Commentaire d'arrêt, Assemblée plénière, Cour de cassation, 17 juin 1983, abus de fonction
Si chacun garde une part de responsabilité eu égard une action entreprise en commun, il doit en aller autrement dans le cadre d'un agissement individuel portant préjudice à autrui. C'est en substance l'enseignement de cet arrêt rendu par l'Assemblée plénière de la Cour de cassation le 17 juin 1983.
En l'espèce, un préposé détournant une certaine quantité de marchandise destinée à un client, avec l'intention de la fournir à son père, l'a déversée en un endroit, s'apercevant qu'il était suivi, polluant ainsi les réservoir d'eau de différentes communes.
La juridiction de première instance compétente fut saisie par les victimes de la dégradation causée par le préposé.
Appel fut ensuite interjeté devant la Cour d'appel compétente, avant qu'un pourvoi ne fut formé devant la chambre compétente de la Cour de cassation, cassant l'arrêt rendu par la Cour d'appel et renvoyant les parties devant la Cour d'appel de Lyon statuant sur l'affaire le 26 mars 1982.
La Cour d'appel de Lyon écarta la responsabilité civile du commettant concernant les dommages commis par son préposé alors que les victimes soutenaient que les infractions avaient été perpétrées à l'occasion, pendant le temps de travail et dans l'exercice de ses fonctions par le préposé, ce qui engageait la responsabilité de son commettant.
[...] Il faut, au surplus, que le préposé ai agit à des fins étrangères à ses attributions. Ces «fins étrangères à ses attributions» renvoient à un but que le préposé souhaitait atteindre, ne correspondant pas aux fonctions normales de l'emploi qu'il exerce. Il y a alors une discordance entre le fait réalisé par le préposé et celui, normalement, attendu de lui. L'appréciation subjective de l'abus de fonction : Pour l'Assemblée plénière, cause des dommages» doit résider «dans un acte délibéré», ce qui revient à dire que le préposé doit avoir eu conscience de son acte, de sa portée. [...]
[...] Un second pourvoi en cassation fut donc formé devant la Cour de cassation qui se réunit en Assemblée plénière pour trancher si un commettant est civilement responsable des dommages causés par son préposé agissant à des fins personnelles mais à l'occasion et pendant son temps de travail ? La Cour de cassation réunit en Assemblée plénière rejette le pourvoi en tranchant que le commettant n'est pas civilement tenu des conséquences des actes de son préposé agissant à l'occasion et pendant son temps de travail, dès lors que ses agissements ont été perpétrés sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions, le plaçant hors des fonctions auxquelles il était employé. [...]
[...] L'Assemblée plénière de la Cour de cassation ne précise plus que l'abus de fonction est caractérisé en cas d'usage abusif d'un véhicule par le préposé et mis à disposition par l'employeur. Les termes de l'attendu sont généraux et ne visent pas de cas particuliers, ni ne requièrent d'éléments trop précis, alors que dans le cas d'espèce c'était notamment au moyen d'un véhicule mis à disposition par l'employeur que le préposé avait causé le dommage. Il y a donc une réelle volonté de la Cour de cassation, réunit en Assemblée plénière de mettre fin à l'opposition entre les Chambres criminelle et civile. [...]
[...] Elle avait donc une lecture libérale de l'article 1384 alinéa 5 du Code civil. La Chambre civile considérait, au contraire, qu'une caractérisation d'un abus de fonction, conçu comme un acte étranger à la fonction, indépendant d'un acte de préposition unissant le préposé à son employeur, suffisait à écarter la responsabilité du commettant. D'où une conception restrictive de l'application de l'article 1384 alinéa 5 du Code civil. L'Assemblée plénière de la Cour de cassation, en date du 10 juin 1977 (n°pourvoi : 75-93163), avait déjà précisé «que le commettant n'est pas responsable du dommage causé par le préposé qui utilise, sans autorisation, à des fins personnelles le véhicule à lui confié pour l'exercice de ses fonctions». [...]
[...] Le critère de l'autorisation est un critère objectif, en ce qu'il ne demande pas la recherche d'un élément psychologique, c'est un élément purement factuel. L'autorisation existe ou non L'autorisation maintient le lien de préposition puisqu'elle suggère un ordre ou des instructions sur la manière de remplir les fonctions auxquelles le préposé est employé. Néanmoins, l'absence d'autorisation concoure à placer le préposé «hors des fonctions auxquelles il était employé», selon les termes du présent arrêt. Objectivement, l'absence d'autorisation ne suffit pas à caractériser l'abus de fonction. [...]
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