Un pacte de préférence est la convention par laquelle, une personne, le promettant, s'engage pour le cas où elle déciderait de vendre un bien donné, à en faire prioritairement la proposition à une autre personne, le bénéficiaire.
Dans cet arrêt, un acte de donation-partage, établi le 18 décembre 1957, contenait un pacte de préférence, attribuant la propriété d'un immeuble à l'un des copartageants. En 1985, une parcelle de l'immeuble est transmise par une autre donation-partage, laquelle rappelle l'existence du pacte de préférence. Cependant, l'attributaire de cette parcelle la vend quelques mois plus tard à une société civile immobilière, sans avoir proposé aux autres copartageants bénéficiaires du pacte de préférence de l'acquérir en priorité. En 1992, un des bénéficiaires du pacte de préférence demande sa substitution dans les droits de l'acquéreur, la société civile immobilière et, subsidiairement, l'octroi de dommages-intérêts. La cour d'appel de Papeete, par un arrêt du 13 février 2003, lui accorde les dommages-intérêts, mais refuse sa substitution à l'acquéreur, le bénéficiaire forme alors un pourvoi en cassation. La cour se réunit en chambre mixte pour statuer.
Le pourvoi estime qu'une obligation ne se résout en dommages-intérêts que lorsque son exécution en nature est impossible, et qu'en dehors de cette impossibilité, une réparation doit être prioritairement envisagée en nature. Ainsi, la cour d'appel aurait fait une fausse application de l'article 1142 du Code civil.
[...] D'autre part, on peut dire que la substitution vient sanctionner une vente conclue de manière frauduleuse, puisque la Cour de cassation cherche à caractériser la mauvaise foi du tiers par une double exigence de connaissance. Or la sanction de la fraude est de la rendre inefficace, le contrat de vente frauduleux est donc inopposable au bénéficiaire du pacte, il fait comme si le contrat n'existait pas, ainsi l'offre contractuelle contenue dans le pacte de préférence est encore valable, et le bénéficiaire du pacte peut toujours s'en prévaloir, donc conclure la vente, ce qui justifie également la substitution. [...]
[...] Farges, les juges du fond pourraient également ne pas se sentir liés par une telle stipulation qui renoncerait au droit d'obtenir la substitution et écarter cette stipulation. Dans ce cas-ci, le pacte de préférence serait alors bien plus contraignant qu'il ne l'était auparavant. Voyons désormais l'influence que cet arrêt pourrait avoir sur la valeur d'un autre type d'avant-contrat, les promesses unilatérales de vente. Les promesses unilatérales de vente sont un type d'acte qui au lieu de donner la priorité à une personne au cas où l'on voudrait vendre son bien, constituent un engagement de vendre son bien au cas où le bénéficiaire de la promesse lèverait l'option avant un délai préétabli. [...]
[...] Ainsi, la cour d'appel aurait fait une fausse application de l'article 1142 du Code civil. De plus, le pourvoi affirme qu'un pacte de préférence doit s'analyser comme l'octroi d'un droit de préemption, donc comme une obligation de donner, qui s'exécute en la substitution du bénéficiaire du pacte à l'acquéreur. La cour d'appel ayant refusé cette substitution aurait violé les articles et 1147 du Code civil. Enfin, le pourvoi reproche à la cour d'appel d'avoir subordonné le prononcé de la vente à l'existence d'une faute de l'acquéreur, ce qui, d'après le demandeur, était une condition inutile puisque le pacte avait fait l'objet d'une publicité régulière antérieure à la vente contestée. [...]
[...] Après avoir montré que le caractère sévère de la sanction prononcée à l'égard du tiers était justifié par la fraude et donc que le fait que la preuve était difficile était également justifié, montrons quelle est la portée de cet arrêt en matière de valeur donnée aux avant-contrats Une valeur supérieure donnée aux pactes de préférence En effet, ce revirement donne une valeur supérieure au pacte de préférence, en sanctionnant plus fortement son inexécution. Voyons cependant à quelle condition cette valeur supérieure aux pactes de préférence est effective et montrons que cette solution risque de s'étendre aux promesses unilatérales de ventes, donc de donner également une valeur supérieure à celles-ci. Il est facile de comprendre que le pacte de préférence se trouve, par cette solution, modifié dans sa valeur, c'est-à-dire sa force contraignante. [...]
[...] Ce principe d'effet relatif des contrats est posé à l'article 1165 du Code civil, qui dispose que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes et qu'« elles ne nuisent point au tiers Dès lors que le tiers ignorait l'existence du pacte, il est impossible de le considérer complice de la violation du pacte par le promettant, et donc de prononcer une sanction qui léserait son droit, le bénéficiaire du pacte ne peut se retourner qu'à l'encontre du promettant et demander l'octroi de dommages et intérêts contractuels, en réparation de l'inexécution du pacte par le promettant. En revanche, lorsque le tiers est de mauvaise fois, l'annulation du contrat de vente conclue en violation du pacte peut être admise. [...]
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