L'arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation ce 6 février 2007, porte sur la distinction averti-non averti et le bénéfice de disproportion dans le contrat de cautionnement.
En l'occurrence, un prêt à une société de restauration avait été cautionné solidairement par son dirigeant et la concubine de celui-ci par ailleurs associée égalitaire. Le débiteur principal ayant été déclaré défaillant, le couple fut à ce titre poursuivi et condamné au paiement d'une certaine somme en garantie du remboursement de l'emprunt consenti par la banque. La concubine invoqua le manquement de la banque au devoir de conseil qui lui incombait en lui faisant conclure un contrat de cautionnement manifestement disproportionné aux ressources qui étaient alors les siennes, celle-ci ayant été condamnée au paiement mensuel d'un montant qui représentait alors près du double de son revenu. La cour d'appel fera droit à sa demande en réduisant conséquemment le montant garanti à mesure du préjudice subi par l'associée du fait de la disproportion du cautionnement souscrit par elle. Sur ce point, la Cour de cassation sera saisie d'un pourvoi par le créancier.
La caution, associé égalitaire et concubine du dirigeant social de la société pour laquelle elle s'est portée garante peut-elle être considérée comme étant « avertie » ?
[...] Cette suma divisio a le mérite, ensuite, de permettre de déboucher sur une vision plus pragmatique, casuistique, de la distinction : la qualité d'averti se distinguera ainsi par la connaissance, l'expérience, et les facultés de la caution (D.Legeais, Suretés et Garanties du crédit, 6e ed. LGDJ) là où des notions plus obscures pouvaient troubler la compréhension du droit. Il s'agissait par exemple de la notion de profane qui renvoyait généralement dans les esprits à la qualité de celui qui n'était pas professionnel (et l'on sait par exemple que le professionnel peut être un non averti). [...]
[...] C'est ainsi par exemple que, depuis, dans un arrêt rendu par la chambre mixte de la Cour de cassation en date du 29 juin 2007, le juge avait accordé le bénéfice de l'obligation de mise en garde imputable au créancier à une épouse co-emprunteuse qu'il avait considérée comme non- avertie (Cass.ch.mixte avec une critique assez vive du professeur Piedeliévre à la revue Dalloz de 2007 page 1875). Or, il faut bien garder à l'esprit le caractère fondamental de la distinction entre averti et non averti : a trop élargir la catégorie des non avertis, l'on remet en cause l'efficacité du cautionnement et la sécurité du créancier. [...]
[...] À la vérité, c'est bien d'une violation supposée ou non du devoir de mise en garde dont il s'agit. L'idée n'est sans doute pas impertinente. En admettant en effet que le cautionnement s'inscrit non seulement dans le cadre d'un contrat de cautionnement, mais aussi dans celui d'une opération de cautionnement, il n'est pas absurde d'appliquer le même fondement dans le cadre du contrat de prêt conclu entre le créancier et le débiteur principal que dans le contrat de cautionnement qui vient garantir cet emprunt. [...]
[...] Néanmoins, la notion de mise en garde a parfois pu être critiquée pour son absence relativement patente de définition concrète: elle ne s'envisagerait que dans le cadre d'une analyse relativiste. Concrètement l'obligation de mise en garde serait moins forte que l'obligation de conseil, mais plus poussée que la simple obligation d'information (notamment en ce sens le rapport de l'avocat général prés la Cour de Cassation dans ses conclusions sous l'arrêt rendu par la chambre mixte du 29 juin 2007, disponible sur le site de la Cour de Cassation). [...]
[...] L'idée serait la suivante : constatant que les récents arrêts de la Cour de Cassation mettent très clairement en avant cette suma divisio, le juge envisagerait d'apprécier l'exigence légale de la proportionnalité à l'aune de cette distinction. C'est très clairement le cas de l'arrêt commenté qui affirme que s'agissant d'une caution non avertie[les juges du fond] n'avait pas à procéder à la recherche prétendument omise [c'est à dire de rechercher si la banque n'avaient pas des informations sur les revenus, le patrimoine de la caution ou sur les chances de succès de l'opération cautionné des informations que celle-ci aurait ignorer] Ce soucis serait d'autant plus acté par deux arrêts plus récents rendus le 13 février 2007 (Cass.com 13 février 2007). [...]
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