Lorsque le législateur prévoit des formalités strictes, il arrive que la jurisprudence accepte de les assouplir au vu des objectifs poursuivis par le législateur et de la pratique. Cependant dans certains cas, les enjeux protecteurs sont trop importants pour que la jurisprudence supprime toutes les conditions et c'est ce que nous démontre l'arrêt de principe d'Assemblée Plénière du 14 février 1975 appelé arrêt Galouyé.
Adrien Libeccio est le locataire d'un immeuble à usage industriel et commercial appartenant à Dame Barbier épouse Galouyé via un contrat qui prévoit une possible cession du bail sans le consentement de la propriétaire. Libeccio, cédant, a cédé le droit de bail à la société imprimerie et éditions Libeccio dite Edil, ensuite absorbée par la SA imprimerie Rullière devenue la société imprimerie Rullière-Libeccio. La cessionnaire, la société imprimerie Rullière-Libeccio, n'a accompli aucune des formalités exigées par l'article 1690Cc et Dame Barbier épouse Galouyé, débiteur cédé, assigne cette société et Libeccio pour qu'il soit déclaré que ni l'un ni l'autre n'avait droit au renouvellement du bail ou à la réception d'une indemnité d'éviction.
À quelles conditions les formalités de l'article 1690 du Cc peuvent elles s'avérer inutiles pour qu'une cession de droit de bail soit opposable au propriétaire, débiteur cédé ?
[...] L'article 1690 du Code civil pose les deux formalités pour lesquelles le cessionnaire peut opter afin de rendre la cession opposable au débiteur cédé et aux tiers en général. Le cessionnaire peut donc choisir entre la signification par acte d'huissier ou l'acceptation par acte authentique du débiteur cédé. Par le biais de la signification, le cessionnaire va informer le propriétaire et ainsi celui-ci sera en mesure, s'il le souhaite de s'opposer à la cession en connaissance de cause. Par le biais de l'acceptation par acte authentique, le débiteur cédé prend également connaissance de la cession et atteste qu'il ne s'y oppose pas. [...]
[...] Ici, même si cette jurisprudence semble permettre l'opposabilité de la cession du droit de bail à des conditions moins strictes, elle exige toujours dans le fond, les mêmes conditions et défend toujours les mêmes objectifs. Comme nous l'avons dit précédemment, finalement il faut tout de même que le cédé connaisse et accepte la cession et la seule modification tient au fait que désormais la jurisprudence acceptera que d'autres comportements que la notification ou la signification permettent d'aboutir à la même opposabilité. [...]
[...] La volonté du législateur de protéger le débiteur cédé via des formalités de publicité sur laquelle se fonde la Cour de cassation L'arrêt de principe d'assemblée plénière du 14 févier 1975 affirme la protection du propriétaire, débiteur cédé d'une cession de créances du droit de bail, en se fondant sur l'importance de la publicité prévue par le législateur dans l'article 1690 du Code civil. Pour expliquer cette décision, nous allons étudier dans une première sous partie les enjeux de la cession du droit de bail et de l'opposabilité de la cession, puis dans une seconde sous partie, la protection adressée en premier lieu au débiteur, conférée par le législateur à travers l'article 1690 du Code civil. [...]
[...] Si on réunit une seule de ces deux conditions, la protection du débiteur cédé n'est pas assurée dans la même mesure que ce qu'a voulu le législateur. Il y a là une différence de degré. La connaissance se rapporte à savoir que quelque chose existe ou a changé alors que acceptation se rapporte à l'accord de volonté, au consentement, à l'acquiescement, cela sous-entend qu'on est d'accord, que l'on approuve, que l'on valide alors que par la connaissance on n'a pas du tout cette démarche, savoir quelque chose ne signifie pas qu'on l'accepte. [...]
[...] Or dans le cas de la cession du droit de bail, les conséquences vont plus loin qu'un simple changement de créancier. En effet, nous l'avons souligné ci-dessus, dans le cadre de ce contrat synallagmatique, le cessionnaire, nouveau créancier devient également le nouveau débiteur du propriétaire cédé et il est possible que le propriétaire n'a pas intérêt à ce changement, dans l'hypothèse où le nouveau locataire ne serait pas en mesure d'honorer les loyers par exemple. Dans le but de protéger ce débiteur cédé et de lui permettre par exemple de s'opposer à la cession, le législateur prévoit une sanction, l'inopposabilité aux tiers. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture