M . Cabanne affirme la volonté de la jurisprudence de ne pas prendre en compte l'absence de discernement comme cause d'exonération de la responsabilité civile des individus. Cette jurisprudence découle d'une conception objective de la faute, l'imputabilité morale de l'individu n'est donc plus retenu pour invoquer la responsabilité civile du justiciable. Ainsi, la responsabilité civile s'écarte de la responsabilité pénale qui opte pour l'irresponsabilité des individus dénués de discernement. La conception in concreto de la jurisprudence antérieure ne permettait pas une protection juridique des victimes d'individus dénués de discernement tel que les enfants de bas âge. L'avènement d'une responsabilité in abstracto est donc apparu comme essentielle au respect de la fonction indemnisatrice et l'obligation de réparation des préjudices consacrés dans l'article 1384 du Code civil. La jurisprudence par les arrêts de principe du 9 mai 1984 renverse cette tradition juridique d'appréciation subjective de la faute.
[...] Jourdain ne prône pas un retour à la logique subjective de la responsabilité qui provoquait de nombreuses critiques quant à l'exclusion de la procédure d'indemnisation des individus victimes d'un préjudice causé par un infans ou un aliéné. Ces juristes critiquent l'application systématique d'une logique in abstracto amenant une indemnisation non intégrale d'une victime fautive en bas âge dans une logique de sanction incohérente et contraire au principe de réparation intégrale du préjudice. Ces critiques doctrinales amènent l'établissement d'exception à la conception in abstracto. La loi badinter du 5 juillet 1985 amène une protection plus grande des victimes d'accident de la circulation. [...]
[...] Ainsi, les arrêts du 9 mai 1984 permettent d'établir ce nouveau dogme juridique de la responsabilité civile. L'enfant en bas âge est tenu responsable du dommage qu'il a causé, il est donc dans le cadre de l'article 1382 responsable civilement. Cependant, l'insolvabilité de l'infans demeure évidente, les parents de l'enfant sont donc amenés à engager leur responsabilité selon l'article 1384 relatif à la responsabilité du fait d'autrui. La Cour de cassation dans son arrêt Fullenwarth estime que pour que soit présumée, sur le fondement de l'article 1384, alinéa 4 du Code civil, la responsabilité des pères et mère d'un mineur habitant avec eux, il suffit que celui-ci ait commis un acte qui soit la cause directe du dommage invoqué par la victime La jurisprudence s'accorde sur ce principe de responsabilité civile des infans malgré leur incapacité de discernement, l'arrêt Gabillet de 1984 admet la responsabilité civile d'un enfant de 3 ans en ne prenant pas en compte l'imputabilité morale de la faute en retenant que le jeune Éric avait l'usage, la direction et le contrôle du bâton, la cour d'appel qui n'avait pas, malgré le très jeune âge de ce mineur ans), à rechercher si celui-ci avait un discernement, a légalement justifié sa décision L'enfant n'est assurément pas conscient de la faute qu'il a commise, mais la nécessité de réparation du préjudice de la victime prévaut sur cette notion subjective, on écarte désormais l'imputabilité morale comme condition de la faute. [...]
[...] Le manque de discernement des infans demeure la motivation de la décision, la jurisprudence admet qu'un infans ne répond pas de ses actes dès lors que son discernement n'est pas prouvé par l'Arrêt du 7 décembre 1977 et du 6 juillet 1878. Cependant, cette jurisprudence est rapidement critiquée, l'irresponsabilité civile des infans va à l'encontre d'un principe de réparation du préjudice, les victimes de préjudice causé par des enfants de bas âge ne peuvent obtenir d'indemnisation en dommages et intérêts. [...]
[...] Le législateur prend en compte la capacité de discernement des victimes afin de ne pas leur imputer leur participation à leur propre dommage. L'arrêt du 9 mai 1984 impliquant un enfant de 5 ans dans un accident de la route n'aurait donc pas été jugé de la même manière aujourd'hui. Le juge aurait alors dû prendre en compte l'incapacité de discernement de la victime afin d'éliminer le mécanisme de partage de la responsabilité civile dans un cas d'une victime fautive. [...]
[...] Une critique doctrinale amenant l'établissement d'un régime d'exception : la loi Badinter Viney et Jourdain dans les conditions de la responsabilité estiment que l'octroi d'une indemnisation partielle à une victime fautive relève de la peine privée. C'est donc dans un but de répression qu'on engage la responsabilité de la faute partagée désavantageuse à la victime, cependant on peut s'interroger sur la légitimité de ce mécanisme dans le cas d'une victime infans. En effet, retenir la faute d'une victime en bas âge paraît incohérent, celle-ci n'a pas réellement conscience de sa faute. [...]
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