« Il faut donner aux consommateurs les moyens de faire respecter leurs droits ». Par cette formule énoncée lors de son discours le 4 janvier 2005, Jacques Chirac entendait confier une mission à son gouvernement : modifier la loi pour permettre l'introduction en France d'une action collective au profit des groupes de consommateurs. Sous couvert d'un appel à soutenir la croissance et à rétablir une égalité des armes entre consommateurs et entreprises, il rappelait l'opportunité de transposer en droit français (au sein du Code de la consommation et de procédure civile) cette class action héritée des pays du Common law pour faire cesser les pratiques abusives au sein des marchés.
[...] - La class action permettrait de sanctionner les producteurs de leur tromperie sur la qualité des produits vendus, en les condamnant à payer non seulement des dommages et intérêts, mais aussi en prononçant des injonctions de faire ou de ne pas faire, ou de demander la suppression de clauses abusives ou de pratiques discriminatoires. - Dès lors, la class action tendrait à moraliser le comportement des acteurs économiques en les condamnant à de lourdes amendes et en les incitant à plus de prudence. Elle aurait de surcroît le mérite de diminuer les recours (plaintes) devant les instances pénales. II. [...]
[...] Les difficultés présidant à l'introduction d'une class action en France A. La préservation du modèle juridique français : tradition et principes structurants - La class action s'inscrit dans la négation des droits de la défense et de l'autorité relative de chose jugée: en France, on ne peut répondre aux moyens d'un demandeur dont on ignore l'identité et être lié par une décision issue d'une procédure à laquelle on n'est pas associé. - Le heurt des class actions avec deux principes consacrés par la tradition française : l'adage nul ne plaide en France par procureur ie qu'il est interdit de se dissimuler derrière un mandataire et le principe codifié de la prohibition des arrêts de règlement (pas de jugement in abstracto ie rendu en méconnaissance des parties au litige et de leurs prétentions). [...]
[...] - Au fond, le justiciable français dispose déjà d'un arsenal juridique pour faire face aux comportements abusifs des professionnels : la législation communautaire et le Code de la consommation (action des associations devant les tribunaux pour faits relatifs à un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs ; action devant la juridiction civile ou répressive pour faire cesser tout agissement illicite ou encore l'action en représentation conjointe pour obtenir la réparation de préjudicies individuels causés par le fait d'un même professionnel visés respectivement aux articles L 421- L421-2 et L 422-1). Bibliographie Marie-Anne FRISON-ROCHE, Les résistances mécaniques du système juridique français à accueillir la class action: obstacles et compatibilités, LPA - Yves PICOD, Le charme discret de la class action, Dalloz Tribune - Guillaume CERUTTI et Marc GUILLAUME, Rapport sur l'action de groupe décembre 2005. - Isabelle ROMY, Litiges de masse : des class actions aux solutions suisses, Editions universitaires Fribourg Suisse, 1997. [...]
[...] L'opportunité d'une réception positive de la class action en droit français A. La class action, un recours tendant à conjurer les carences procédurales en droit interne - La consécration de l'exigence de bonne administration judiciaire : la class action tendrait à faciliter un bon fonctionnement du service public de la justice puisqu'elle permettrait de regrouper devant un seul tribunal des causes pouvant encombrer de nombreux tribunaux. - Une simplification considérable de la procédure : la décision est exprimée par le juge de manière impersonnelle pour toutes les victimes dans la même situation et les sommes allouées seraient ensuite réparties entre celles-ci. [...]
[...] Pourtant, si le phénomène des class actions n'est pas nouveau en France, les instances dirigeantes sont peu enclines à instituer une telle action et lui préfèrent la médiation. Par conséquent, du projet de loi Calais-Auloy (1985) en passant par le projet portant dépénalisation du droit des affaires (2008) ou encore de la loi LME dont elle fut radiée, la France tarde et transige à mettre en œuvre cette class action qui fait figure d'exception en Europe malgré l'énergie que dépense la Commission pour l'imposer : inexistant en Belgique, en Italie et aux Pays-Bas, le système des class actions se développe en Suède et au Portugal et est expérimenté en Allemagne et en Angleterre. [...]
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