L'équilibre dans les relations contractuelles étant de plus en plus recherché, un principe de proportionnalité tend à s'imposer au sein du contrat de cautionnement corrélativement à l'obligation de mise en garde des établissements de crédit. Le créancier ne doit donc pas faire souscrire de cautionnement excessif, sous peine d'engager sa responsabilité à l'égard de la caution. De même, il semblerait que cette solution très avantageuse à l'égard de la caution s'accompagne depuis quelque temps déjà d'une restriction de la notion de caution avertie au profit du débiteur.
L'importance de cet arrêt de la chambre commerciale en date du 6 février 2007 est considérable, et pour en apprécier la portée, il faut en indiquer les circonstances de fait.
En l'espèce, la banque Crédit Mutuel de l'Ouest (le prêteur) a consenti un prêt de 360.000 francs à la société Le Capital (l'emprunteur) qui exploitait un petit restaurant, à l'initiative du gérant et de sa compagne qui se portent tout deux cautions solidaires. Le prêt est remboursable en 84 mensualités de 6.266 francs. Le 29 janvier 1992, la société est placée en liquidation judiciaire, les emprunteurs sont alors condamnés solidairement à payer la créance de la banque fixée à 348 855,88 francs. La coassociée emprunteur assigne alors l'organisme de crédit en réparation de ce préjudice au motif que ce dernier aurait manqué au devoir de conseil qui lui incombait dans le cadre de sa mission en faisant souscrire à cette dernière un cautionnement manifestement disproportionné. La juridiction du premier degré déboute alors la coassociée de ses demandes.
[...] Cette solution confirmée par la cour de cassation ne fut rendue possible que par une redéfinition de la notion de caution avertie qui réduit tout simplement son application à celui du seul dirigeant de la société. II) Une conception plus restrictive de la notion de cause avertie En l'espèce, l'arrêt entend élargir la notion de caution profane cette solution rendue par la cour de cassation apparaît comme étant très sévère à l'égard des organismes de crédit Une conception formelle de la caution avertie La protection de la caution varie suivant qu'elle est profane ou avertie La caution profane bénéficie d'une plus grande sollicitude des juges, qui admettent plus aisément, tantôt l'existence d'un vice du consentement, tantôt la mise en œuvre de la responsabilité du créancier. [...]
[...] Ensuite, l'autre intérêt de cet arrêt est qu'il met en œuvre le mécanisme prévu par l'article L.341-4 du Code de la consommation (issu de la loi du 1er août 2003) qui dispose, je cite, que : le créancier professionnel ne peut pas se prévaloir du cautionnement manifestement disproportionné conclu au profit d'une entreprise par une personne physique. Ce qui pose en l'espèce une difficulté de cohérence juridique. L'arrêt en question applique en effet ce texte à des hypothèses autres que celles qu'il prévoit dans une extension par analogie. Ainsi, on constate que l'application dans le temps du mécanisme de l'article L.341-4 s'en trouve en l'espèce perturbée. [...]
[...] Cette solution témoigne donc indiscutablement d'un assouplissement de la jurisprudence à l'endroit des cautions. Cette solution peut paraître tout de même excessive. Elle fragilise la garantie de manière d'autant plus importante que la caution-personne physique contractant avec un créancier professionnel disposait déjà auparavant d'une protection forte. Cet arrêt restreint donc considérablement la possibilité pour les créanciers d'obtenir leur créance. [...]
[...] Enfin, on peut noter que cet arrêt fait supporter à la Banque la charge de la preuve que son client professionnel est bien un emprunteur averti et non pas profane Une telle solution est surprenante tant elle est contraire à la nature des relations entrepreneuriales, c'est-à-dire à la liberté même du commerce et de l'industrie. L'exercice de la liberté d'entreprendre a pour contrepartie la connaissance des responsabilités qu'elle implique. Ainsi, l'arrêt du 6 février 2007 compromet fortement l'accès qu'on peut qualifier de banalisé au crédit bancaire par les différentes entreprises et sociétés. Les banques seront désormais bien moins disposées à prêter des fonds sachant qu'un client professionnel peut se comporter en caution profane dès lors que son endettement devient trop important au regard de ses revenus. [...]
[...] Cette obligation du devoir de mise en garde du banquier vient compléter l'exigence de proportionnalité de l'engagement de la caution. Le lien établi entre mise en garde et disproportion s'imposait au regard des fondements juridiques communs, à savoir la mise en œuvre de la responsabilité civile du créancier au bénéfice des cautions, et ce, au nom d'une certaine cohérence de la matière. L'application du principe de proportionnalité comme sanction au manquement du devoir de mise en garde du banquier L'obligation de contracter de bonne foi et l'exigence de proportionnalité sont des conditions essentielles du contrat de cautionnement. [...]
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