La Caisse d'épargne et de prévoyance des Alpes a consenti deux prêts aux époux X à titre professionnel et qui étaient "destinés au financement de divers matériels et frais de mise au point", mais ces prêts ont été utilisés pour l'apurement des dettes de M X… envers une banque, dette née avant et existant pendant la conclusion du contrat. Le premier prêt a en effet servi en partie à compenser le débit du compte personnel de M X puisqu'il a été remis par virement sur celui-ci, équivalent à un peu moins du tiers de la somme du prêt. Une partie donc des prêts n'a pas été utilisée pour leur destination finale stipulée dans le contrat de prêt.
Mme X… assigne alors la Caisse d'épargne en justice en annulation des prêts litigieux et en paiement de dommages-intérêts car les prêts n'ont, selon elle, pas de cause ou sont fondés sur une fausse cause. Elle forme un deuxième pourvoi devant la Cour de cassation pour les mêmes motifs.
Pour obtenir l'annulation de ces contrats, Mme X a invoqué un moyen pris en plusieurs branches, toutes fondées sur la cause de l'obligation de l'article 1131 du code civil. Elle affirme dans ses deux premières branches, tout d'abord, que la cause de son obligation de rembourser avec intérêts était « la possibilité d'user des fonds conformément à leur destination, et non la simple obligation de remettre à l'emprunteur », et que tel n'avait pas été le cas puisqu'une partie importante du crédit avait servi, non pas au financement de divers matériels professionnels, mais à l'apurement des dettes de son mari. Elle soutient ensuite, dans sa troisième branche, que son « erreur sur l'existence de la cause », bien qu'inexcusable puisqu'elle se devait de connaître la situation financière de son conjoint, devait tout de même entraîner la nullité du contrat de prêt. Enfin, elle considère que la fausseté partielle de la cause, c'est-à-dire l'utilisation simplement partielle des fonds pour le financement des matériels professionnels, doit lui permettre d'obtenir une réduction du montant de son obligation.
Mots clés: arrêt, commentaire d'arrêt, 19 juin 2008, cause, contrat de prêt, prêt, assigner, dette, emprunteur, existance, théorie, cause objective, crédit, contrat synallagmatique, cour de cassation
[...] Cet emprunt n'est pas lié à ce qu'ils veulent en faire, ce sont deux contrats différents. Mais nous pouvons alors légitimement craindre, pour la sécurité du crédit, que tout emprunteur pourrait désormais soutenir avec succès que son engagement était dépourvu de contrepartie pour la simple raison que le prêt n'avait pas reçu l'affectation envisagée ou encore parce que l'emprunteur n'en avait tiré finalement aucun profit. L'arrêt rendu par la première chambre civile le 19 juin 2008 permet de lever cette inquiétude en revenant à une conception beaucoup plus classique de la cause de l'obligation. [...]
[...] Est-il satisfaisant de répondre que l'emprunteur s'engage à restituer la chose pour que le prêteur s'engage à la lui remettre ? On voit à travers le contrat de prêt que la cause ne sert pas alors pas à grand-chose, car s'il y a une obligation de restitution c'est que la chose a été remise, on aurait jamais d'hypothèse d'absence de cause, c'est cette conception objective de la cause retenue dans la solution qui n'a pas d'intérêt pour l'emprunteur en l'espèce. [...]
[...] L'arrêt du 19 juin 2008 apporte des réponses claires qui devraient les défenseurs de la conception classique de la cause. De nature alors consensuelle et synallagmatique, le prêt est formé par le seul échange des volontés de l'emprunteur et du prêteur qui se trouve, par l'effet de cet accord de volontés, obligé au paiement de la somme convenue Comme l'admettent la jurisprudence et la doctrine dominante, la cause de l'obligation d'une partie dans un contrat synallagmatique commutatif est la contrepartie convenue, c'est-à-dire l'objet de l'obligation souscrite par le prêteur. [...]
[...] La cause serait donc bien intéressante si on pouvait utiliser cette notion non dans la remise du bien. L'emprunteur obtiendrait alors l'annulation du prêt, mais rien de nouveau ne s'est produit depuis cet arrêt et laisse cette théorie en suspens. Même si les arrêts dits Chronopost et des cassettes vidéo drainent ce mouvement de subjectivisation de la cause. Il faut savoir enfin que Catalan dans son projet de réforme prend en cause au moins implicitement la cause finale de l'engagement qui est l'intérêt poursuivi. [...]
[...] Le prêteur n'a alors pas d'obligation, il n'a qu'à remettre le bien, c'est l'élément de validité du contrat. Dans ce schéma classique du prêt, le contrat est unilatéral, il n'y a qu'une obligation, celle de l'emprunteur de restituer ce qui a été remis. Il s'engage parce qu'il a reçu la somme par le prêteur et génère l'obligation de la restitution, en l'espèce francs plus intérêts. Mais l'on sait que, depuis quelques années, la Cour de cassation affirme régulièrement que les prêts consentis par un professionnel du crédit ne sont pas des contrats réels. [...]
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