Selon Albert Jacquard, « L'exclusion signifie le refus du statut d'être humain. En se comportant comme si ce refus avait été décidé explicitement, une collectivité fait un geste grave, elle s'ampute elle-même de l'un de ses membres ».
Cette citation, applicable à la société au sens de communauté humaine, peut s'appliquer à la société au sens de communauté d'associés, et pose la question de l'adéquation, ou non, du régime de l'exclusion de l'associé en droit français.
Dans les sociétés commerciales, le nom d'associé désigne ceux qui ont le double droit de participer aux bénéfices et de concourir à la direction des affaires sociales pour les distinguer des porteurs de parts de fondateur qui n'ont que le droit de participer aux bénéfices.
Un associé est une personne physique ou une personne morale qui a effectué des apports au capital d'une société (en numéraire, en nature, en industrie). En contrepartie de ses apports, il reçoit des actions ou des parts sociales. Au sein de la société, l'associé a des obligations, comme l'obligation aux apports, aux dettes sociales, et l'obligation de loyauté et de bonne foi. Mais il a aussi des droits, comme le droit au vote, le droit aux bénéfices, le droit de céder, et surtout de ne pas céder ses titres. Or, le législateur autorise l'exclusion de l'associé.
L'exclusion désigne l'action de chasser une personne en la privant de certains droits. Exclure l'associé signifie le chasser de la société, par le biais d'une procédure de vente forcée d'une partie ou de tous ses droits sociaux dont il dispose en sa qualité d'associé au sein de la société.
[...] Parmi les avantages et les inconvénients du droit d'exclure l'associé, il revient à la jurisprudence et au législateur de trouver un juste milieu afin que le pouvoir d'exclure ne se transforme pas en pouvoir abusif. Le régime du droit de l'exclusion de l'associé est il approprié ? Celui-ci est en inadéquation avec la situation de l'associé, qui dispose de droit social que le législateur, et la jurisprudence paraissent ignorer. Mais d'un autre côté, cette situation est justifiée parce que d'un côté l'associé exclu bénéfice de garanties, de protection, de compensation, et d'un autre côté, le législateur entend protéger la personne morale elle- même d'une dissolution synonyme de suicide fiscal. [...]
[...] Mais quant à l'exclusion statutaire, elle consiste à prévoir par avance la possibilité d'exclusion, non plus en terme de sanction, mais notamment en terme de mésentente. Or, il est admis l'idée, contrairement à ce que la thèse institutionnelle de la notion de société laisse penser que les intérêts des associés ne sont pas toujours convergents. De ce fait, une simple divergence d'intérêt suffirait-elle à pouvoir exclure un associé opposant ? La situation de l'associé ne va pas en s'améliorant. En principe, l'exclusion judiciaire d'un associé est interdite, puisqu'il faut au moins une disposition légale ou statutaire. [...]
[...] L'exclusion légale est toujours possible pour un associé minoritaire, tandis qu'elle est davantage contrôlée pour un associé majoritaire. Il en est de même pour l'exclusion statutaire, qui peut être prononcée à l'encontre d'un associé minoritaire adoptant une attitude négative, s'opposant par exemple à la prorogation de la durée de la société. Cette disparité conduit en quelque sorte à donner des degrés au droit de propriété ; un associé serait en effet plus propriétaire qu'un autre si ses apports sont élevés, et donc moins susceptibles d'être exclus qu'un associé minoritaire dont les apports sont moindres. [...]
[...] La dissolution entraîne une imposition immédiate des bénéfices et des plus- values non encore taxées. Lorsque la société est dissoute, on transforme en liquide tout ce que la société a et en cas de surplus, des boni de liquidation sont attribués, mais ceux-ci sont imposables avec un très fort taux d'imposition. Pour les sociétés ayant un régime soumis à l'IS, les conséquences fiscales sont encore plus dramatiques. Il s'agit donc de protéger aussi bien la société elle-même que les associés face à une dissolution synonyme de suicide fiscal. [...]
[...] Or, il faut noter que la compensation est aussi conférée à l'associé qui a commis une faute. Dans ce cas, on peut dire qu'il s'agit moins d'une compensation que d'une aberration. Ainsi, l'exclusion en elle-même peut paraître injuste, mais au stade du jugement de l'exclusion, on peut dire que l'associé n'est plus dans une situation de faiblesse, mais dans une situation qui restaure un équilibre. Nous allons voir à présent que le droit d'exclusion est justifié, car il répond à d'autres impératifs. [...]
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