L'arrêt de rejet rendu par la première Chambre civile de la Cour de cassation le 18 juillet 1995 définit les conditions du préjudice du créancier tentant une action paulienne contre son débiteur solvable. Plus précisément, cet arrêt permet la révocation d'un acte du débiteur fait en fraude à un droit spécial du créancier.
En l'espèce, un créancier hypothécaire procède à une action paulienne à l'encontre de son débiteur solvable. Cette action paulienne intervient afin d'annuler un bail à ferme conclu par le débiteur bailleur, postérieurement à la prise de l'hypothèque sur le bien. Le débiteur ayant également la qualité de bailleur forme un pourvoi en cassation afin d'obtenir la non-révocation de son bail à ferme en opposant sa solvabilité à l'action paulienne de son créancier. Il évoque également que le bail à ferme était légitime et non en fraude au droit du créancier.
Le problème juridique qui se pose en l'espèce est de savoir si l'action paulienne est recevable à l'encontre d'un débiteur solvable. En d'autres termes, il s'agit d'apprécier le préjudice d'un créancier tentant une action paulienne à l'encontre d'un débiteur solvable.
[...] Alors, on peut distinguer le créancier disposant de droit particulier sur le bien du débiteur et celui n'en possédant pas. Le régime de l'action paulienne serait donc double. Le créancier disposant d'un droit spécial doit seulement établir une perte de chance du paiement de sa dette. Alors que le créancier ne disposant pas de droit spécial devrait prouver l'insolvabilité du débiteur au moment où il introduit la demande de l'action paulienne. Mais alors ne peut-on pas concevoir simplement que le créancier doit prouver une perte de chance du paiement de sa dette. [...]
[...] Assouplissements de la condition de préjudice au droit du créancier : passage d'un critère quantitatif à un critère qualitatif du préjudice Le passage d'un critère quantitatif à un critère qualitatif du patrimoine du débiteur exige une fraude du débiteur à l'encontre des droits du créancier. En effet, selon le critère qualitatif il faut rechercher que le débiteur ait agi à l'encontre du droit spécial du créancier (A') et non plus selon le critère quantitatif, un acte ayant soustrait de l'actif au patrimoine du débiteur. Cette définition de l'atteinte au droit spécial du créancier constitue une certaine déformation de l'action paulienne qui donne au créancier disposant de droits spéciaux, d'une arme contre le débiteur (B'). [...]
[...] Cour de cassation, première chambre civile juillet 1995 - le préjudice d'un créancier tentant une action paulienne à l'encontre d'un débiteur solvable L'arrêt de rejet rendu par la première Chambre civile de la Cour de cassation le 18 juillet 1995 définit les conditions du préjudice du créancier tentant une action paulienne contre son débiteur solvable. Plus précisément, cet arrêt permet la révocation d'un acte du débiteur fait en fraude à un droit spécial du créancier. Il suffit que cet acte ait réduit la valeur du bien, donc l‘assiette du droit de gage du créancier, afin de rendre impossible ou inefficace l'exercice de ses droits. [...]
[...] La jurisprudence interprète assez largement l'acte d'appauvrissement. Le passage du critère quantitatif au critère qualitatif se fait en fonction des circonstances. Il faut regarder si l'acte du débiteur est fait en fraude des droits du créancier disposant d'un droit spécial. Plus précisément, la jurisprudence interprète assez largement la notion du préjudice réel subi par le créancier. L'arrêt en l'espèce par la notion de fraude empêchant l'exercice du droit spécial du créancier est une circonstance permettant d'effacer le critère quantitatif d'insolvabilité du débiteur. [...]
[...] En l'espèce l'arrêt remet en cause la définition du préjudice subi par le créancier. Une jurisprudence antérieure évoque déjà cette notion de l'effacement de la condition d'insolvabilité du débiteur. C'est un arrêt de la première Chambre civile de la Cour de cassation le 10 décembre 1974 qui évoque la non-nécessité de la condition d'insolvabilité du débiteur. Cet arrêt fait appelle à la notion d'inopposabilité des droits du créancier à l'encontre d'un débiteur ayant établi un acte grevant son bien d'un droit réel au profit d'un tiers. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture