Malgré la multiplication des fondements de la responsabilité civile, l'article 1382 du Code civil relatif à la faute délictuelle reste toujours d'actualité.
Monsieur Le Tourneau avait déjà relevé la permanence de la responsabilité pour faute, sa vocation universelle à s'appliquer, sous réserve de la règle du non-cumul des deux ordres de responsabilité, en toutes matières et à tout dommage.
Elle est réaffirmée avec force dans le domaine des agents immobiliers par l'assemblée plénière de la Cour de cassation dans l'arrêt du 9 mai 2008.
En l'espèce, un agent immobilier, mandataire, titulaire d'un mandat non exclusif que lui avait donné, afin de vendre un appartement, une société venderesse moyennant 2 700 000 francs « net vendeur », a fait visiter le bien à époux se présentant sous un certain nom.
Ayant appris que ces personnes avaient fait usage d'une fausse identité et avaient acquis le bien du vendeur sans que la commission prévue dans le mandat lui ait été payée, l'agent immobilier les a assignés en réparation de son préjudice.
Après renvoi sur cassation, l'action du mandataire fut accueillie par la cour d'appel de Nîmes dans un arrêt du 21 janvier 2007.
Il s'agissait pour la Cour de cassation d'apprécier si les tiers acquéreurs dont les agissements fautifs ont causé un préjudice à une personne mandatée par le vendeur lui devaient réparation du préjudice résultant de la privation de sa commission.
[...] En effet la cour d'appel qui a fait ressortir que la connaissance par les acquéreurs du droit à rémunération de l'agent immobilier et qui a pu retenir que les manœuvres frauduleuses qu'ils avaient utilisées, consistant en l'emprunt d'une fausse identité pour l'évincer de la transaction immobilière, avaient fait perde à l'agent immobilier la commission qu'il aurait pu exiger du vendeur, en a exactement déduit qu'ils devaient être condamnés à lui payer des dommages et intérêts. L'arrêt de principe rendu par la Cour de cassation présente un intérêt majeur, en effet en retenant la responsabilité délictuelle du tiers acquéreur vis-à-vis du mandataire, elle permet à ce dernier d'obtenir la réparation de son préjudice. [...]
[...] Une fois cette indication donnée, cela permet à l'assemblée plénière de distinguer le droit à rémunération de l'agent immobilier découlant du contrat de mandat réglementé du droit à réparation qui lui est reconnu par application du droit commun des contrats relatif à la responsabilité civile délictuelle. II) Le droit à réparation de l'agent immobilier Ce droit de réparation repose sur la responsabilité civile délictuelle des acquéreurs, celle-ci exigeant la réunion de 3 éléments : une faute, un préjudice et un lien de causalité entre la faute et le préjudice. Une faute délictuelle L'assemblée plénière décide que le fait que les acquéreurs n'aient pas été débiteurs de la commission n'interdit pas de rechercher leur faute délictuelle, tel est l'apport fondamental de l'arrêt. [...]
[...] L'Assemblée plénière rappelle ainsi, plus généralement, que lorsque la responsabilité délictuelle d'un tiers est recherchée par un contractant, on n'a pas à la subordonner à la préexistence d'une dette contractuelle envers la victime, seule est prise en compte la vérification des conditions de la responsabilité délictuelle. Pour l‘assemblée plénière, les manœuvres frauduleuses des acquéreurs sur leur identité véritable constituaient la faute délictuelle de l'article 1382 du Code civil. Une fois cette qualification retenue par l'assemblée plénière, il lui fallait vérifier les deux autres conditions de mise en œuvre de la responsabilité civile, le lien de causalité et le préjudice. le préjudice et le lien de causalité La deuxième condition indispensable pour mettre en œuvre la responsabilité délictuelle est l'existence d'un préjudice. [...]
[...] De plus, l'assemblée plénière ajoute que les acquéreurs avaient connaissance du droit à commission de l'agent en s'appuyant sur le fait que la vente avait eu lieu à un prix net vendeur ce qui laissait en effet entendre qu'une commission était due à l'agent immobilier par l'entremise duquel la vente avait pu être réalisée. Quant bien même les acquéreurs n'avaient pas eu connaissance de la clause prévoyant la commission, ils ne pouvaient ignorer ni le droit à commission de l'agent, dès lors que celui- ci leur avait fait visiter l'immeuble au titre de mandataire. [...]
[...] Ce mandat comprenait également les mentions obligatoires imposées à peine de nullité en vertu de l‘article 6 et 7 de la loi Hoguet, en particulier, aucune contestation ne portait sur la rémunération prévue en cas de réalisation de l'opération de vente: le vendeur ayant donné à l'agence mandat de vendre moyennant le prix de francs, commission comprise, ce qui implique que la commission était due par le vendeur à l'acquéreur. Ainsi, l'agent immobilier ne peut réclamer de somme à l'acquéreur, y compris des dommages et intérêts contractuels. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture