« Le droit, principalement celui des libertés individuelles, n'a pas à s'incliner devant l'état de la technologie ; c'est à la technologie de s'adapter aux exigences fondamentales du droit. »1
L'ordinateur est apparu au sein des entreprises comme une avancée technologique, occultant du même coup ses redoutables moyens de surveillance. En entrant dans la sphère professionnelle, son utilisation éclaire d'un jour nouveau la question de l'usage personnel des moyens mis à la disposition des salariés dans l'entreprise. La question n'est pas nouvelle et s'était déjà posée concernant l'utilisation des réseaux téléphoniques internes, et notamment de leur écoute par l'employeur. De nouveau, le droit du travail se heurte à la conciliation entre vie privée et vie professionnelle du salarié. Les nouvelles technologies modifient les conditions de production et donc les relations de travail, mais ces avancées technologiques ne sont pas nécessairement facteurs de progrès pour le salarié. Le perfectionnement des technologies et la confusion du temps de travail et de repos qu'elle engendre peut mettre en péril la santé du travailleur et son droit à une vie familiale et sociale normale. Aujourd'hui encore, le droit du travail et liberté ne sont pas aisément conciliables.
Il a fallu attendre la loi du 6 janvier 1978 pour que soient abordées les nouvelles technologies sous l'angle des libertés individuelles. Posant les bases de la protection de la vie personnelle, elle s'applique dès que des informations nominatives subissent un traitement automatisé, quels que soient les objectifs et la nature de l'organisme collecteur. Dans son article premier, elle proclame que l'informatique doit s'adapter à l'homme. Dans un rapport de 1991 , le professeur Gérard Lyon-Caen fixe comme objectif la recherche d'un équilibre entre le respect des prérogatives nécessaires au bon fonctionnement de l'entreprise et le respect des libertés individuelles des salariés. Certains principes seront retenus par la loi de 1978, parmi lesquels ceux de transparence des finalités et de pertinence. Suite à ce rapport, la loi du 31 décembre 1992 pose les bases d'un droit informatique et liberté dans l'entreprise. Elle crée l'article L.120-2 du Code du travail qui dispose que « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. » Ce texte nous permet donc de déduire que le salarié exerce ses droits et libertés individuelles au sein de l'entreprise. Toute la problématique est alors de trouver un juste équilibre entre les prérogatives de l'employeur et les droits des employés.
Ainsi le contrôle et la surveillance par l'employeur ne sont admis que s'ils répondent aux principes de proportionnalité et de nécessité. Le Bureau International du Travail (BIT) et la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés (CNIL) tentent de déterminer clairement les limites au-delà desquelles le contrôle de l'employeur devient illégitime. La jurisprudence pour sa part, nourrie d'un contentieux abondant en la matière, vient elle aussi préciser les limites de ce contrôle. Si les abus montrés du doigt sont souvent de l'employeur, il n'en demeure pas moins que le salarié peut aussi détourner son outil de travail en l'utilisant à des fins personnelles. L'ordinateur est alors un formidable allié permettant de passer de la sphère professionnelle à la sphère privée instantanément. C'est d'ailleurs souvent à l'occasion de litige tendant à déterminer si l'usage à des fins privées tombe sous le coup du pouvoir de surveillance et de contrôle de l'employeur que la jurisprudence est la plus abondante. La Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH) a ainsi affirmé le principe de protection de l'intimité de la vie privée du salarié sur son lieu de travail, dans un arrêt de 1992, sous le visa de l'article 8 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme qui vise la protection de la liberté de la vie privée. La Cour de cassation a affirmé en 2001, dans l'arrêt NIKON , que « le salarié a droit, même au temps et au lieu de travail, au respect de sa vie privée. » La jurisprudence a entendu ainsi clarifier la situation et mettre fin à une insécurité récurrente. Mais c'était sans compter sur les nouvelles technologies qui viennent de nouveau rouvrir le débat.
De fait, la solution de principe dégagée par la Cour de cassation semble aujourd'hui devoir être précisée au regard de ces nouvelles technologies, permettant à la fois de remettre en cause la notion de « vie privée », mais aussi de s'interroger sur l'impact de leur utilisation sur le fonctionnement de l'entreprise, et de manière corollaire, sur les prérogatives de l'employeur.
