Cour de Cassation, 1re chambre civile, 5 février 2014 - La charge de la preuve d'une dégradation subie par une chose faisant l'objet d'un contrat de dépôt pèse-t-elle sur le déposant ou le dépositaire ?

Extraits

[...] À ce propos, la Cour de cassation sera amenée à répondre au problème de droit suivant : la charge de la preuve d'une dégradation subie par une chose faisant l'objet d'un contrat de dépôt pèse-t-elle sur le déposant ou le dépositaire ? Dans sa décision, la haute juridiction civile casse et annule la décision de la juridiction de proximité en statuant « qu'il incombait à la société Garage AF ABDR d'apporter la preuve que les moisissures ou l'excès d'humidité qui en était la cause n'existaient pas le 12 janvier 2012, date de restitution du véhicule, ou, à défaut, celle des soins qu'elle avait apportés pour éviter ce type de désordres pendant les trois mois où le véhicule lui avait été confié, la juridiction de proximité a violé les textes susvisés ». [...]

[...] Cela ne veut pas dire que la responsabilité du dépositaire ne pourrait être engagée que dans le cas où le déposant prouvait sa faute ; cette dernière est quasiment impossible. En outre, la faute du dépositaire garagiste est dès lors présumée. Comment caractériser cette présomption de faute en pratique ? Ce qui se passe c'est que l'appréciation de la faute du dépositaire se fera in abstracto, c'est-à-dire très rigoureusement et par référence au standard objectif d'une personne raisonnable, normalement diligente. [...]

[...] La Cour de cassation qualifie le garagiste de dépositaire et ce n'est pas anodin c'est en effet un exemple d'une jurisprudence constante qui ne fait qu'ancrer ce principe d'avantage. Le dépositaire est qualifié de « détenteur précaire ». Ce dernier est chargé de restituer la chose qui lui a été confiée en « nature » principe posé de façon générale par l'article 1352 du Code civil « la restitution d'une chose autre que d'une somme d'argent a lieu en nature [ . [...]

[...] Cour de Cassation, 1re chambre civile février 2014 - La charge de la preuve d'une dégradation subie par une chose faisant l'objet d'un contrat de dépôt pèse-t-elle sur le déposant ou le dépositaire ? Dans toutes sortes de situations imaginées par les citoyens, et afin de répondre à leurs besoins spécifiques notamment dans le monde des affaires, nous trouvons une application courante du régime général du dépôt. Nous nous contenterons dans notre étude d'envisager une seule application du régime de droit commun du contrat de dépôt dit « volontaire » assez importante en pratique qui donna lieu à une abondante jurisprudence, à savoir le contrat de garage à la lumière duquel vient se placer l'arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 5 février 2014. [...]

[...] Un troisième volet est celui de la force majeure d'après l'article 1929 du Code civil qui dispose que « le dépositaire n'est tenu, en aucun cas, des accidents de force majeure, à moins qu'il n'ait été mis en demeure de restituer la chose déposée ». Il lui suffira de rapporter la preuve que la détérioration est le fruit de la survenance d'un évènement extérieur aux parties, imprévisible et irrésistible ; la force majeure. Cependant, le terrain de la force majeure reste un terrain pragmatique en jurisprudence vu que son appréciation peut soulever plusieurs difficultés dans certains cas. [...]