Une clause de réserve de propriété engendre, pour un créancier, un effet non négligeable. En effet, elle lui permet de suspendre, selon M. Gérard Cornu, l'effet translatif que pourrait avoir un contrat, jusqu'au complet paiement de l'obligation qui en est la contrepartie. Ainsi, à défaut de la totalité du paiement à l'échéance, le créancier pourra se faire restituer le bien et en disposer.
L'arrêt présenté, en date du 19 novembre 2003 se penche sur cette notion de clause de réserve de propriété et vient en éclaircir certains points.
Un imprimeur de droit espagnol, la société Beta, a réalisé des ouvrages pour un éditeur français et, sur les bons de livraisons, figurait une clause de réserve de propriété jusqu'au paiement complet du prix.
L'éditeur, ayant été placé sous LJ en novembre 1997, la société Beta a régulièrement déclaré sa créance de prix des ouvrages et a également présenté au liquidateur une requête en revendication que ce dernier a rejeté, en ce que, selon lui, la qualité d'imprimeur de la société Beta ne pouvait lui conférer aucun droit de propriété sur les ouvrages revendiqués.
La même demande est, de surcroît rejetée par le juge-commissaire ainsi que le tribunal pour les même motifs invoqués par le juge-commissaire.
La société Beta interjette alors appel.
La CA de Lyon, par un arrêt en date du 13 octobre 2000, ne fait pas droit à la demande de l'imprimeur espagnol, en ce qu'elle se base, d'une part, sur une lecture étroite de l'article 121 de la loi du 25 janvier 1991 (article L 621-122 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005) en considérant qu'une clause de réserve de propriété ne peut produire ses effets que si elle est contenue dans un contrat de vente.
D'autre part, la CA de Lyon aurait également violé l'article L. 111-3 du code de la propriété intellectuelle, en son alinéa premier, en admettant que la distinction entre une œuvre de l'esprit et son support, opérée par ce dernier, puisse faire obstacle à une revendication.
La société Beta forme donc un pourvoi en Cassation.
Un double problème est, en l'espèce, soumis à la Cour de Cassation.
Ainsi, une clause de réserve de propriété peut-elle produire ses effets dès lors qu'elle se situe, non dans un contrat de vente, mais dans un contrat de louage d'ouvrage ?
En outre, les droits d'auteurs peuvent-ils être dissociés des droits sur le support matériel de la chose ?
La Cour de Cassation répond par la positive à ces deux interrogations et casse donc l'arrêt de la Cour d'appel de Lyon.
Nous verrons donc, que la Haute Juridiction procède à une large application de l'article L. 621-122 du Code de commerce (I), mais pourtant à une application stricte de l'article L. 111-3 du Code la propriété intellectuelle, ce qui peut néanmoins être approuvé (II).
[...] Gérard Cornu, le contrat de louage d'ouvrage serait un contrat en vertu duquel une personne s'engage à réaliser un ouvrage déterminé pour une autre personne, ce dernier devant en payer le prix. Il semble donc se rapprocher de façon nette du contrat de vente qui consiste, lui, à délivrer une chose à un tiers qui devra également payer un prix. Ces deux types de contrats sont translatifs de propriété. Ces contrats sont donc si peu distincts si l'on prend en considération leur finalité te pourrait même se demander s'il ne conviendrait pas de leur appliquer, dans un futur proche, un régime commun. [...]
[...] L'arrêt du 19 novembre 2003 vient donc clarifier quelque peu les choses. Un arrêt entérinant les effets de la clause de réserve de propriété au- delà du contrat de vente et du contrat d'entreprise. Si la jurisprudence avait admis qu'une clause de réserve de propriété puisse être insérée dans un contrat autre qu'un contrat de vente, l'arrêt présenté ici établit cette affirmation de façon explicite. En outre, la Haute Juridiction, non seulement vient appuyer la jurisprudence antérieure, mais elle vient également clore un débat qui aurait pu amener la doctrine à se demander si seuls les contrats d'entreprise étant visés, en plus des contrats de vente (les décisions précédemment citées ne faisant effectivement allusion qu'aux contrats d'entreprise). [...]
[...] Nature du contrat comportant une clause de réserve de propriété (CAss. com novembre 2003) Une clause de réserve de propriété engendre, pour un créancier, un effet non négligeable. En effet, elle lui permet de suspendre, selon M. Gérard Cornu, l'effet translatif que pourrait avoir un contrat, jusqu'au complet paiement de l'obligation qui en est la contrepartie. Ainsi, à défaut de la totalité du paiement à l'échéance, le créancier pourra se faire restituer le bien et en disposer. L'arrêt présenté, en date du 19 novembre 2003 se penche sur cette notion de clause de réserve de propriété et vient en éclaircir certains points. [...]
[...] Même si la Cour de Cassation, dans l'arrêt de 1998 ne se basait pas sur l'article L.621-122 du Code de commerce, mais sur l'article L. 621-124 du Code de commerce, ce dernier lui opère néanmoins un renvoi et on peut donc clairement souligner le fait que la Haute Juridiction a admis, dès cette date-là, la possibilité, non seulement d'inclure une clause de réserve de propriété dans un contrat, autre qu'un contrat de vente, mais surtout que la clause de réserve de propriété peut produire les effets juridiques escomptés. [...]
[...] La Haute Juridiction aligne donc leur position à un même niveau, pour une meilleure égalité de traitement. Même si la lettre du texte semblait guider les juges du fond, c'est une autre direction qui a été suivie par les juges de la Cour de Cassation. En outre, ce n'est pas seulement sur ce point-là que la CA est sanctionnée. Un second élément, relatif à l'application de l'article L. 111-3 du CPI attire également l'attention de la Cour de Cassation. On peut être amené à se demander si la position de cette dernière peut néanmoins être réellement être approuvée. [...]
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