Accessorium sequitur principale ? Est-il vrai que l'accessoire suit toujours le principal ? Telle est la question délicate posée implicitement à la Cour de cassation par arrêt de sa chambre mixte du 8 juin 2007. La chambre commerciale de la Cour de cassation a estimé devoir soumettre cette question à la chambre mixte en raison d'une divergence de jurisprudence apparue avec la troisième chambre civile.
En l'espèce, une société Y (débiteur) acquiert un fonds de commerce. Par acte du 8 octobre 1993, son dirigeant social, M.X, se porte caution solidaire du remboursement du solde du prix de vente envers le vendeur (M.Y, créancier de la société). Par la suite, la société a été mise en liquidation judiciaire. Le dirigeant décide donc d'assigner le vendeur en nullité de la vente du fonds de commerce pour dol afin de faire prononcer la nullité de son engagement de caution. Le créancier forme alors une demande reconventionnelle en paiement du prix.
La combinaison des articles 2289 (« Le cautionnement ne peut exister que sur une obligation valable. On peut néanmoins cautionner une obligation, encore qu'elle pût être annulée par une exception purement personnelle à l'obligé; par exemple, dans le cas de minorité ». — [Ancien art. 2012]) ; et 2313 du Code civil (« La caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal, et qui sont inhérentes à la dette; mais elle ne peut opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur ». — [Ancien art. 2036]) a donné lieu à discussion sur le point de savoir si la caution pouvait ou non invoquer, afin de se soustraire à ses obligations, la nullité relative de l'obligation principale. C'est à cette question controversée que la chambre mixte de la Cour de cassation vient de donner une réponse dans sa décision du 8 juin 2007.
[...] C'est ce que la troisième chambre civile de la Cour de cassation avait décidé le 11 mai 2005, mais en qualifiant l'exception d'inhérente à la dette. Ici c'est une solution totalement opposée qu'adopte une chambre mixte de la Cour de cassation. En l'espèce, la Chambre mixte de la Cour de cassation s'appuie sur une lecture littérale des textes précités et conforte la position d'origine en décidant que la caution ne peut opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur principal Elle rajoute que le dol constituait bien une exception purement personnelle donc inopposable au créancier par la caution. [...]
[...] En l'espèce, le débiteur principal (la société est une personne morale et la caution (M. est son dirigeant. Celui qui a été trompé est donc, de fait, la personne physique représentant la personne morale. Il en résulte que l'état psychologique de la personne morale dont le consentement est affecté est, en réalité, celui de son représentant, ce qui facilite en l'espèce la preuve à rapporter, ainsi que la constatation de l'absence de confirmation de la nullité relative. On peut donc en déduire que la caution était personnellement concernée par le dol du créancier. [...]
[...] On présume que c'est en se basant sur la lettre des articles 2289 et 2313 du Code civil que la Chambre mixte a surement rendu sa décision du 8 juin 2007 refusant à la caution le droit d'invoquer les exceptions purement personnelles au débiteur principal. En ce sens, la solution est totalement justifiée, car basée sur des fondements légaux, donc licites. De plus, il subsiste des éléments sérieux à l'appui de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, qui militent dans le sens de l'irrecevabilité de l'exception de nullité de la vente pour dol, invoquée par M.X (la caution) contre M. [...]
[...] D'une part, le cautionnement est un contrat qui se forme par l'échange des consentements de la caution et du créancier, et le dol qui vicie le consentement de l'une des parties ne peut entraîner la nullité du cautionnement que s'il émane de l'autre partie. En d'autres termes, bien qu'il soit accessoire à l'obligation du débiteur principal envers le créancier, le cautionnement est une convention conclue entre la caution et le créancier, à laquelle le débiteur n'est pas partie ; le dol dont le créancier s'est rendu coupable est donc jugé indifférent pour ce qui concerne la caution, sauf si l'erreur provoquée par ce dol porte sur "la substance même de l'engagement". [...]
[...] C'est le cas du dol, destiné à protéger le débiteur principal et donc que n'étant pas partie au contrat de vente, la caution n'est pas recevable à invoquer la nullité relative tirée du dol affectant le consentement du débiteur principal. Deux notions semblent être ici en conflit : d'une part, le caractère personnel du dol, et d'autre part, le caractère accessoire du cautionnement. En l'espèce, la Cour de cassation considère que la caution, partie accessoire au contrat principal, ne peut opposer la nullité relative tirée du dol affectant le consentement du débiteur principal Cette analyse, entraînant une remise en cause du caractère accessoire du cautionnement, semble dénaturer la conception de cautionnement (II). I. [...]
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