Selon l'espèce, la société Film number one et son associée la CIPA ont conclu un contrat d'exécution de travaux avec la société Madrid Film. Cependant, la dette des deux codébitrices reste impayée. Ainsi, la société Madrid film assigne les deux codébitrices en règlement de la dette. Au cours de l'instance, un accord transactionnel est conclu entre la société Madrid film et la société Film number one. Cependant, la créancière continue sa procédure à l'encontre de la CIPA.
Le problème posé aux juges de la haute juridiction peut être formulé comme suit : le codébiteur solidaire extérieur à la mise en place du protocole transactionnel peut-il se prévaloir de l'effet extinctif de la transaction, et par là même faire avorter la procédure lancée à son encontre par le créancier commun ?
[...] On voit alors poindre à l'horizon deux principes : les dispositions de l'article 1165 du Code civil et le principe de l'opposabilité du contrat. Effectivement, lorsque deux personnes concluent un contrat, elles ne sont pas enfermées dans une bulle stérile qui empêche les effets de la convention de se propager à l'extérieur : ainsi, le contrat est aux yeux du tiers un fait juridique qui va influer plus ou moins fortement sur son environnement. De par ce fait, il doit pouvoir opposer aux cocontractants l'existence de ces conséquences. [...]
[...] Une excentricité néanmoins justifiée Avec une décision qui apparait comme parfois quasi caricaturale, les juges ont certainement voulu lancer un appel, ou presque une menace au législateur en montrant en quelque sorte que si les choses concernant la transaction ne bougent pas, il serait contraint de continuer à appliquer des décisions fragiles mais justifiées. Avec cette décision, les juges frappent donc un grand coup On a affaire ici à une vraie décision de provocation, dans laquelle les juges ont en premier lieu posé la solution à laquelle ils voulaient arriver, et ont ensuite remonté leur raisonnement en fonction de l'état du droit applicable. [...]
[...] Effectivement, dans la solution offerte par les juges au problème posé, la formation commerciale de la Cour de cassation entérine la capacité pour le codébiteur solidaire d'invoquer à son profit la transaction signée entre le créancier commun et l'autre coobligé. Cette reconnaissance provient de l'existence d'un lien de solidarité passive liant les deux codébiteurs. Il convient ici de noter une chose sans laquelle l'arrêt n'aurait aucun sens car il perdrait son fondement, ce ciment qui fait tenir le syllogisme de la Cour de cassation en place est la solidarité passive vue au travers de la société créée de fait. [...]
[...] La thèse de la représentation des coobligés par mandat a en effet subi de cinglantes critiques de la part de la doctrine. Les auteurs la qualifient sans prendre de gants de fable ou encore de fiction. C'est l'évidence même, ce serait s'autodétruire que de chercher à aggraver sa propre situation, c'est en cela que ce postulat relève de la fiction : les juges ont cherché à tout prix un mécanisme permettant de distendre l'effet de la transaction, et ils ont trouvé un mécanisme qui était un mécanisme bancal. [...]
[...] Il faut également lire les lettres qui ne sont pas écrites : ainsi, si la transaction nuit au codébiteur signataire, le tiers ne PEUT PAS s'en prévaloir. Le protocole transactionnel, une convention forcément avantageuse. En observant le raisonnement des juges de la Cour, il devient légitime de se demander si les juges n'ont pas la conviction que la transaction est forcément avantageuse. Une telle conviction parait en effet difficile à argumenter car par définition la transaction va de pair avec concession. La transaction comporte en effet des concessions réciproques faites par chacune des parties, on ne peut pas dire qu'elle soit forcément avantageuse. [...]
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