Mots-clés : droit privé & contrat, droit des obligations, commentaire d'arrêt, raisonnement juridique, code civil
Notre avis :
Ne dérogeant pas à la règle, ce commentaire d'arrêt interroge la décision prise par la Cour de cassation lors de l'assemblée plénière du 6 octobre 2006. Le raisonnement juridique suivi par l'auteur tend à analyser la décision négative tout en mettant les faits en perspective afin de proposer une alternative envisageable.
Seul bémol, la structure du commentaire d'arrêt manque de clarté. L'introduction est un peu longue et un découpage des différentes interrogations permettrait une lecture plus fluide.
Les trois bonnes raisons de lire ce commentaire d'arrêt:
- C'est une bonne manière de réviser les articles du Code civil invoqués dans l'Assemblée plénière du 6 octobre 2006
- Il résume efficacement les faits et les raisons expliquant la décision de la Cour de cassation (litige, opposabilité du contrat)
- Il offre un bon exemple de modèle pour cet exercice de rédaction incontournable
À qui s'adresse ce commentaire d'arrêt ?
- Aux étudiants en droit privé et/ou contrat
- Aux professionnels du droit des obligations
- À toute personne intéressée par l'argumentation des décisions juridiques
L'article 1165 du Code civil dispose que les conventions n'ont d'effets qu'entre les parties contractantes, elles ne nuisent point aux tiers et elles ne lui profitent que dans les cas prévus par l'article 1121. Cet article règle donc les effets que le contrat peut produire à l'égard des tiers. Ainsi, en principe, le contrat ne va produire d'effets qu'entre les parties et il ne va pas produire d'effets à l'égard des tiers. Cependant, qu'en est-il en pratique ?
En l'espèce, des bailleurs on donné à bail un immeuble commercial à la société Myr'Ho. Celle-ci a ensuite confié la gérance de son fonds de commerce à la société Boot shop. La société Boot shop a assigné les bailleurs en référé pour défaut d'entretien des locaux. Elle souhaite obtenir la remise en état des lieux et le paiement d'une indemnité provisionnelle en réparation d'un préjudice d'exploitation.
La cour d'appel de Paris, le 19 janvier 2005 a fait droit à la demande de la société Boot shop. Devant la Cour de cassation, les bailleurs affirment que le tiers à un contrat peut invoquer la situation de fait créée par les conventions auxquelles il n'a pas été partie, dès lors que cette situation de fait lui cause un préjudice de nature à fonder une action en responsabilité délictuelle. Mais, ils ajoutent qu'il faut, dans ce cas, que le tiers établisse l'existence d'une faute délictuelle envisagée en elle-même indépendamment de tout point de vue contractuel.
Faut-il que le tiers à un contrat établisse l'existence d'une faute délictuelle indépendamment de tout point de vue contractuel pour invoquer la situation de fait, créée par une convention à laquelle il n'a pas été partie, qui lui a causé un préjudice ?
Grande fut la surprise de certains juristes lorsque la Cour de cassation a répondu par la négative. Selon elle, « le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ». Ainsi, il suffit que le dommage soit caractérisé et qu'il ait été causé par un manquement contractuel pour que le tiers qui se dit lésé invoque ce manquement sur le fondement de la responsabilité délictuelle.
Cette solution de la Cour de cassation revient-elle à confondre responsabilité délictuelle et responsabilité contractuelle en ce qui concerne l'action des tiers par rapport à un dommage causé pour inexécution ou mauvaise exécution de l'obligation d'un contractant ?
Dans un premier temps, il s'agit alors d'étudier l'extension de l'effet relatif du contrat aux tiers (I) pour pouvoir ensuite répondre, qu'en effet, la solution de la Cour de cassation, en l'espèce, revient à effectuer une confusion des responsabilités délictuelle et contractuelle (II).
Mots clés: contrat, commentaire d'arrêt, tiers, délictuelle, effet relatif, 19 janvier 2005, société Myr'Ho, article 1165, code civil, responsabilités contractuelles, responsabilités délictuelles, assemblée plénière
[...] La solution que retient l'Assemblée fait que les tiers victimes sont alors soumises au même régime, du moins sur le plan de la preuve de la faute, que le créancier contractuel. Ils peuvent obtenir l'exécution d'un contrat dont ils ne sont même pas partie. Cette solution, ne va-t-elle pourtant pas à l'encontre du principe de l'effet relatif qu'énonce l'article 1165 du Code civil ? Peu importe, pour l'Assemblée Plénière, toute faute contractuelle est délictuelle à l'égard des tiers au contrat. [...]
[...] Un tiers peut donc invoquer un contrat pour rechercher la responsabilité d'une partie car il peut arriver qu'un tiers subisse un préjudice du fait de la mauvaise exécution du contrat. La responsabilité délictuelle (article 1382 du Code civil) est une responsabilité pour faute, supposant un dommage et un lien de causalité entre ces deux notions. Cela signifie que les tiers ne peuvent se prévaloir de la simple inexécution ou mauvaise exécution du débiteur contractuel, un dommage est nécessaire mais ce dommage ne peut résulter de la simple existence du contrat, il doit avoir sa source dans le manquement du débiteur contractuel. [...]
[...] Par contre dans le premier cas, une telle solution conduit à neutraliser la distinction des notions de partie et de tiers au contrat. L'obligation est, à la base, strictement contractuelle pourquoi alors accepter que celle-ci constitue une faute délictuelle dont un tiers peut se prévaloir pour agir en responsabilité délictuelle contre le débiteur contractuel ? Le débiteur se trouve alors dans l'obligation de remplir son contrat pour tout le monde et non pas simplement pour le créancier envers qui, à la base il s'est engagé. Qu'en est-il de la sécurité juridique ? N'importe qui peut invoquer le contrat pour en tirer profit. [...]
[...] Un manquement à ces devoirs engage donc leur responsabilité contractuelle. En l'espèce, le contrat de bail ne concerne que les bailleurs et la société Myr'Ho. Ainsi, si l'immeuble loué était en mauvais état il n'aurait pas été étonnant de voir la société Myr'Ho engager la responsabilité contractuelle des bailleurs. Seulement la société Myr'Ho a confié la gérance de son fonds de commerce à une deuxième société, la société Boot shop et c'est cette même société qui a assigné en référé les bailleurs. [...]
[...] Il n'y a aucune obligation de rapporter la preuve d'une négligence ou d'une imprudence commise par le créancier, au sens de l'article 1382 du Code civil. Cette solution semble aller à l'encontre du principe de la relativité de la faute contractuelle. Elle lui substitue même le principe de l'identité des fautes contractuelle et délictuelle, position très discutée par la doctrine. Conformément à l'article 1165 du Code civil, le tiers peut agir en responsabilité délictuelle contre un débiteur qui lui a causé un dommage en raison de l'inexécution de ses engagements contractuels mais cela ne l'autorise en aucun cas à agir en qualité de créancier contractuel. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture