Il est certain que le recours aux garanties de passif ne va cesser de s'intensifier dans les années à venir, car l'un des enjeux majeurs de notre décennie pour l'économie française réside dans la transmission d'entreprise. Une transmission d'entreprise est la réalité économique et financière de l'opération juridique qu'est la cession de contrôle, qui a pour particularité de transférer à l'acquéreur l'actif, mais aussi le passif de la société cédée, que ce passif soit connu ou occulte.
Dès lors, l'acquéreur va tenter, dans le cours du processus d'acquisition, d'approcher au plus près la réalité active et passive de l'entreprise cédée. Pour se faire, l'acquéreur peut agir en amont et en aval. Les garanties de passif consenties par l'associé majoritaire d'une société à l'occasion de cessions de ses droits sociaux sont source d'un contentieux très abondant en raison de l'approximation des parties dans la rédaction de l'acte.
Nous présenterons les dernières décisions de jurisprudence en la matière qui précisent ou illustrent les caractéristiques de ces garanties, et de leur régime.
[...] Avant d'entrer dans le cœur du sujet, qui retiendra notre attention sur la qualification des conventions de garanties intervenant dans les cessions de contrôle, et l'incidence de cette qualification sur le sort de la garantie en cas de revente des droits sociaux, envisageons l'hypothèse où une clause d'earn-out et une garantie de passif ont été cumulativement prévues pour une même cession. La convention d'earn out a une fonction de garantie lors de l'acquisition du contrôle d'une société. Toutefois, elle n'appartient pas à la famille des garanties de passif, car elle ne répond pas aux mêmes objectifs et, pour cette raison, peut être utilisée de façon cumulative avec ces dernières. [...]
[...] Or dans le cas d'une garantie de valeur, il n'y a réduction du prix qu'en cas de perte subie par la société cédée. Or ces pertes ont pour effet de réduire la valeur de la société cible, donc la valeur des droits sociaux cédés. Ainsi, si la méthode de calcul de la CRP est sérieuse et que le prix initial est sérieux, alors il n'y a pas de risque de prix dérisoire. M. Lécuyer a toutefois fait observer que si la mise en jeu de la clause conduisait à une restitution intégrale du prix payé, donc à réduire à néant l'obligation du cessionnaire, alors la cession serait nulle pour défaut d'objet et de cause. [...]
[...] Pour se faire, l'acquéreur peut agir en amont et en aval. En amont, la réalisation d'audits industriels, comptables, fiscaux, juridiques et d'environnement permettra de tendre vers ce but. Néanmoins, même les audits les plus rigoureux ne permettent pas de prémunir totalement l'acquéreur. En aval, le caractère limité des garanties légales applicables en cas de cession de droits sociaux conduit les acquéreurs à exiger des cédants qu'ils souscrivent des clauses de garantie portant sur les éléments d'actif et/ou de passif de la société dont les droits sont cédés. [...]
[...] Inversement, pour qu'une garantie soit qualifiée de garantie de bilan, il semble nécessaire qu'une stipulation pour autrui soit consentie au profit de la société cédée. Le critère du bénéficiaire est en principe plus aisé à mettre en œuvre, si ce n'est qu'en pratique, beaucoup de conventions désignent comme bénéficiaires tant l'acquéreur que la société émettrice. Il appartient alors au juge de déterminer si la convention accorde à l'acquéreur seulement le droit de mettre en œuvre la garantie au profit de la société ou bien celui de réclamer le versement des sommes dues entre ses mains. [...]
[...] Ces auteurs prennent appuie notamment sur l'arrêt du 11 mars 2008 de la Chambre commerciale et sur l'arrêt de la CA de renvoi de Paris du 14 mai 2009. Pour transmettre la garantie au sous-acquéreur, les parties à la revente doivent prévoir contractuellement cette transmission. En outre, le sous-acquéreur doit notifier au cédant initial la transmission de la garantie en respectant les formalités de l'article 1690 du Code civil. En l'état actuel des choses, les praticiens ont intérêt de prévoir expressément dans l'acte de cession la transmissibilité de la garantie. [...]
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