Ainsi que l'a justement, et trivialement, remarqué M. Houtcieff, depuis l'arrêt de chambre mixte de la cour de cassation du 2 décembre 2005 : "le cautionnement réel n'est plus un cautionnement".
En l'espèce, M. X, marié sous le régime de la communauté universelle, a souscrit un nantissement de biens meubles incorporels, sans le consentement de son épouse, afin de garantir la dette d'un tiers auprès d'un créancier professionnel. Mme X a assigné le créancier en mainlevée de la sûreté. Celle-ci fut déboutée de sa demande en première instance. Elle interjette alors appel devant la Cour d'appel de Limoges le 25 juin 2003. La cour d'appel la déboute à nouveau de sa demande aux motifs que : "le nantissement constitué par un tiers pour le débiteur n'est pas un cautionnement réel soumis à l'article 1415 du Code civil".
Dans un contexte où le cautionnement réel est mis à l'épreuve des régimes matrimoniaux, la cour de cassation entreprend un changement de raisonnement sur l'épineuse question de : "la sûreté réelle consentie pour garantir la dette d'un tiers". Ainsi, le créancier ne peut se payer que sur le bien affecté à la créance. En effet, cette sûreté, consistant en la prise d'une sûreté réelle en garantie du paiement de la créance d'un tiers auprès du créancier de ce dernier, semble poser des problèmes de qualification au regard des subdivisions existantes. Est-ce une sûreté réelle, une sûreté personnelle, ou une sûreté hybride ? De telles considérations amènent à s'interroger sur les conséquences de la requalification de cette sûreté sur le régime qui lui est applicable.
[...] Or, il a juste constitué une garantie il n'est donc tenu que réellement puisque la volonté de cautionner ne se présume point (article 2015 du Code civil). - thèse partagée par Aubry et Rau : celui qui, sans se rendre personnellement caution, a constitué une hypothèque pour sûreté de la dette d'un tiers n'est pas une véritable caution - thèse partagée par les rédacteurs du projet de réforme du droit des sûretés qui énoncent en l'article 2295 : le cautionnement réel est une sûreté réelle - on pourrait admettre un cautionnement réel : par addition d'une sûreté personnelle et d'une sûreté réelle : si la personne s'engage à la fois comme caution (par un contrat de cautionnement), et consent également en contre- garantie ; une sûreté réelle (nantissement). [...]
[...] Et d'autre part, une telle sûreté n'est pas un cautionnement présumé. Cet arrêt de revirement jurisprudentiel, dont la motivation à des allures de redite s'avère remettre en cause la qualification même de cautionnement réel puisque les motifs n'en font pas mention. Cette décision sévère, rendue après de nombreuses tergiversations jurisprudentielles sur la nature d'un tel engagement, est censée poser des bases pour mettre toutes les chambres d'accord. En effet, cet arrêt de chambre mixte vient mettre fin aux divergences jurisprudentielles des chambres de la Haute juridiction. [...]
[...] Les avantages et inconvénients de cette thèse - au moment de la constitution du gage, le créancier professionnel n'aura pas à respecter un certain formalisme obligatoire en matière de cautionnement. - pendant la durée de la sûreté : le créancier n'a pas d'obligation d'information. - le créancier est cependant désavantagé quant aux chances de recouvrement de la créance car il doit supporter la perte de la valeur du bien affecté comme unique garantie de la créance. - en cas de défaillance du débiteur principal, le garant pourra faire l'objet de poursuites immédiates : Civ. [...]
[...] L'abandon douteux de la dénomination de cautionnement pour décrire le mécanisme - certains auteurs, dont M. Houtcieff, malgré la formulation maladroite de la motivation, retiennent que cette solution a le mérite d'assurer une certaine sécurité juridique dans la mesure où elle tranche une question controversée (c'est l'essentiel dans un domaine comme les sûretés - contrairement à l'énoncé des motifs de cet arrêt qui parle de : sûreté réelle consentie pour garantir la dette d'autrui les auteurs du projet de réforme sur le droit des sûretés n'ont pas rejeté la qualification de cautionnement réel en l'article 2295 du projet. [...]
[...] - montre une volonté de s'opposer à la formulation divinatoire des arrêts de 2002 Mais pas seulement. - l'effet recherché est évidemment l'éviction de l'article 1415 du Code civil qui vise expressément le cautionnement. - le cautionnement réel par sa dénomination même, pouvait prêter à confusion et renvoyer à l'article 1415 du Code civil qui emploie le terme de cautionnement (et non d'engagement personnel); d'où l'exclusion du mot cautionnement pour décrire la sûreté en cause par la cour. - ainsi, les parties (garant et créancier) sont condamnées à préciser leur pensée en inscrivant si elles le souhaitent, un engagement personnel en plus de la sûreté réelle. [...]
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