En vertu de l'article 1202 du Code Civil, la solidarité conventionnelle « ne se présume point, il faut qu'elle soit expressément stipulée ». Dans son arrêt rendu le 21 avril 1980, la chambre commerciale de la cour de cassation réaffirme le principe selon lequel, par le jeu d'une coutume contra legem, cette exigence n'existe pas en matière commerciale.
En l'espèce, une société avait rédigé à l'adresse d'une autre société un ordre de commande pour divers vêtements, ordre confirmé et transmis par une troisième société qui avait convenu que le paiement serait effectué par ses soins. La commande ayant été livrée et l'intégralité du prix non payée, la première société a assigné les deux autres en recouvrement de la dette. La cour d'appel a condamné solidairement les deux sociétés au paiement du solde du prix.
La troisième société forme un pourvoi en cassation arguant qu'en vertu de l'article 1202 du Code Civil, la solidarité entre débiteurs ne se présume point, elle doit être expressément stipulée ou avoir lieu en vertu d'une disposition de la loi, or en l'espèce aucune de ces conditions n'est remplie.
La question qui se pose à la cour de cassation est alors de savoir si l'obligation tenant plusieurs débiteurs en vertu d'un contrat peut engendrer entre eux une solidarité au remboursement de la dette, sans que celle-ci n'ait été expressément stipulée.
[...] L'article 1202 de l'avant-projet de réforme consacre expressément cette source de solidarité. Par son arrêt du 21 avril 1980, la chambre commerciale de la Cour de cassation est donc venue confirmer la coutume contra legem, largement admise par la jurisprudence, selon laquelle les dispositions de l'article 1202 du Code civil ne s'appliquent pas en matière commerciale. La solidarité est donc présumée et n'est écartée que par une stipulation expresse. Cette particularité s'explique par les garanties dont a besoin le domaine des affaires. [...]
[...] Or en matière commerciale, tel n'est pas le cas, la jurisprudence juge que la solidarité doit être présumée. Dans son arrêt du 21 avril 1980, la chambre commerciale de la Cour de cassation, en excluant l'application de l'article 1202 du Code civil en matière commerciale, ne fait que confirmer ce qu'une coutume contra legem avait déjà décidé en la matière. En effet, si en matière de dette civile, l'article 1202 du Code civil exige que la solidarité ait été expressément convenue entre les débiteurs, par une coutume contra legem, les dispositions de cet article sont écartées en matière de dette commerciale. [...]
[...] Loin d'être isolé, l'arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 21 avril 1980 s'inscrit dans une lignée jurisprudentielle excluant l'application des dispositions de l'article 1202 du Code civil en matière commerciale. Un arrêt qui s'inscrit dans une lignée jurisprudentielle de présomption de solidarité de la dette commerciale La présomption de solidarité en matière commerciale a été admise pour la première fois dans un arrêt du 20 octobre 1920 par la chambre des requêtes. Un arrêt de la chambre civile du 18 juin 1929 apparaît comme une application et une consolidation de la règle précédemment établie. [...]
[...] Par une jurisprudence constante, dans laquelle s'inscrit directement l'arrêt de la chambre commerciale du 21 avril 1980, la Cour de cassation écarte l'application de l'article 1202 en matière commerciale, jugeant que dans ce cas la solidarité doit être présumée en vertu des usages. La règle est alors inversée: la solidarité entre les débiteurs en matière commerciale aura lieu de plein droit, à moins qu'une disposition expresse ne l'ait exclue. Il semble intéressant de s'interroger sur l'exclusion de l'article 1202 du Code civil qu'opère la Cour de cassation en matière de dette commerciale, faisant ainsi application d'une coutume contra legem, largement intégrée par la jurisprudence, et dont l'objectif est de fournir des garanties nécessaires dans ce domaine. [...]
[...] Une solidarité fondée sur l'idée de promesse Dans son arrêt du 21 avril 1980, la chambre commerciale de la cour de cassation semble fonder sa décision sur le fait que la société avait personnellement promis le paiement du prix des fournitures commandées. Cette promesse aurait donc valu pour engagement solennel et suffirait à elle seule à justifier que la société soit solidairement responsable. Cette prise en compte particulière de la notion de promesse peut s'expliquer par la spécificité de la dette commerciale. [...]
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