Une société (Darquier) ayant été déclarée en redressement judiciaire en 1991, l'extension de son redressement judiciaire avait été prononcée par un arrêt du 13 mai 1992 à l'encontre d'une autre société (CEMA) du même groupe, aboutissant à une procédure unique réunissant tous les actifs et tous les passifs. Une autre société (Lapidor) n'ayant pas réglé sa dette à l'égard de la CEMA mais n'ayant pas été elle-même payée des livraisons faites à la société Darquier, est assignée en paiement. La société Lapidor invoqua la compensation avec la créance qu'elle détenait sur la société Darquier et qu'elle avait déclarée au passif du redressement judiciaire de cette dernière.
Dans quelles conditions la compensation connexe peut-elle opérer en cas de procédure collective, entre des créances et des dettes nées d'une pluralité de conventions ?
[...] Cela dit, à y regarder de prêt, une sensation de flou s'empare de la notion lorsque l'on se penche sur son origine étymologique. Connexe vient du latin «connectere qui signifie lier ensemble Une marge d'appréciation quant à la teneur de ce lien existe donc. Quelle intensité doit avoir ce lien pour que la qualification de connexité soit retenue ? Celle-ci peut-elle caractériser des obligations ne découlant pas d'un même contrat ? La Cour de cassation a répondu affirmativement, la largeur de la notion le permettant. [...]
[...] Cette jurisprudence, initiée par un arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 21 février 1984, est aujourd'hui établie. Elle a d'ailleurs été entérinée par une loi du 25 janvier 1985, modifiée par la loi du 10 juin 1994. Elle existait déjà antérieurement en matière de saisie- arrêt (Civ. 1re octobre 1972). Elle est somme toute assez logique, évitant au créancier-débiteur du failli de payer sa dette en monnaie tandis qu'il ne serait lui- même payé plus tard qu'en monnaie de dividende (Pédamon et Carmet, La compensation dans les procédures collectives de règlement du passif Une solution s'inscrivant dans une tendance générale faisant apparaître la connexité comme un moyen original de recourir à la compensation. [...]
[...] La réciprocité peut donc être retenue en dehors de relations strictement bilatérales, élargissant corrélativement le champ de la compensation La connexité : une notion permettant de procéder à une compensation après l'ouverture d'une procédure collective Cette solution déjà bien établie témoigne d'un phénomène général faisant apparaître la connexité comme un moyen joker (Marty, Raynaud et Jestaz, Les obligations, t. de recourir à la compensation Une solution déjà bien établie. En principe, la compensation ne peut s'opérer si les conditions en sont réunies après le jugement d'ouverture car, équivalent à un paiement privilégié au profit du créancier, qui est en même temps débiteur du failli la compensation heurterait le principe de l'égalité des créanciers. [...]
[...] Une autre société (Lapidor) n'ayant pas réglé sa dette à l'égard de la CEMA mais n'ayant pas été elle-même payée des livraisons faites à la société Darquier, la société Lapidor assignée en paiement invoqua la compensation avec la créance qu'elle détenait sur la société Darquier et qu'elle avait déclaré au passif du redressement judiciaire de cette dernière. Le tribunal de première instance puis la cour d'appel rejetèrent cette prétention au motif que les dettes n'étaient ni réciproques, ni connexes. Le 9 mai 1995, la chambre commerciale de la Cour de cassation casse l'arrêt. [...]
[...] C'est d'ailleurs ainsi que la Cour de cassation elle-même justifie sa célèbre ouverture du domaine de la compensation pour dettes connexes du 18 avril 1967 (les conditions de liquidité et d'exigibilité étant abandonnées). Il paraît injuste qu'un créancier qui détient une chose appartenant à un débiteur la restitue avant d'être payé lorsque cette chose a un rapport avec la créance. Il en va de même de la partie qui paie sa propre dette pour subir ensuite les conséquences de l'insolvabilité de son partenaire alors que les créances étaient liées. [...]
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