Au visa de l'art 2037 Cciv, la Cour censure les juges du fond au motif que « la caution n'est déchargée qu'à concurrence de la valeur des droits pouvant lui être transmis par subrogation et dont elle a été privée par le fait du créancier. »
Cette solution, même si elle n'est pas nouvelle, invite à analyser les critères, certes classiques, de mise en oeuvre de l'art 2037 Cciv (I) avant d'étudier le rôle du principe de proportionnalité en la matière (II)...
[...] Car en définitive, la sanction indirectement affligée au créancier par le biais de la décharge de la caution, est à rapprocher de celle d'un manquement à ce devoir de bonne foi. Il est alors possible de considérer que l'on rejoint avec cet argument les auteurs qui trouvent dans la responsabilité civile le fondement du mécanisme de l'art 2037 Cciv. D'ailleurs cette voie semble celle sur laquelle s'est engagée la Cour de cassation par un arrêt Civ 1ère 16 juillet 1998, dans lequel elle sanctionne également un manquement à l'obligation de bonne foi du créancier, mais sur le terrain de la responsabilité contractuelle cette fois. [...]
[...] L'arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 15 décembre 1998 apporte d'utiles précisions sur plusieurs aspects du texte. En l'espèce, le remboursement d'un prêt consenti à une société est garanti par une caution solidaire qui s'engage à hauteur de l'emprunt, soit 1.400 .000F. La société fait ensuite l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire, et la caution actionnée en paiement invoque le bénéfice de l'art 2037 Cciv. Elle fait valoir à cette fin que le créancier a négligé d'inscrire le nantissement de fonds de commerce que le débiteur lui avait consenti. [...]
[...] Si ce fait peut bien entendu être positif, la jurisprudence admet également qu'il soit constitué par une omission, preuve de la négligence (Civ 3è 12 nov.1974). En matière de nantissement de fonds de commerce, comme en l'espèce, il peut être reproché au créancier de ne pas avoir renouvelé l'inscription (Com 3 nov. 1975) ou ne pas avoir réalisé le nantissement en temps utiles (Com 10 déc. 1991) Il n'est donc pas surprenant qu'en l'espèce les juges aient retenu contre le créancier le fait qu'il n'ait pas fait inscrire le nantissement pourtant prévu au contrat de prêt. [...]
[...] Mais la question principale reste celle de la charge de la preuve. Techniquement, le mécanisme de l'art 2037 Cciv s'analyse en une exception ce qui implique que c'est à celui qui l'invoque, la caution, d'en établir la preuve. Pourtant, la jurisprudence (Com 3 nov. 1975) n'exige pas que cette preuve soit rapportée ; elle présume au contraire l'existence d'un préjudice à partir du constat de la faute du créancier. Cette dérogation au droit commun est largement favorable à la caution qui, comme en l'espèce, est déchargée lorsque le créancier n'établit pas que les chances de recouvrement des sommes versées n'auraient pas été améliorées s'il avait agi avec diligence. [...]
[...] La solution de la cour de cassation doit donc être approuvée sur le plan de la technique juridique, mais également quant à sa valeur. Le principe de proportionnalité au service d'un juste équilibre entre les obligations des parties Jamais évoqué dans la loi, le principe de proportionnalité est pourtant un outil précieux à la jurisprudence afin d'introduire une dose d'équité dans le cautionnement. Dès le stade de la formation du contrat, les juge veillent d'ailleurs à ce que l'engagement de la caution ne soit pas manifestement disproportionné à ses possibilités financières (Com 17 juin 1997). [...]
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