Le Code de commerce autorise, dans les sociétés non cotées, l'insertion dans les statuts d'une clause d'agrément qui soumet à l'appréciation de la société les transferts de titre (article L228-23 à L228-26). Toutefois, le domaine des clauses d'agrément est strictement délimité, notamment par les juges. C'est ce dont il était question dans l'arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 6 mai 2003.
Une société anonyme avait absorbé par voie de fusion une autre société qui détenait 44,21% du capital d'une troisième société. Cette dernière avait assigné la société absorbée en annulation du transfert de ses actions à celle-ci en faisant valoir que la société absorbée n'avait pas bénéficié de l'agrément prévu par les statuts relatifs à l'agrément des cessions d'actions.
La question qui se posait alors à la Haute Juridiction était la suivante : la clause d'agrément peut-elle jouer à l'occasion d'un transfert de titres réalisé lors de la transmission universelle du patrimoine de la société détentrice d'action ?
[...] - Certains auteurs ont pu dire qu'il s'agissait d'une interprétation à contrario de la loi. En effet, constatant que le législateur a prévu expressément un certain nombre de cas dans lesquels la clause d'agrément ne peut pas s'appliquer, la Cour de Cassation avait pu en déduire que l'article susvisé n'interdit pas l'application d'une telle clause à un transfert d'actions résultant d'une fusion. Pour Paclot, une interprétation comme celle en l'espèce serait viciée, car il ne faut l'utiliser que pour retrouver le droit commun, et non pour étendre le champ des exceptions qui sont en temps normal d'interprétation stricte. [...]
[...] En effet, cet article ne vise pas la fusion absorption parmi les opérations ne pouvant pas être soumises à l'agrément de la société par une clause des statuts. - Cependant, on peut dire que c'est une interprétation large de la notion de cessions d'actions englobe les cessions au sens strict et les transmissions. - En outre, l'admission de la clause n'est pas contraire au principe de négociabilité car la négociabilité s'intéresse aux formes qui vont être requises pour transférer le droit et aux effets de la transmission. [...]
[...] Ce qui laisse à penser que permettre aux sociétés de se protéger en cas d'absorption d'une société actionnaire contre de nouveaux venus répond à des impératifs tout aussi valables que le principe de libre négociabilité. Cela permet de trouver un équilibre afin d'assurer une meilleure protection de la société. - La transmission universelle du patrimoine est une fiction dont l'absolutisme ne saurait aller jusqu'à nuire aux intérêts des tiers. Ici, la loi, comme la jurisprudence, procède à une balance des intérêts éventuellement divergents des parties à la fusion et des tiers. [...]
[...] Cour de cassation, chambre commerciale mai 2003 - la clause d'agrément des sociétés non cotées La nature de la Société Anonyme, comme société de capitaux néglige en principe l'intuitu personae : le principe est la libre cession entre vifs. Cela justifie que quiconque puisse devenir actionnaire. Cependant, le dogme souffre un tempérament puisque le Code de Commerce autorise, dans les sociétés non cotées, l'insertion dans les statuts d'une clause d'agrément qui soumet à l'appréciation de la société les transferts de titre (article L228-23 à L228-26). [...]
[...] L'interprétation des clauses d'agrément en vue de la détermination de leur application - La réponse à la question de savoir si une clause d'agrément s'applique ou non au transfert des droits sociaux par voie de fusion ou de scission dépend, pour la Cour de Cassation, de sa rédaction. Cela est conforme à l'idée selon laquelle, avec une clause d'agrément, on se trouve au plein cœur de la liberté contractuelle. Si la clause n'est pas claire, précise et non ambiguë, les juges du fond doivent interpréter la clause et ils disposent pour cela d'un pouvoir souverain. [...]
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