Par définition, le paiement effectué par un tiers éteint obligatoirement la dette dès lors que le créancier est satisfait (article 1236 du Code civil). Par une application stricte de ce principe, le véritable débiteur est alors libéré de sa dette. Dans le souci de rétablir un ordre juridique stable, le législateur a instauré le principe de la subrogation. La Première Chambre civile de la Cour de cassation, à travers un arrêt de rejet rendu le 12 juillet 2006, en a profité pour rappeler les conditions nécessaires à la juste application des deux sources de la subrogation : conventionnelle et légale (article 1249 du Code civil).
En l'espèce, une société associée d'une société civile immobilière acquitte les dettes souscrites par celle-ci auprès de deux banques. Elle agit donc en tant que solvens. Cette dernière va alors se prétendre subrogée dans les droits des deux établissements bancaires (créanciers). C'est ainsi qu'elle obtient le remboursement de l'une et l'autre créance sur le produit de la vente ultérieure d'un terrain de la société civile immobilière.
La société civile immobilière va alors assigner la société solvens en restitution des sommes versées.
Une simple quittance délivrée au solvens vaut-elle quittance subrogative ? D'autre part, la société solvens argue de la violation de l'article 1251 3° dès lors que la subrogation légale prévue par ce texte peut être invoquée par l'obligé solvens même si sa dette demeure virtuelle au moment du paiement.
Une dette virtuelle peut-elle faire l'objet d'une subrogation légale ?
[...] La possibilité conditionnée d'une subrogation légale pour une dette virtuelle Le Code civil prévoit certains cas pour lesquels la subrogation est automatique, les parties n'ont pas besoin de la mentionner explicitement. On parle alors de subrogation légale. Cette dernière est détaillée à l'article 1251 du Code civil qui dispose de cinq cas pour lesquels la subrogation doit être appliquée. Celui qui nous intéresse en l'espèce est disposé au troisième paragraphe. Il s'agit du cas dans lequel le débiteur paye une dette dont il était tenu avec d'autres ou pour d'autres. [...]
[...] Cependant, la Cour de cassation est plus souple quant à la subrogation antérieure. En effet, elle a reconnu dans un arrêt rendu en date du 29 Janvier 1991 que la condition de concomitance de la subrogation au paiement, exigée par l'article 1250, du Code civil, peut être remplie lorsque le subrogeant a manifesté expressément, fût-ce dans un document antérieur, sa volonté de subroger son cocontractant dans ses créances à l'instant même du paiement Ainsi, le subrogeant peut donner son accord avant le paiement et peut expressément reconnaître sa volonté de subroger le solvens dans sa créance au moment du paiement. [...]
[...] On pourrait donc penser que la Cour de cassation effectue une application stricto sensu de l'article 1250 en ce qu'elle n'admet pas le moindre doute et exige ainsi la preuve d'une concomitance certaine de la subrogation et du paiement. La Cour de cassation est donc constante sur ce point. La concomitance est alors mise premier rang en tant que condition clé. Le professeur Eric Savaux va expliciter les conséquences directes de cette condition. Cette application stricte de l'article 1250 du Code civil a en effet pour conséquence directe et logique de refuser la subrogation reconnue après le paiement, comme en l'espèce. [...]
[...] Pour statuer ainsi, la Cour d'appel se fonde sur l'absence de subrogation et légale, et conventionnelle. La société solvens forme alors un pourvoi en cassation arguant d'une part que la lettre du 9 Octobre 1990 délivrée par la banque lui donne quittance, comme conséquence du remboursement effectué. Selon la société, la lettre constituerait alors la subrogation conventionnelle que la quittance subrogative délivrée par la banque le 20 Mai 1994 ne ferait que rappeler la subrogation ainsi établie à la date du paiement. [...]
[...] Ainsi, la Cour de cassation souligne fortement à travers sa décision sa volonté de refuser la subrogation postérieure au paiement. Mais elle rejette ainsi implicitement la reconnaissance de la subrogation avant le paiement. Puisque le paiement est une condition de la subrogation, en principe celle-ci ne peut pas avoir lieu avant qu'il ait été effectué. La règle a été appliquée à de nombreuses reprises par la jurisprudence (Civ. 1ère 24 Mars 1992 : cas de l'assureur qui n'a pas encore versé l'indemnité d'assurance). [...]
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