Le développement du crédit depuis un demi-siècle a conduit la jurisprudence, la doctrine et les pouvoirs publics à porter la plus grande attention à l'attitude du dispensateur de crédit. Il peut s'agir d'un associé, d'une société mère ou du fournisseur dont le comportement peut être fautif. Le plus souvent, il s'agit du banquier. Celui -ci, en sus de l'art difficile qu'il exerce et du risque économique qu'il assume (voir Le Monde du 6 décembre 2005 : l'agence de notation américaine Standard and Poor's a publié un rapport démontrant que la concentration des risques que détiennent les banques européennes auprès de leur clientèle de grandes entreprises, sous forme de crédits ou d'actions, est trop élevée), a dû faire face à la montée du risque juridique présenté par les multiples actions en responsabilité, souvent engagées par les créanciers du « failli », tentés de se retourner contre celui qui reste solvable. Il est certain que l'attitude de la banque peut être lourde de conséquences : tant qu'elle soutient son client, la situation du débiteur est en apparence solide et nombre de créanciers continuent à faire confiance au débiteur dont la situation sans issue se révèle trop tard.
La banque est un partenaire de l'entreprise, elle occupe dans le paysage économique une place stratégique qui la conduit à accompagner les entreprises lors de leur création et dans leur développement, mais aussi à épauler par des crédits appropriés, celles souffrant de difficultés passagères. Il s'agit là d'une mission capitale tant il est clair que la création et le développement d'unités de production, nécessitent la mobilisation de capitaux dont l'importance dépasse les capacités propres de l'entreprise.
Ce rôle moteur d'animation de la croissance économique, la banque le joue, non pas dans le cadre bénéfique d'une liberté absolue, mais dans le respect des règles du droit commun de la responsabilité, dans la mesure où la logique juridique s'oppose à ce qu'un agent économique puisse échapper à la responsabilité encourue par lui à raison de ses agissements ayant conduit le client à la ruine et par suite, au dépôt de bilan ou à retarder celui-ci .De même, la banque peut s'exposer le cas échéant, en sa qualité de personne morale, à une responsabilité par suite d'une faute pénale (complicité du délit de banqueroute par emploi de moyens ruineux, par exemple).
[...] Un relais de responsabilité était mis en place ; il n'y a rien de tel avec le nouvel article L 650-1 du Code de commerce. C'est donc, avec cette immunité totale, toute la jurisprudence concernant la responsabilité du banquier dispensateur de crédit en matière de soutien abusif qui semble invalidée à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, c'est-à-dire le 1er janvier 2006. Selon certains auteurs, le texte viserait alors moins à lever le frein psychologique supposé dissuader le banquier d'apporter son concours, qu'à le protéger en tant que tel. [...]
[...] Le débiteur et l'administrateur ne peuvent agir. L'article L 622-1 de ce même Code confère ce pouvoir au liquidateur après mise en liquidation judiciaire. Cette action du représentant des créanciers ou du liquidateur agissant au nom de ces mêmes créanciers a été admise par l'arrêt Laroche sous l'empire de la loi du 13 juillet 1967 puis reprise en affirmant que le liquidateur trouve dans les pouvoirs qui lui sont conférés par la loi en vue de la défense de l'intérêt collectif des créanciers qualité pour exercer une action en paiement de dommages intérêts contre toute personne, fût-elle titulaire d'une créance ayant son origine antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective, coupable d'avoir contribué par des agissements fautifs à la diminution de l'actif ou à l'aggravation du passif (Com novembre 1993). [...]
[...] Le second obstacle plus important, résidait dans le risque d'une responsabilité pour soutien abusif. Il faut ajouter que lorsque la question qui se posait au banquier était celle du maintien ou de la rupture du concours à l'entreprise en difficulté, le choix de la seconde voie paraissait plus préférable qu'elle avait été, on l'a vu sécurisée. Le législateur a remédié donc à cela, par l'adoption d'un texte a priori clair et sécurisant dégageant le banquier de toute responsabilité de principe. [...]
[...] Si la société est mise en redressement judiciaire, l'arrêt des poursuites individuelles empêche la société de poursuivre les remboursements ; en revanche le dirigeant social demeurant in bonis doit alors prendre à sa charge le remboursement du prêt (voir Cass.Civ. 1ère 1er juillet 2005). Les incertitudes relatives à la notion de faute et de comportement répréhensible du banquier ont provoqué une frilosité des banques. Il existait un double obstacle au financement des entreprises en difficultés. Le premier tenait au risque de crédit, il n'est jamais bien compliqué de convaincre une banque ou un fournisseur d'accorder un crédit à une entreprise florissante ; ceux-ci seront en revanche, légitimement réticents si cette entreprise est proche de la cessation des paiements. [...]
[...] La faute de la victime ne peut exonérer la banque que si elle est la cause exclusive, ce qui est rare (Cass. Civ juin 2004). En revanche, elle peut entraîner une exonération partielle (Cass. Com juin 2004 précité). L'absence totale de lien de causalité en matière de rupture de crédit sera souvent admise car généralement la disparition de l'entreprise a d'autres causes que la rupture de celui-ci ; assez souvent les juges éludent la difficulté en appliquant un critère chronologique : la cessation des paiements est réputée avoir été causée par la rupture de crédit si elle intervient immédiatement après celle-ci. [...]
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