Par un arrêt en date du 13 juin 2006, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a eu, une nouvelle fois, l'occasion de se prononcer sur les clauses limitatives de responsabilité inscrites par le débiteur dans les contrats de transport de colis pour fixer le plafond des indemnisations dues en cas d'inexécution de ses obligations.
En l'espèce, une entreprise avait confié à une société de transport express de colis, Chronopost, l'acheminement d'un pli contenant une soumission pour un marché d'équipement matériel de rafraîchissement. Ce pli portait une mention explicite fixant le délai de livraison, « livraison impérative avant vendredi midi », il devait dès lors parvenir à destination avant le lendemain midi à seulement 25 kms du lieu d'expédition. Or, ce délai n'ayant pas été respecté par le transporteur, l'entreprise cocontractante, dont l'offre n'a pas pu être examinée, a assigné la société Chronopost en réparation de son préjudice.
Dans cette affaire, il s'agit pour la Chambre commerciale de la Cour de cassation de déterminer si la négligence commise par le transporteur étant à l'origine d'un manquement à une obligation contractuelle de sa part constitue, ou non, une faute objective suffisamment lourde pour venir faire échec à la clause limitative de responsabilité incorporée dans le contrat type messagerie ?
[...] Cette solution a été confirmée par la Chambre commerciale dans une décision du 30 mai 2006, il s'agissait cette fois de montres perdues par le transporteur. Mais elle a également, dans une décision du 13 février 2007, étendu l'analyse du manquement à l'obligation essentielle en dehors du contrat de transport montrant ainsi que cette jurisprudence a une portée générale. Néanmoins cette théorie de la cause ne peut pas toujours être appliquée, elle ne peut notamment pas être utilisée lorsque la clause limitative de responsabilité est d'origine réglementaire parce qu'elle résulte d'un contrat type. [...]
[...] Ces clauses ne sont valables tant qu'elles ne figurent pas dans un contrat conclu entre un professionnel et non professionnel ou consommateur. En effet, dans ces hypothèses ces clauses peuvent tomber sous le coup de la législation luttant contre les clauses abusives et ainsi être réputées non écrites au sens de l'article L132-1 du Code de la consommation, soit qu'elles figurent dans la liste noire de clauses abusives présumant irréfragable le caractère abusif de certaines clauses, soit qu'il ne s'agisse que de clauses susceptibles d'être déclarées abusives par le juge. [...]
[...] C'est grâce à cette qualification de faute lourde que les juges du fond ont pu neutraliser l'existence de la clause limitative de responsabilité insérée dans le contrat type messagerie qui avait pour but de fixer le plafond des indemnisations dues en cas d'inexécution de ses obligations. Ils ont ici privilégié une conception objective de la faute lourde en confirmant que cette dernière était constituée par le seul manquement à une obligation contractuelle, en l'espèce, le seul retard de livraison. Contre cet arrêt la société de transport express de colis, Chronopost, décide alors de former un pourvoi en cassation. [...]
[...] Et en qualifiant cette négligence de faute lourde ils font tomber la clause limitative de responsabilité ce qui leur permet dès lors de condamner Chronopost au paiement complémentaire de la somme de 6000 euros en titre de réparation des préjudices causés à son client. Si une telle définition de la faute lourde est valable, autrement dit, si le simple fait du retard et donc du manquement à une obligation essentielle constitue une telle faute ainsi, de façon détournée, ce serait encore les notions de cause et d'obligation essentielle qui permettraient de paralyser la clause limitative de responsabilité, non plus sur le fondement de l'article 1131 du Code civil, mais sur celui de la faute lourde. [...]
[...] Cet arrêt du 13 juin 2006 pose la question de savoir quelle conception de la faute lourde doit être retenue pour pouvoir faire échec à une clause limitative de responsabilité. C'est la Chambre mixte qui, par l'intermédiaire de son arrêt du 22 avril 2005, a apporté une réponse à ce conflit entre les jurisprudences de la Première Chambre civile et celle de la Chambre commerciale B. Une conception restrictive de la faute lourde distinguée du manquement à l'obligation essentielle Le 22 avril 2005 la Chambre mixte s'est prononcée, dans le contexte d'un contrat type applicable à l'espèce. [...]
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