Un époux, par acte du 27 juillet 1960, se portant fort pour son épouse, avait convenu avec un promoteur de réaliser un programme de construction immobilière sur environ cent trente des trois cents hectares du domaine appartenant à son épouse, de laquelle il est contractuellement séparé de bien. Le programme avait pour but de constituer trois sociétés civiles immobilières auxquelles seraient apportés les terrains, le promoteur étant chargé de la réalisation des programmes.
De plus, l'époux, pour équiper le restant du domaine qui conservait sa vocation agricole, verrait mettre à sa disposition par le promoteur un volume de capitaux. Le promoteur, tout en se réservant cinquante pour cent des rapports nets laissés par ces opérations, se substitue une société de travaux, constituée elle-même par une autre société de travaux pour les besoins de la cause. Les trois sociétés civiles immobilières (SCI) sont donc constituées, l'épouse faisant apport de ses terrains et les autres associés s'engageant à faire des apports en numéraire.
L'époux, attendant d'obtenir des capitaux du promoteur, accepte des lettres de change tirées par la deuxième entreprise de travaux qui finit par le poursuivre en paiement. L'époux est condamné au paiement. Cette deuxième entreprise de travaux fait pratiquer des saisies-arrêts entre les mains des trois SCI sur les sommes, valeurs, effets ou objets dont les sociétés seront jugées débitrices envers l'époux. L'entreprise assigne les époux en validité de ces saisies-arrêts dans le délai légal. Les époux assignent eux-mêmes les trois autres associés en nullité des trois SCI et en condamnation solidaire à des dommages et intérêts.
La question qui se posait alors à la Cour de cassation était la suivante : quelles sont les modalités du régime de la nullité du contrat de société ?
[...] L'article 1832 alinéa 1 du Code Civil établit un lien entre la société et le contrat. C'est pourquoi la société doit respecter, pour être valide, les conditions de fond du contrat, déterminées par l'article 1108 du Code Civil. La cause fait partie de ces conditions de fond, elle doit être effective et licite dans l'obligation. En l'espèce, la Cour de cassation n'aura pas besoin de se pencher sur la question de la licéité puisqu'elle prononce directement l'absence de cause effective. [...]
[...] Première chambre civile, Cour de cassation octobre 1971 - les modalités du régime de la nullité du contrat de société La société est un contrat complexe qui implique la réunion de plusieurs éléments constitutifs. Que l'un fasse défaut et la société est théoriquement nulle. Pareil anéantissement est grave, d'autant qu'il touche les tiers et qu'il entraine la condamnation à mort de la personne morale. Tel était le cas dans l'arrêt que nous allons étudier, rendu par la Chambre Civile de la Cour de Cassation le 27 octobre 1971. [...]
[...] La Cour de cassation fait ici une stricte application des textes, de l'article 1108 et 1131 du Code Civil. De plus, elle reprend ici la position de la Chambre Commerciale dans un arrêt survenu un an plus tôt le 19 janvier 1970 qui avait consacré la nullité d'une société anonyme comme ayant une cause illicite. Cette solution paraissait logique puisque la cause correspond au pourquoi de la création de la société, c'est-à-dire selon l'article 1832 du Code Civil, l'enrichissement des associés qu'il s'agisse pour chacun d'eux de partager un bénéfice ou de profiter d'une économie. [...]
[...] La question qui se posait alors à la Cour de cassation était la suivante : quelles sont les modalités du régime de la nullité du contrat de société ? Pour la Cour de cassation, la Cour d'appel avait à bon droit déduit que les trois SCI n'avaient pas eu d'existence et que par conséquent, il en était de même pour les parts sociales prévues et que, de ce fait, les saisies- arrêts qui avaient été pratiquées par l'entreprise de travaux se trouvaient être sans objet. [...]
[...] Si dans ce cas la nullité avait été prononcée, il faut dire que de plus en plus, le législateur aussi bien français qu'européen, en considération des nombreux inconvénients de l'anéantissement d'une société, tente de réduire les cas possibles d'annulation comme par exemple la directive européenne du 9 mars 1968 qui dans son article 11 inscrit une liste limitative des cas de nullité. En effet, quelles étaient les conséquences de la nullité, de l'inexistence ? Les conséquences de l'inexistence L'article 1844-15 du Code Civil pose la règle d'or : si la nullité de la société est prononcée, c'est sans rétroactivité. C'est une exception remarquable au droit commun des nullités. [...]
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