La Première Chambre civile de la Cour de Cassation a rendu un arrêt de rejet le 10 octobre 1995 dans une affaire concernant la qualification de la transformation d'une obligation naturelle en obligation civile.
M. X a l'habitude de jouer au Quinté en confiant à M. O la tâche d'aller valider le ticket en convenant que celui-ci recevrait 10% des gains éventuels. Alors qu'il allait valider un ticket confié par M. X, M. O n'a pas pu le valider, il a donc décidé d'en refaire un autre mais a changé les chiffres qu'avait indiqués M.X sur le ticket initial. Cette initiative a permis à M.X de gagner une somme avoisinant les un million cinq cent mille francs, il a d'ailleurs averti M.O qu'il lui ferait parvenir sa quote-part, mais refuse par la suite d'exécuter son engagement.
M.O a assigné M.X en paiement des 10% de la somme qu'il a gagné outre les intérêts, le jugement de première instance a fait droit à sa demande. Le 7 octobre 1993, la Cour d'Appel de Metz a confirmé ce jugement, ainsi M.X forme un pourvoi en cassation.
M.X avance que la Cour d'Appel a admis l'existence d'une novation en l'absence de l'existence d'une obligation civile préexistante alors que la novation suppose l'extinction d'une dette et la création d'une nouvelle. Il avance aussi que la volonté de nover devant résulter de l'acte, la Cour d'Appel a violé l'article 1273 du Code Civil en fondant la volonté de nover sur une interprétation d'un procès-verbal de comparution personnelle des parties et des témoignages. Il avance enfin qu'en se basant sur les notes d'audience du demandeur pour justifier l'obligation naturelle les juges ont violé les articles 16 et 913 du nouveau Code de Procédure civile.
Peut-on contraindre une personne qui s'est engagée seule à donner une somme d'argent à exécuter son engagement ?
La Cour de Cassation note qu'il y a une obligation naturelle « improprement qualifiée novation » qui s'est transformée en obligation civile, et que c'est à bon droit que les juges de fonds ont donc débouté M.X de ses demandes, ainsi rejette le pourvoi.
L'intérêt de cet arrêt est double. En effet on peut, premièrement, y voir un rappel de la notion de novation, la Cour de Cassation écarte la novation du litige mais en rappel le principe. Puis, deuxièmement, l'intérêt réside dans la transformation de l'obligation naturelle en obligation civile, en effet cela permet de comprendre comment une obligation qui n'intéresse pas le droit, peut devenir juridique. Enfin ces points permettent de comprendre en quoi la novation diffère de la transformation d'une obligation naturelle en obligation civile.
Nous verrons donc dans une première partie la qualification de l'obligation par le juge de cassation (I), puis dans une seconde nous envisagerons l'engagement unilatéral de son aspect moral à sa valeur juridique (II) (...)
[...] avait entendu transformer son obligation naturelle en obligation civile ; D'où il suit que le moyen, pour partie inopérant, n'est pas fondé pour le surplus ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi. [...]
[...] La morale intégrée au droit L'arrêt du 10 Octobre 1995, vient trancher un débat doctrinal quant au fondement de l'obligation naturelle. En effet deux thèses s'opposaient. Pour la thèse classique il y a toujours une obligation civile à l'origine de l'obligation naturelle même si celle-ci est dépourvue de sanction juridique, les obligations naturelles ne sont alors que des obligations civiles imparfaites. La seconde thèse est la thèse moderne, elle nie le rattachement de l'obligation naturelle à une obligation civile, le devoir de conscience la source l'acte juridique dans lequel s'exprime la volonté d ‘exécuter l'obligation. [...]
[...] X ayant soutenu dans ses conclusions que son engagement n'avait pas de conséquences civiles, le moyen est inopérant en ses deux dernières branches ; Attendu, ensuite, que la transformation improprement qualifiée novation d'une obligation naturelle en obligation civile, laquelle repose sur un engagement unilatéral d'exécuter l'obligation naturelle, n'exige pas qu'une obligation civile ait elle-même préexisté à celle-ci ; Et attendu, enfin, qu'après avoir constaté que M. X . avait tacitement renoncé à l'application de l'article 1341 du Code civil, dont elle relève exactement que ses dispositions ne sont pas d'ordre public, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'apprécier la portée des preuves à elle soumises que la cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés, que M. [...]
[...] Moralement, il n'est pas exagéré de lui faire profiter du gain, cela tient de la courtoisie, de la reconnaissance, on pourrait même parler de savoir vivre. De plus, la morale est suivie par le droit car lorsqu'un engagement est pris, le devoir de conscience veut qu'on s'y tienne, et le droit sanctionne la non-exécution de ce devoir de conscience devenu obligation civile. L'engagement qui est une promesse, est l'élément qui transforme l'obligation naturelle en obligation civile. Juridiquement un engagement est opposable à son auteur, et donc son inexécution peut faire l'objet sanction. [...]
[...] C'est donc en relevant que la Cour d'Appel, bien qu'ayant qualifié la transformation de novation, a relevé qu'il y avait bien une obligation naturelle qui s'était transformée en obligation civile par l'engagement du débiteur, que la Cour de Cassation rejette le pourvoi en ne faisant pas droit aux demandes de M.X. On voit donc ici que l'obligation naturelle non sanctionnable juridiquement peut devenir une obligation civile par le seul engagement du débiteur, il y a naissance d'une obligation civile par l'engagement de volonté unilatéral. [...]
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