessaire de prouver un quelconque équilibre économique contractuel. L'idée dans cet arrêt est alors que la cause subjective n'a pas été conçue en droit français dans le but de permettre au juge de contrôler l'équilibre des prestations des contractants et donc prolonge l'idée même que la lésion n'est pas une cause de nullité des contrats synallagmatiques déséquilibrés. C'est pourquoi, en l'espèce, la Cour de cassation ne suit pas les juges de la Cour d'appel dans leur appréciation, estimant que le simple fait de la cause subjective ne peut entraîner la nullité du contrat de location passé entre la société Meria et l'association Tourisme et culture Bordeaux du fait que la cause de l'obligation d'une partie à un contrat synallagmatique réside dans l'obligation contractée par l'autre En effet, la Cour de cassation estime que la cause subjective à l‘origine du déséquilibre financier entre les parties au contrat ne peut avoir pour effet de frapper ledit contrat de nullité. [...]
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