Par un arrêt du 17 mai 2002, la Cour de cassation réunie en assemblée Plénière a estimé que la soumission conventionnelle au statut des baux commerciaux aurait des conséquences très lourdes sur le contrat en cela qu'il est désormais impossible d'en écarter conventionnellement les dispositions impératives.
En effet, à l'occasion de la constitution d'une résidence hôtelière, la société Ribourel a vendu à différents acquéreurs des appartements. Les acheteurs ont alors consenti à un bail pour une durée de 10 ans à une société exploitante, elle-même reprise plus tard par la société venderesse (la société Ribourel). Alors que le bail était expressément soumis au statut des baux commerciaux du fait d'une référence au décret du 30 septembre 1953, une clause stipulait que les modalités du congé seraient simplifiées et qu'ainsi, il n'était pas nécessaire que celui-ci soit donné par acte extrajudiciaire, comme le prévoit normalement l'article L.145-9 du code de commerce.
Un an avant la date d'expiration des baux, la société Ribourel informe par le biais d'une simple lettre recommandée avec accusé de réception les différents bailleurs qu'elle souhaite ne pas les renouveler. Un bailleur conteste alors la régularité de ce non-renouvellement et assigne le locataire en réparation de son préjudice du fait de l'inexécution du bail.
L'on se demande alors si les parties ayant expressément stipulé la soumission plénière de leur convention locative au statut du bail commercial peuvent valablement prévoir d'écarter l'application des dispositions relatives à la forme du congé, c'est-à-dire une disposition impérative de ce statut.
[...] Même chose lorsque le bailleur a fait inscrire une clause relative à la révision triennale du loyer : le locataire n'a pas vocation à se prévaloir de l'application du statut des baux commerciaux dans son entier (cass, 3e civ février 1998). A première vue, la décision de la Cour de cassation rentre en conflit direct avec une décision antérieure en date du 7 novembre 2001. La 3e chambre civile était face à un conflit entre l'application par nature du régime du bail professionnel et le statut des baux commerciaux, dont les parties avaient voulu conventionnellement se prévaloir. [...]
[...] Cependant, la contradiction n'est qu'apparente, puisque dans l'affaire la plus ancienne, la soumission conventionnelle au statut des baux commerciaux n'était que partielle. Il était donc tout à fait possible pour les parties de déroger contractuellement aux dispositions impératives du statut choisi. La présente convention locative, soumise au statut défini par le décret nº53-960 du 30 septembre 1953 et les lois et décrets qui l'ont modifié ou le modifieront témoignait également de l'existence d'une clause par laquelle l'une des parties pouvait faire connaître à l'autre, par simple lettre recommandée, qu'elle s'opposait à la reconduction du contrat et donnait ainsi congé au locataire. [...]
[...] La Cour de cassation impose également que la soumission conventionnelle à un statut soit suffisamment claire et explicite. Il appartient alors aux juges du fond d'apprécier souverainement l'intention des parties (Cass, 3e civ., 1er mars 1995). Cette liberté d'appréciation laissée aux juges du fond est appréciable en cela qu'elle permet d'éviter les risques d'équivoque ou d'erreur de qualification, notamment en cas d'existence d'une clause peu claire dans le contrat. En l'espèce, la convention locative faisait expressément référence au décret du 30 septembre 1953, il ne semblait donc pas y avoir de difficulté quant à la volonté des parties de se soumettre à ce statut. [...]
[...] Depuis la loi LME du 4 juillet 2008, le législateur est venu confirmer cette jurisprudence en mentionnant l'impossibilité de déroger aux dispositions impératives du statut en cas d'application intégrale. Pour terminer, l'on notera tout de même que cette décision est venue sanctionner un locataire, qui pour une fois apparaissait clairement comme la partie forte au contrat. En effet, les bailleurs étaient de simples personnes physiques qui louaient leur local à une société. Les juges de la Haute Cour ont peut-être cherché à protéger leurs intérêts contre ceux du locataire qui avait probablement profité de sa situation lors de la conclusion du bail. [...]
[...] 145-4 du Code de commerce concernant la durée minimale du bail, ou encore de l'article L. 145-40 qui dispose que les loyers sont payés d'avance par le locataire. Une telle décision de l'assemblée Plénière ainsi saisie ne laisse planer aucun doute quant à son issue, car l'article L.131-4 du Code de l'organisation judiciaire impose à la juridiction de renvoi de se conformer à sa décision. Une source artificielle de complexification dans la rédaction des baux Cette solution vient consacrer implicitement les distinctions développées supra concernant la soumission partielle ou plénière au statut des baux commerciaux. [...]
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