La jurisprudence a commencé par poser une interdiction de principe de l'atteinte à la vie privée des salariés. Ce faisant, elle a permis de délimiter les situations dans lesquelles le salarié peut utiliser le matériel professionnel à des fins privées. Cependant, cette délimitation n'est pas, en soi, un obstacle au contrôle de l'employeur sur ses préposés. L'actualité jurisprudentielle, en la matière, nous permet d'observer une transition vers un rétablissement des pouvoirs de contrôle et de surveillance du salarié par le chef d'entreprise.
Ainsi, l'ordinateur, qui s'est peu à peu intégré comme un outil de travail incontournable au sein de l'entreprise, se révèle être par la même occasion un formidable moyen de se détourner de sa tâche de travail pour le salarié. Il paraît donc approprié d'analyser dans quelles mesures ce dernier peut l'utiliser à des fins privées (I). Cependant, malgré les inquiétudes et les doutes que posait le détournement de sa finalité, il s'avère que l'employeur n'est pas aussi lésé dans ses prérogatives que ce que nous aurions pu croire (II).
[...] B : Les limites raisonnables de l'utilisation personnelle du salarié imposées par l'employeur Si l'entreprise choisit d'autoriser les salariés à utiliser à des fins privées les moyens informatiques mis à leur disposition pour leur charge de travail, elle peut recourir au règlement intérieur, mais aussi à des chartes ou des accords conclus avec les représentants élus ou désignés par les salariés pour encadrer leur usage. Pour le règlement intérieur, le législateur a écarté de celui-ci tout ce qui ressortait du domaine des négociations. Les chartes sont des normes patronales atypiques. [...]
[...] Ainsi l'article I-IV de la loi en vigueur, définit le courrier électronique professionnel comme tout message, sous forme de texte, de voix, de son ou d'image, envoyé par un réseau public de communication, stocké sur un serveur ou dans l'équipement terminal du destinataire, jusqu'à ce que ce dernier le récupère Dès lors le courrier électronique qui répond à cette définition serait considéré comme professionnel, et de fait ne serait pas soumis au secret de la correspondance privée. A la lecture du texte, une question se pose : jusqu'à ce que ce dernier les récupère : faudrait-il y voir une limite ? Le courriel une fois récupéré par le salarié pourrait-il de nouveau bénéficier de la protection du secret des correspondances privées ? Rien n'est moins sur. Le Conseil Constitutionnel a eu à connaître de la constitutionnalité de cette loi. [...]
[...] Mais ils sont détournés de leur finalité pour surveiller l'activité des salariés. Pour introduire certains moyens de contrôle, les principes de bases doivent être respectés, à savoir : l'information personnelle et préalable du salarié, l'information du comité d'entreprise et le respect du principe de proportionnalité. La loi de 1978, dans ses articles et 17, impose une obligation de déclaration préalable à la CNIL. C'est elle qui va autoriser l'entreprise à recourir à un traitement automatisé de données personnelles. Cette obligation concerne tous les traitements d'informations nominatives. [...]
[...] Comme nous venons de le voir, l'utilisation des moyens informatiques par les salariés peut très bien se concilier avec la bonne marche de l'entreprise. La jurisprudence a imposé le respect de la vie privée quant à un détournement de ces moyens à des fins privées, tout en limitant cette possibilité, pour éviter les dérives qui contreviendraient à l'employeur ou à l'entreprise. Il ne s'agit pas d'un droit pour le salarié, mais d'une tolérance admise ou non par l'employeur. De plus, le contrôle apparaît nécessaire, qu'il soit ponctuel ou systématique, pour que l'employeur puisse apprécier sur le plan qualitatif et quantitatif l'activité de ses employés. [...]
[...] Ainsi, l'ordinateur, lorsqu'il permet une connexion à internet, devient un véritable fléau au sein de l'entreprise, car il permet au salarié de surfer sur internet, au détriment de son travail : Le contrôle d'internet : La question majeure ici est de savoir s'il faut totalement interdire l'usage d'internet ou encadrer son utilisation. Pour certaines entreprises, le recours à internet n'est pas nécessaire, et dès lors, faute d'utilité, la question se trouve résolue d'elle-même. Cependant, la difficulté demeure pour les entreprises qui l'utilisent. Tout est alors question d'opportunité. L'employeur peut encadrer l'usage de l'utilisation des moyens informatiques au sein de l'entreprise. Mais, au-delà des règles légales, le salarié doit lui-même respecter certaines limites. Certains comportements pourront être sanctionnés s'ils portent atteinte à l'intérêt de l'entreprise. [...]
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