La Cour de cassation reste fidèle à elle-même quant à sa vision de la nullité de la vente pour indétermination du prix qu'elle cantonne à quelques rares situations. Le prix peut en effet être seulement déterminable depuis plusieurs années et par un arrêt du 8 avril 2008, la chambre Commerciale affirme que le caractère global du prix de cession de titres de sociétés est indifférent à l'exigence de la détermination du prix.
En l'espèce, une société a convenu avec un vendeur, selon un protocole d'accord, d'acquérir trois sociétés contrôlées par ce dernier et les parties ont convenu également la constitution d'une société holding détenue par moitié par chacun.
L'acquéreur n'ayant pas respecté ses engagements, le cédant le met en demeure puis l'assigne en réparation du préjudice résultant de la rupture du protocole. La Cour d'Appel déclare l'acquéreur responsable de la rupture du contrat en retenant que les éléments invoqués ne sont pas de nature à remettre en cause le prix fixé par la volonté commune des parties puisque l'objet de la convention étant la cession d'un ensemble de sociétés, il forme un tout objectivement défini et que l'article 1591 du Code Civil n'exige pas de ventilation du prix ou de fixation des conséquences fiscales.
L'acquéreur forme un pourvoi en cassation en invoquant une violation par la Cour d'Appel de l'article 1591 puisque selon lui, lorsque le même vendeur vend plusieurs sociétés, le prix de chacune d'elles doit être déterminé ou déterminable dans l'acte de vente.
L'absence de ventilation du prix global de cession d'un ensemble de sociétés entre elles est-elle susceptible d'être sanctionnée pour indétermination du prix?
[...] L'inopportunité fiscale du principe : une négligence pratique dommageable La chambre commerciale rend le 8 avril 2008 une solution parfaitement fondée en droit selon le Professeur Eddy Lamazerolles puisqu'elle applique le Code Civil à la lettre et refuse de reconnaître la ventilation du prix comme un élément de validité du contrat de vente. Cependant si cette décision est juridiquement parfaite, elle n'est pas, selon la majorité de la doctrine, opportune pour autant. En effet en renonçant à l'exigence d'une ventilation du prix, la Cour de Cassation laisse les parties dans une incertitude concernant les conséquences fiscales de la cession. [...]
[...] Elle fait ici une stricte application des dispositions du Code Civil qui n'érige pas au rang de condition de la vente ou de condition de validité, la ventilation du prix. Elle note ainsi que l'article 1591 n'exige ni ventilation du revenant à chacune des sociétés, ni fixation des conséquences fiscales du prix de cession Dès lors que la chose multiple formait un tout indissociable, il paraît logique que la division de la contrepartie de cette chose ne soit pas exigée et que son unicité n'affecte pas la vente. [...]
[...] Un prix suffisamment déterminé par le prix global La jurisprudence considère, en application du Code Civil, que le prix doit être déterminé dans le contrat de vente ou déterminable à partir d'éléments objectifs précisés dans la convention. L'acquéreur, en l'espèce, fonde son pourvoi sur l'indétermination du prix et plus précisément sur l'absence de ventilation du prix de vente de la chose multiple. Cependant, la Cour de Cassation affirme que le prix est suffisamment déterminé par le prix global de cession. [...]
[...] Cette situation pourrait concerner les modalités de paiement, la réitération d'un compromis par acte notarié (3e civ décembre 1994) et donc pourquoi pas la ventilation du prix. Il revient aux juges du fond d'interpréter souverainement la volonté commune des parties sachant qu'il n'est pas permis aux juges lorsque les termes d'une convention sont clairs et précis, de dénaturer les obligations qui en résultent et de modifier les stipulations qu'elle renferme (Civ avril 1872) sinon la Cour de Cassation sanctionnera cette dénaturation. [...]
[...] Cependant, il convient de préciser qu'il n'y a qu'un seul negocium ici pour la vente de plusieurs choses. Le professeur Jacques Moury nomme cette vente de plusieurs choses, la vente d'une chose multiple qui se différencie donc de plusieurs conventions distinctes pour chacun des éléments de cette chose. Les parties n'ont en effet conclu qu'une seule convention pour cette cession. Dès lors que leur volonté était celle-ci, il paraît logique que les juges du fond considèrent qu'il s'agit de la cession d'un ensemble de sociétés formant un tout et qu'ils retiennent l'unicité de l'obligation du vendeur. [...]
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