Jusqu'à une période récente, la doctrine et les chambres de la Cour de cassation avaient ouvert un large débat sur les effets de l'inobservation d'une clause contractuelle stipulant que les parties subordonnent l'introduction d'un recours contentieux à un préalable de conciliation. Ce débat a été clairement réduit à néant par un arrêt de principe du 14 février 2003 de la chambre mixte de la Cour de cassation qui statue sur la recevabilité d'une telle action soumise au juge.
Alors que l'une de la partie à la clause de conciliation stipulée dans un contrat méconnaît la procédure de conciliation et agit directement en justice, son cocontractant peut-il faire déclarer son action irrecevable sur le fondement de l'existence d'une fin de non-recevoir ? C'est par un arrêt de principe du 14 février 2003 que la chambre mixte de la Cour de cassation y répond par l'affirmative et rejette le pourvoi. Elle reconnaît très clairement l'irrecevabilité de l'action en justice et énonce qu'il "résulte des articles 122 et 124 du nouveau code de procédure civile que les fins de non-recevoir ne sont pas limitativement énumérées; que, licite, est la clause d'un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en oeuvre suspend jusqu'à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir qui s'impose au juge si les parties l'invoquent".
[...] En l'espèce la fin de non-recevoir est soulevée pour une clause de conciliation. Aussi, on pourrait tout de même considérer que lorsque le défendeur ne soulève pas le moyen tiré de l'inexécution de la clause dès le début de l'instance, il renonce à cette procédure de conciliation. Là aussi l'arrêt ne répond pas véritablement à cette interrogation laissée en suspens. Néanmoins, la qualification de ces clauses à entacher sa prescription de lourdes conséquences et conduit à s'interroger sur le fait qu'une telle efficacité conférée à ces clauses dépasse la force obligatoire des autres contrats. [...]
[...] En effet le problème qui s'est posé de savoir quelle qualification conférer aux clauses de conciliation afin de savoir quel régime leur appliquer. Or ici le débat reposait sur une qualification qui n'était pas évidente s'apparentant tantôt aux exceptions dilatoires ou aux sursis à statuer, tantôt aux fins de non-recevoir. Relativement aux exceptions dilatoires, celles-ci sont définies à l'article 108 du Code de procédure civile comme une exception de procédure par laquelle le bénéficiaire d'un délai d'attente demande au juge, pendant ce délai, de suspendre la procédure. [...]
[...] Ils ajoutent ainsi à la liste des fins de non-recevoir le cas des clauses de conciliations et déclarent cette liste non limitative. Dès lors, la reconnaissance de ces clauses comme fin de non-recevoir n'est pas dépourvue de conséquences quant au régime qui leur est applicable. Il faut d'abord préciser qu'on imaginait mal sanctionner l'inexécution de telles clauses par la condamnation au paiement de dommages-intérêts qui auraient été difficilement évaluables et beaucoup moins dissuasifs que l'irrecevabilité issue de la fin de non-recevoir. Cependant ici se pose l'interrogation de savoir quelles peuvent être les sources possibles de ces fins de non-recevoir. [...]
[...] On s'est donc interrogé sur la possibilité pour les parties, par le biais d'une clause de conciliation, de pouvoir valablement imposer une obligation de ne pas agir en justice. Le droit d'agir est défini à l'article 30 du Code de procédure civile comme "le droit, pour l'auteur d'une prétention, d'être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée". Le Code parle effectivement de "droit", néanmoins certains auteurs comme L.Cadiet soulignent qu'au regard des clauses de conciliation, il faut plutôt entendre cette liberté d'agir en justice à la lumière de son corollaire: la liberté de ne pas agir. [...]
[...] Une fin de non-recevoir peut-elle résulter d'une stipulation contractuelle, voire d'une simple volonté individuelle ? En l'espèce le défendeur semblait y répondre par la négative dans ses moyens au pourvoi. À l'inverse la chambre mixte y a répondu par l'affirmative sur le fondement des articles 122 et 124 du Code de procédure civile. Ainsi, cela ne fait plus de doute, une fin de non-recevoir peut être issue d'une stipulation contractuelle ainsi que l'énonce la chambre mixte de la Cour de cassation. [...]
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