Clauses de non-concurrence, libre exercice d'une activité professionnelle, versement d'une contrepartie financière, harmonisation jurisprudentielle
Les clauses de non-concurrence, outil légal permettant notamment aux entreprises d'obtenir l'exclusivité du travail d'un employé peuvent finir par instaurer un conflit entre les deux parties. C'est le cas par exemple dans un arrêt rendu le 15 mars 2011 par la chambre commerciale de la Cour de cassation où un litige oppose un salarié à la société qui l'employait.
L'actionnaire principal de la société a attribué quarante des actions de cette dernière au salarié au prix symbolique d'un euro. La cession a ensuite été formalisée par un pacte d'actionnaires qui contenait un clause de non-concurrence engageant le salarié envers la société l'employant. Cette clause ne prévoyait cependant pas le versement d'une contrepartie financière au salarié. Par la suite, le salarié a démissionné afin d'entrer en service au sein d'une société concurrente. L'ancienne société du salarié et son actionnaire principal, deux sociétés, ont assigné le salarié ainsi que la société concurrente en réparation.
[...] Ce principe fondamental, appliqué continuellement, permet aux salariés, actionnaires ou associés de pouvoir exercer librement l'activité professionnelle choisie, ce qui sous-entend également la possibilité de changer librement de métier. Les effets de la clause de non-concurrence vont donc clairement à l'encontre de ce principe. Une clause de non-concurrence interdit en effet à celui qu'elle engage de participer à des activités similaires à celles de la société qui l'emploie. Mais la Cour admet qu'une clause de non-concurrence peut entraver la liberté d'exercice d'activité professionnelle si quatre conditions sont respectées. [...]
[...] Mécontents, le salarié et la société concurrente, les demandeurs, forment un pourvoi en cassation contre les sociétés, les défenderesses. Il est donc légitime de se demander si une clause de non-concurrence, engageant un salarié, formalisée par un pacte d'actionnaire ne prévoyant pas le versement d'une contrepartie financière peut être considérée comme licite. En l'espèce, la Cour de cassation estime que la cour d'appel a violé le principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle ainsi que l'article 1131 du Code civil, car elle affirme que la clause de non-concurrence litigieuse n'obligeant pas les défenderesses à verser une contrepartie financière au salarié est illicite et donc inapplicable. [...]
[...] Cette promesse d'exclusivité du salarié est la cause de la clause de non-concurrence. Or, comme vue précédemment, cette clause de non-concurrence entrave la liberté d'exercice d'une activité professionnelle du demandeur sans respecter une des conditions cumulatives nécessaires à sa validité. En ne prévoyant pas de contrepartie financière au demandeur, la cause de cette clause de non-concurrence est donc considérée comme illicite par la Cour de cassation. En effet, la cause de la clause aurait été licite si cette dernière avait respecté les quatre conditions de validité cumulatives d'une clause de non- concurrence entravant la liberté de se rétablir d'un salarié. [...]
[...] La chambre commerciale à l'inverse doit régler des litiges concernant des professionnels du commerce ; des entreprises, des sociétés, des associés. Mais en l'espèce, le demandeur était un salarié, il est donc possible que la chambre commerciale ne se soit alignée sur la jurisprudence de la chambre sociale uniquement pour protéger le salarié. Reste donc à savoir si la chambre commerciale de la Cour de cassation appliquera cette décision à toutes les clauses de non-concurrence, qu'elles engagent ou non un salarié. [...]
[...] L'obligation de la contrepartie financière, un nouveau critère ne concernant que les clauses de non-concurrence engageant un salarié ? Mais cet arrêt pose un problème sous-jacent, est-ce que toutes les clauses de non-concurrence formalisées par pacte d'actionnaires devront désormais comporter une contrepartie financière à la personne qu'elle engage ? La chambre commerciale de la Cour de cassation s'est alignée sur la jurisprudence de la chambre sociale, mais il semblerait qu'elle ait agi ainsi, car le demandeur obligé par la clause de non-concurrence était un salarié. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture