La théorie de l'opposabilité du contrat permet au contrat d'être opposable aux tiers mais aussi d'être opposé par les tiers aux contractants. Cela implique notamment des conséquences quant au régime de responsabilité applicable en cas de manquement à une obligation contractuelle comme l'illustre l'arrêt à commenter de l'Assemblée plénière de la Cour de cassation du 6 octobre 2006.
En l'espèce, les consorts X ont donné à bail un immeuble commercial à la société Myr'Ho qui a confié la gérance de son fonds de commerce à la société Boot Shop. Les bailleurs n'ont pas entretenu les locaux et la locataire-gérante, qui souhaite la remise en état des lieux ainsi qu'une indemnisation pour le préjudice d'exploitation subi, les a assignés en référé. La Cour d'appel de Paris accueilli cette demande le 19 janvier 2005 car le défaut d'entretien rendait l'utilisation normale des locaux impossible et causait donc un dommage au demandeur. Les bailleurs se pourvoient en cassation. Pour eux, un tiers ne peut agir sur le terrain délictuel contre un contractant qu'en prouvant que l'inexécution contractuelle constitue une faute délictuelle.
Mais le tiers à un contrat peut-il invoquer la faute contractuelle d'une partie qui lui a causé un dommage pour obtenir réparation sur le fondement de la responsabilité délictuelle ?
Cette question a de nombreuses incidences en pratique dans les situations où un tiers est amené à mettre en jeu une inexécution contractuelle. Tel est le cas par exemple des victimes par ricochet d'une victime d'un accident de transport, ou des parties en présence dans une chaîne de contrats.
Cela a d'ailleurs suscité une opposition entre la première chambre civile et la chambre commerciale de la Cour de cassation. La première était favorable à l'assimilation de la faute contractuelle à la faute délictuelle, alors que la seconde exigeait la preuve d'une faute délictuelle.
L'Assemblée plénière a mis fin à cette divergence en consacrant la position de la première chambre civile dans l'arrêt du 6 octobre 2006. Elle a en effet estimé, en rejetant le pourvoi, que « le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ».
Ainsi, il convient de voir tout d'abord l'assimilation de la faute contractuelle à la faute délictuelle (I), puis le régime de responsabilité du contractant envers les tiers victimes d'un manquement contractuel (II).
[...] Cela rendait impossible leur utilisation normale par la locataire-gérante, lui causant de ce fait un dommage. L'Assemblée plénière a donc conclu à la responsabilité délictuelle des bailleurs envers la société Boot Shop en se fondant sur l'inexécution contractuelle qui lui causait un dommage. Pour une faute contractuelle, causant un dommage à un tiers, répond ainsi désormais le régime de la responsabilité délictuelle. Cette assimilation de la faute contractuelle à la faute délictuelle a plusieurs incidences. D'abord, elle pose une exception au principe de l'effet relatif du contrat de l'article 1965 du Code civil qui n'est donc pas visé en l'espèce. [...]
[...] L'Assemblée plénière a mis fin à cette divergence en consacrant la position de la première chambre civile dans l'arrêt du 6 octobre 2006. Elle a en effet estimé, en rejetant le pourvoi, que le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage Ainsi, il convient de voir tout d'abord l'assimilation de la faute contractuelle à la faute délictuelle puis le régime de responsabilité du contractant envers les tierces victimes d'un manquement contractuel (II). [...]
[...] L'Assemblée plénière admet que la faute contractuelle puisse être le fondement d'une responsabilité délictuelle. En effet, la locataire gérante est un tiers au contrat conclu entre la société Myr'Ho et les bailleurs. Elle ne peut donc pas engager la responsabilité contractuelle de ces derniers, mais uniquement leur responsabilité délictuelle. Le manquement contractuel suffisait, aucune autre faute ne devait être prouvée, pas même une faute délictuelle. Le régime de la responsabilité délictuelle peut donc être appliqué à l'auteur d'une faute contractuelle. [...]
[...] Assemblée Plénière octobre 2006 La théorie de l'opposabilité du contrat permet au contrat d'être opposable aux tiers mais aussi d'être opposé par les tiers aux contractants. Cela implique notamment des conséquences quant au régime de responsabilité applicable en cas de manquement à une obligation contractuelle comme l'illustre l'arrêt à commenter de l'Assemblée plénière de la Cour de cassation du 6 octobre 2006. En l'espèce, les consorts X ont donné à bail un immeuble commercial à la société Myr'Ho qui a confié la gérance de son fonds de commerce à la société Boot Shop. [...]
[...] En effet, l'opposabilité du contrat permet à ce tiers de l'opposer aux parties elles-mêmes. Mais le raisonnement de l'Assemblée plénière n'a pas été mené jusqu'à son terme. En effet, l'opposabilité permet aussi, en principe, d'être opposable aux tiers. Ainsi, si l'on accepte que ce tiers puisse s'en prévaloir envers les parties, les parties devraient pouvoir se défendre en l'invoquant à leur tour. Le débiteur devrait donc avoir la faculté d'opposer à ce tiers les clauses du contrat, et plus particulièrement les clauses limitatives ou exonératoires de responsabilité. [...]
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